Arts : le Marrakech de Winston Churchill aux enchères à Londres

INÉDIT. Amoureux du Maroc, le Premier ministre britannique a été séduit par de nombreux paysages du royaume. Plusieurs de ses toiles arrivent chez Christie’s.

 Peintre amateur sur le tard, Winston Churchill a réalisé plus de cinq cents œuvres. Parmi les plus connues : La Tour de la mosquée Koutoubia, qui sera mise en vente ce lundi 1er mars par la célèbre salle de ventes londonienne Christie’s.

L’emblématique Premier ministre britannique (1874-1965), peintre et écrivain à ses heures perdues, a trouvé à Marrakech un lieu d’inspiration « captivant ». Plus qu’une vue lumineuse de Marrakech, ce tableau est on ne peut plus chargé d’histoire. Il fut le seul tableau créé par Churchill pendant la Seconde Guerre mondiale. En effet, il a été peint à l’issue de la conférence de Casablanca, en janvier 1943, au moment même où les Alliés se rassemblaient après avoir vaincu l’Allemagne nazie.

Aujourd’hui, l’huile sur toile, mise à la vente par l’actrice américaine Angelina Jolie, est considérée « comme le tableau le plus important de Sir Winston Churchill » en raison de son « imbrication dans l’histoire du XXe siècle », écrit l’historien d’art britannique Barry Phipps dans le catalogue. C’est ce qui explique combien La Tour de la mosquée Koutoubia attise déjà les spéculations, avec des estimations allant de 1,7 à 2,8 millions d’euros, selon le site de Christie’s. Une somme record d’autant plus étonnante que l’homme politique n’est pas reconnu comme un génie de la peinture.

Une œuvre chargée d’histoire

Le leader conservateur a commencé à peindre sur le tard, quand il avait 40 ans. Celui qui aimait fuir les orages politiques et la grisaille londonienne avait découvert la lumière de la cité ocre de Marrakech dans les années 1930, à l’époque du protectorat français, et y effectua au total six voyages en 23 ans. « Ici, dans ces vastes palmeraies émergeant du désert, le voyageur peut être sûr d’un ensoleillement éternel » et « contempler avec une satisfaction incessante le panorama majestueux et enneigé des montagnes de l’Atlas », écrivait-il en 1936 dans le journal britannique Daily Mail.

 Winston Churchill a commencé à peindre des scènes du Maroc après avoir été encouragé à visiter le pays par son professeur de peinture, Sir John Lavery.© Tolga Akmen AFP

Le monstre politique aimait se perdre dans le dédale des rues de la vieille ville, partir en pique-nique dans la vallée de l’Ourika, sur les hauteurs de Marrakech, et installer son chevalet sur les balcons du grand hôtel La Mamounia ou de la villa Taylor – qui deviendra un repère de la jet-set européenne dans les années 1970.

C’est depuis cette villa qu’il a peint la mosquée Koutoubia, après la conférence historique d’Anfa, organisée en janvier 1943 à Casablanca avec le président américain Franklin Roosevelt et le chef des Forces françaises libres, le général de Gaulle, et en présence du sultan Mohammed V, pour préparer la stratégie des Alliés. Une légende rapportée par son entourage veut qu’il ait à l’époque dit à Roosevelt : « Vous ne pouvez pas faire tout ce chemin en Afrique du Nord sans voir Marrakech […]. Je dois être avec vous quand vous verrez le coucher du soleil sur les montagnes de l’Atlas. »

Désormais propriété de la famille royale marocaine, la villa Taylor ne se visite plus. Le lieu offre une vue exceptionnelle sur la médina, côté Bab Doukkala, jusqu’à la mosquée de la Koutoubia et au fond le Haut Atlas couvert de neige », selon Abderrazzak Benchaâbane, un des botanistes du célèbre « jardin Majorelle » à Marrakech. Une photographie de presse d’époque montre Roosevelt et Churchill y admirant ensemble le coucher de soleil sur le panorama qui inspirera le tableau.

Ce paysage simple et sans fioritures représente le minaret, symbole de puissance de la dynastie Almohade (XIIe siècle), enlacé par les remparts de l’ancienne ville et adossé aux montagnes enneigées. Churchill l’offre à l’époque à Roosevelt. Vendu par un des fils Roosevelt dans les années 1950, le tableau change plusieurs fois de mains, avant d’atterrir en 2011 dans la collection du couple hollywoodien Angelina Jolie et Brad Pitt – bien avant leur séparation.

Le Point Afrique (avec AFP)

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