Contribution – C.E.D.E.A.O : De l’idéal originel d’émancipation de ses peuples à son aveu d’une servitude pour des intérêts extra-africains ?

Contribution – C.E.D.E.A.O : De l’idéal originel d’émancipation de ses peuples à son aveu d’une servitude pour des intérêts extra-africains ?
Cette organisation intergouvernementale sensée privilégier le développement et l’intégration économiques des pays membres, dans une singulière union qui rassemble pays anglophones et francophones, semble perdre de vue sa raison d’être pour s’ingérer dans les affaires intérieures de pays membres, puisqu’elle n’est pas une alliance politico-militaire à l’instar de l’OTAN qui lui dicte sa position à travers une France désormais indésirable dans la Région.

Un scénario qui rappelle la Libye.

Seize pays à sa création dont trois l’ont désertée. Une preuve de sa défaillance consommée, sa solidarité remise en cause, son indépendance politique césurée et sa diplomatie collective douteusement alignée. Une faille plus profonde qu’une entorse s’est creusée dans l’édifice institutionnel d’une CEDEAO qui perd de sa crédibilité en s’abandonnant aux pressions extérieures.

Est-elle vraiment une Organisation Africaine authentique souveraine ou d’un nom d’emprunt à la solde de pays tiers ?

Avec des centaines de millions d’habitants de diverses cultures et de religions, d’économies variables et de gouvernances démocratiques ou contestées, la CEDEAO a été interpellée à l’occasion des coups d’Etat au Mali, au Burkina Faso, avant celui du Niger, sans qu’aucun peuple de la CEDEAO ne se soit distingué pour appuyer une belligérance extérieure contre ces pays en rébellion contre l’ordre inique établi. Bien plus, beaucoup ont applaudi.

La CEDEAO s’est mobilisée, dans l’objectif de susciter un soulèvement populaire contre ce qu’ils qualifient « la junte », un concept emprunté au quai d’Orsay et adopté par France 24, qui a voulu le distiller avec un tel matraquage médiatique que le peu de ses auditeurs s‘en est vite lassé. France 24 s’est vue donc interdite d’émettre et pour cause !

Autant de détermination de la CEDAO pour décréter un embargo économique au Mali, sous la pression française pour affamer les maliens et les couper du monde.

Elle n’y est pas parvenue et la transition a fait souverainement son chemin avec moins de dégât jusqu’à recomposer le paysage politique et institutionnel dans ce pays qui ne se porte que mieux sur le triple plan sécuritaire, économique et politique. Une sérénité retrouvée qui a du inspirer d’autres.

Au Burkina, même scénario de bruits de bottes et de sanctions économiques, sans que rien n’entame un soulèvement populaire décidé à aller jusqu’au bout de son idéal. Rétablir « le pays des Faso » dans l’esprit de feu Sankara !

Maintenant qu’il s’agisse du Niger, un pays et un peuple, qui dit non à l’ingérence étrangère et à la spoliation de ses richesses minérales rares, l’uranium et le pétrole dont il regorge, de jeunes officiers se sont rebellés pour corriger un destin dévoyé d’un pays riche mais condamné à une chronique paupérisation.

Que la C.E.D.A.O. se fasse une lecture introspective de la réalité du peuple nigérien avant de s’aventurer à acter une décision de guerre honteuse contre, non pas un renversement anticonstitutionnel, mais pour pérenniser la misère et la pauvreté d’un peuple dont la gouvernance a bradé ses richesses sans aucune contrepartie, étant condamné à survivre à doses homéopathiques de l’aide humanitaire extérieure. Le Niger est à la traine dans le classement de l’indice de développement social.

La CEDEAO devrait penser collectivement dans la solidarité avec le peuple nigérien en l’écoutant au lieu de céder aux pressions extra-africaines qui agissent sous couvert d’un retour à l’ordre constitutionnel, mais qui n’est en réalité qu’une ancienne rengaine sous prétexte de démocratie, pour couvrir et protéger des intérêts stratégiques et économiques néocoloniaux vitaux pour ceux qui alimentent l’hypothèse de l’intervention militaire au lieu de préserver le peuple innocent du Niger..

Le sommet extraordinaire de la CEDEAO prévu à Abuja le 15 août, devrait se débarrasser des pressions occidentales et penser « africain » pour se réapproprier la solution d’un problème africain par les africains.

Mohamed El-Abassi, ex-diplomate

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