Enseignant : et si c’était à refaire, je serais encore enseignant !

Enseignant : et si c’était à refaire, je serais encore enseignant !

Hier soir comme par hasard, au sortir de la mosquée, je rencontrai mon premier instituteur. L’homme avait trop changé, le dos voûté, le regard hagard et le visage ridé, la bouche avait un peu changé avec beaucoup de dents en moins ; il était fichu comme l’as de pique et éprouvait de grosses peines à se mouvoir. Cet état de fait faisait contraste avec ce jeune homme plein de vie et d’amour que j’avais connu à Atar puis à Nouadhibou pendant mon adolescence. En effet, malgré le poids de l’âge, les difficultés de la vie conjuguées avec le chagrin d’avoir embrassé un métier qui ne nourrit pas son homme, notre monsieur était resté serein et faisait le bon cœur contre une mauvaise fortune. J’avance vers lui et mes deux mains entrelacées au dos et m’accroupit comme le recommande la tradition, il posa sa main sur mon épaule sans mot dire puis quelques secondes après, il me cita nommément… Et il se mit à s’enquérir des nouvelles de la famille et curieusement, on était voisins, mais comme dans la ville chacun s’occupe à gérer le quotidien vivant au jour le jour en remuant ciel et terre pour joindre les deux bouts …
Ce qui est frappant, malgré son age et sa retraite depuis plus de quinze ans, notre maître continue à enseigner dans le Privé pour pouvoir arrondir les fins des mois. Mon fils me dit – il :(J’avais choisi enseigner par amour tout sachant que je n’y gagnerai pas une fortune, mais que je participerai à la formation de nos enfants… Et si encore, c’était à refaire, je choisirai d’enseigner). Mon maître est fier d’avoir joué et fait sa partition pour la construction de son pays. Avec le recul, je vois que cet adage peut s’appliquer à mon maître : QUAND JE ME DÉSOLE, JE ME COMPARE ET QUAND JE ME COMPARE, JE ME CONSOLE !
S’il y avait une échelle de considération de la valeur des corporations, certainement, l’enseignant en Mauritanie serait au bas de celle-ci ! Son traitement ne lui règle que quelques circonstances malgré tous ses sacrifices à combattre l’analphabétisme et à hisser le drapeau national partout dans le territoire. Il arrive de trouver dans des localités reculées du territoire un drapeau flotté dans une cour d’école et comme seuls symboles de l’État : enseignant, le drapeau et l’école… Jadis, l’instituteur s’accompagnait avec les préfets et les chefs d’arrondissement, mais aujourd’hui, la réalité est autre… Les enseignants aussi bien instituteurs que professeurs se situent au bas de l’échelle. L’histoire nous enseigne cependant qu’aucune nation au monde ne peut connaître l’émergence sans valoriser ses enseignants ! Quel système éducatif s’est développé dans le monde en piétinant ses enseignants ?
Pour Rapideinfo Yahya Niane

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