Petite balade matinale à Tidjikja – Par Isselmou Salihi

Petite balade matinale à Tidjikja
Les rayons du soleil traversaient des nuages blanchâtres juchés sur la colline de «Taref» qui surplombe Tidjikja, de l’est. La matinée était douce, en cet été, les vents avaient marqué une pause et un semblant de brouillard enveloppait encore la ville.
La nuit avait été fraîche la veille avec 23°. Mais la fraîcheur quittait deja la ville et le thermomètre amorçait son habituelle ascension qui doit se stabiliser en milieu de journée, aux alentours de 38°. Tidjikja était encore calme avec le bruit dominant du groupe électrogène de la Somelec, celui du passage discontinu des véhicules sur le goudron et le croassement de quelques corbeaux perchés sur les poteaux électriques qui m’ont semblé avoir perdu leur fameux pelage blanc. Je me decide à aller faire une petite balade dans cette ville qui n’a pas énormément changé par rapport aux souvenirs que je garde et qui remontent -Alhamdoulilah- à plus de quatre décennies .
J’entame la balade du coté de «Jmeylat Dbech» que la nouvelle génération appelle «compagnie» et qui donne une excellente vue d’ensemble sur la ville. Les premieres impressions qui viennent à ceux (ou celles) qui ont connu les lieux dans les années 70 sont nombreuses : la ville s’est particulièrement ensablée, le sable de sa Batha a changé de couleur, des images d’arbrisseaux et de buissons décharnés consécutifs aux effets de la sécheresse vous reviennent en regardant vers «Noualig» au nord et «El Mabrouk» à l’ouest ainsi que vers l’oued qui traversait la ville et faisait son charme avec ses indénombrables palmiers. Cet oued est aujourd’hui réduit à sa plus simple expression, partout et notamment, à Chemsiyat, Lembeydie, Nejdiya, Medalla, ElMebrouk, Elbeyghbagh, Bignihmek .
La ville est heureusement devenue beaucoup plus propre et s’est développée dans plusieurs sens. Des infrastructures importantes y ont fait leur apparition: la route qui la relie à celle de l’espoir, une route qui la relie à l’Adrar, un tribunal, un stade,un château d’eau, des logements sociaux (de Taazour), un conseil regional, un marché de bétail, un abattoir, des édifices éducatifs, des voiries urbaines reliant les quartiers et un hôpital regional, un camp militaire et une route vers le Guidimagha, en construction. Cela n’en fait pas la «promenade des Anglais» de Nice, mais c’est des avancées tout de même, me suis-je dit dans ma balade qui ne pouvait évidemment commencer que par «Aghaguenit» et son «Bacar massala» où j’ai vécu une partie de mon enfance, puis «Beir Sardana», la mare de «Aghowji» notre ancienne piscine publique puis la «ghadima» le vieux quartier datant de la création de la ville en 1660, dont l’ancienne «avenue Lemseiguema» m’a semblé avoir été bouchée quelque part et d’où je ressors vers «ElGaada» l’ancien centre ville, duquel je fais un détour vers une deuxième mare celle de «Dhoueya» dans laquelle nous barbotions au milieu des années 70 comme des poissons-chats et où s’élèvent maintenant un cimetière et des habitations.
Je ne pouvais pas rater l’occasion de faire un saut, juste à coté, au lycée, qui n’était qu’un collège au debut des années 80. A l’époque les collégiens ayant fini leur premier cycle devaient faire le second cycle de l’enseignement secondaire à Aioun. Au lycée où j’ai pris des photos de ma salle de classe toujours dominée par un château d’eau rouge métallique, un homme est venu à ma rencontre l’air indisposé. Etant peu porté sur l’esquive, je suis allé moi aussi à sa rencontre pour découvrir qu’il était un promotionnaire de première année du collège dans la salle «Lemdeyreumze», a-t-il précisé .
Je le quitte dans une affection réciproque pour aller à l’école 2, mon école primaire que j’ai eu des difficultés à reconnaître. Elle était à l’époque constituéę de chambres éparses dont certaines ont disparu ou changé de physionomie. J’ai cru reconnaitre malgré tout, la chambre où j’ai étudié durant la 6e année du primaire et je ne peux m’empêcher ici de rendre un vibrant hommage à mes enseignants à l’époque, les regrettés Mohamed El Moctar Ould El Hadj Sidi et Lemrabott Ould Taleb Mohamed qu’Allah leur accorde sa miséricorde, pour leurs grandes qualités d’éducateurs, de pédagogues et de pères.
Perdu dans les souvenirs relatifs à ces deux grands hommes, je décide de remonter vers l’est où je passe par les quartiers «Bameira», «Neteg jembe », «Zreibat», «Legreiva» et «Taref». Je me pavane tout pensif au passé , au présent et aux effets du temps, du vent et des humains sur cette contrée pluri-centenaire. Je rebrousse chemin en continuant à recevoir dans un rétroviseur virtuel des images du passé pour déboucher «Rag El Haya» et ses deux palmiers emblématiques puis «El wasta» d’où j’aperçois l’ancienne maison de Ehel Bouleiba.
Je retraverse la batha vers «El Argoub» pour revenir à «Jmeylat Dbech».
Avec le temps la ville a bien changé, même si par endroits le temps y a plutôt suspendu son vol.
Isselmou Salihi

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