Accueil |

Quand l’hypocrisie devient une politique d’Etat

Quand l’hypocrisie devient une politique d’Etat

L’art mauritanien du deux poids, deux mesures, cette discipline dans laquelle le régime excelle avec une constance remarquable ! D’un côté, des individus qui ont ouvertement menacé de prendre le pouvoir par la force sont accueillis en héros, invités aux grandes cérémonies officielles et réintégrés dans le paysage politique comme si de rien n’était. De l’autre, un député qui a simplement dénoncé des injustices bien réelles se voit traîné devant le tribunal du patriotisme sélectif. On se moque de qui, exactement ?

L’impunité pour les uns, le tribunal pour les autres

Quand deux individus publient une vidéo incendiaire, appelant à renverser le pouvoir par la force, on pourrait s’attendre à ce qu’ils soient poursuivis pour incitation à la rébellion, voire menaces contre la sûreté de l’État. Mais non ! L’un d’eux revient tranquillement à Nouakchott, non seulement sans être inquiété, mais en plus, il est invité à l’investiture du président qu’il voulait renverser. Voilà un exemple parfait de l’indulgence surprenante dont bénéficient certains en Mauritanie, tant qu’ils sont du bon côté de l’histoire officielle.

Et pendant ce temps, Khally Diallo, député du peuple, se retrouve accusé de “manque de patriotisme” simplement pour avoir dénoncé le racisme d’État. On ne lui reproche même pas d’avoir menti ou exagéré, non. Son crime, c’est d’avoir osé parler, d’avoir porté une vérité que certains préfèrent enterrer.

Le patriotisme à géométrie variable

En Mauritanie, le patriotisme est devenu une arme politique, un outil de sélection pour décider qui a le droit de parler et qui doit se taire.

• Appeler à renverser le pouvoir ? Pas de problème, tant que vous appartenez à la bonne caste et que vous avez les bons soutiens.

• Dénoncer le racisme systémique et la marginalisation de certaines communautés ? Attention, vous êtes un traître, un danger pour l’unité nationale !

Si le patriotisme signifie couvrir les injustices, alors il devient une simple servitude. L’amour d’un pays ne se mesure pas au silence qu’on impose à ses citoyens, mais à la capacité de ce pays à écouter et à se réformer. Khally Diallo n’a pas attaqué la Mauritanie, il a défendu les Mauritaniens oubliés.

Tout cela ne fait que confirmer une évidence : le système ne punit pas les actes, il punit les identités et les idées.

• Si vous faites partie de l’élite dominante et que vous commettez un acte grave, vous serez réhabilité en un claquement de doigts.

• Mais si vous êtes un député noir, portant la voix des exclus et dénonçant les discriminations, vous serez diabolisé, accusé de semer la discorde, et traîné dans la boue.

Finalement, ce procès contre Khally Diallo n’a rien à voir avec le patriotisme. C’est une démonstration de force du régime, un message envoyé à tous ceux qui voudraient suivre son exemple : “taisez-vous ou subissez les conséquences”.

Eywa : Qui sont les vrais ennemis du pays ?

Ceux qui dénoncent le racisme d’État sont-ils vraiment les ennemis de la Mauritanie ? Ou bien ceux qui se cachent derrière un faux patriotisme pour maintenir les injustices ?

On ne construit pas un pays en muselant les voix dissidentes et en récompensant ceux qui ont prôné la violence. On le construit en écoutant, en corrigeant ses erreurs et en garantissant la justice pour tous.

Mais à voir comment les choses fonctionnent aujourd’hui, on pourrait presque croire que l’injustice est devenue une institution à protéger, et la vérité un crime à condamner.

Sy Mamadou

Articles similaires