Migrations : les relations entre l’UE et l’Afrique du Nord ne sont pas au beau fixe

Migrations : les relations entre l’UE et l’Afrique du Nord ne sont pas au beau fixe

Le rôle de l’UE et son influence politique en Afrique du Nord ont été entravés, car les priorités du bloc en matière économique et de sécurité ont été éclipsées par sa volonté de contrôler les flux migratoires, a déclaré un expert de la région lors d’un entretien avec EURACTIV.

Malgré la fragilité politique étendue dans la plupart de l’Afrique du Nord, et en particulier dans certains pays qui ont vu leur gouvernement tomber lors du Printemps arabe il y a dix ans, la politique d’engagement de l’UE avec la région s’est plutôt poursuivie à travers le prisme du contrôle des flux migratoires.

« Les tensions sont apparues lorsque les efforts visant à soutenir le commerce régional se sont heurtés à l’agenda européen en matière de migration. L’UE a adopté une attitude beaucoup plus dure vis-à-vis de la prévention et du blocage de la migration. Elle a délaissé les autres prétendues priorités européennes comme la promotion de la libre circulation et le commerce en Afrique », a fait savoir Andrew Lebovich, expert sur le Sahel au Conseil européen pour les Relations internationales (ECFR), lors d’un entretien avec EURACTIV.

La situation « effroyable » au Tigré discutée au sommet européen

L’UE a condamné mercredi (23 juin) la situation « effroyable » dans la région éthiopienne du Tigré où un marché a été bombardé.

L’UE a noué des accords d’association avec le Maroc, la Tunisie, l’Égypte et l’Algérie. Il convient tout de même de noter qu’Alger souhaite modifier les conditions de son entente avec Bruxelles, de même que les négociations visant à repenser l’accord avec Tunis sont en suspens depuis 2019.

Pour rappel, l’accord d’association (AA) constitue un type d’accord que l’Union est habilitée à conclure avec un ou plusieurs pays tiers ou organisations internationales, et qui crée une association caractérisée par des droits et obligations réciproques, des actions en commun et des procédures particulières.

Au sein de la région, les liens politico-économiques qu’entretient le Maroc avec l’UE demeurent les plus importants et stables. Néanmoins, des tensions persistent, notamment sur la question du territoire contesté du Sahara occidental. Une problématique « omniprésente » selon M. Lebovich.

Ce point a été mis en évidence lors d’un contentieux diplomatique récent entre le Maroc et l’Espagne. Fin mai, le gouvernement de Rabat a temporairement assoupli ses contrôles douaniers tandis que l’Espagne a orchestré l’hospitalisation du leader du Front Polisario, Brahim Ghali, souffrant de la Covid-19.

Cependant, Bruxelles continue de soutenir l’accord négocié par les Nations unies sur le Sahara occidental, et ce, malgré les pressions exercées par Rabat.

« La reconnaissance de la souveraineté marocaine sur le Sarah occidental sous l’administration Trump a certainement encouragé le gouvernement à exercer davantage de pression sur l’UE. Nous observons toutefois que le bloc ne répond pas par l’affirmative […] Bruxelles n’est pas prête à plier », a expliqué M. Lebovich.

Par ailleurs, les grandes opérations de sécurité et de soutien militaire de l’Europe en Afrique du Nord ont obtenu des résultats contrastés. De fait, début juin, Emmanuel Macron a annoncé la fin de l’opération Barkhane. Fort de 5 100 militaires, le groupement lutte depuis 8 ans contre les attaques djihadistes dans le Sahel. Mais, leurs efforts semblent vains. D’après le président français, la région est devenue « l’épicentre du terrorisme international ».

Emmanuel Macron annonce la fin de l’opération Barkhane au Sahel

À la veille du G7 au Royaume-Uni, Emmanuel Macron a annoncé que la France allait opérer une « transformation profonde » de sa présence militaire au Sahel, et la fin de l’opération Barkhane.

Les négociations entre l’Hexagone et plusieurs États membres sont en cours afin d’établir comment remplacer l’opération Barkhane avec la nouvelle force européenne Tabuka. Cette Task force comptera parmi ses rangs des troupes françaises, estoniennes, tchèques et suédoises, entre autres.

« Il ne fait aucun doute que Paris voulait de l’Europe qu’elle joue un rôle prépondérant dans les opérations militaires. Il est cependant difficile de voir comment ce type d’engagement sera durable et remplacera la mission française », a déclaré le représentant de l’ECFR.

En outre, la lenteur avec laquelle l’UE a amorcé la livraison de ses vaccins Covid-19 dans la région la place également dans une position délicate, alors que la Chine et la Russie ont distribué le leur en grandes quantités au Maroc, à l’Égypte et à l’Algérie.

« Les difficultés liées à l’organisation de campagnes de vaccination dans la région entraînent une situation extrêmement préoccupante. Voilà qui devrait figurer parmi les priorités de la communauté internationale », a renchéri M. Lebovich.

« L’UE et les États-Unis d’Amérique effectuent certes des efforts pour résoudre le problème, mais ils demeurent insuffisants », a-t-il conclu.

EURACTIV.fr

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