La France veut renforcer ses intérêts économiques au Maroc

La France veut renforcer ses intérêts économiques au Maroc
ANALYSE. Avant le réchauffement diplomatique, et avec le Sahara en ligne de
mire, Paris et Rabat misent sur une nouvelle dynamique de leur coopération
économique.
Par notre correspondante à Rabat, Yasmine Tijani
Publié le 07/04/2024 à 09h39

Après le chef de la diplomatie française, Stéphane Séjourné, c’était au tour du
ministre délégué au Commerce extérieur et à l’Attractivité, Franck Riester,
de se rendre au Maroc, les 4 et 5 avril. Placée sous le signe de la relance de la
relation avec le Maroc, cette visite s’est inscrite dans le cadre de la nouvelle feuille
de route franco-marocaine. L’objectif affiché par le Quai d’Orsay est de « faire
vivre le partenariat unique qui unit la France et le Maroc, fondé sur un lien
exceptionnel, renouvelé par un agenda politique qui nous permet aujourd’hui de
nous projeter sur les trente prochaines années », a indiqué le porte-parole adjoint du
ministère français de l’Europe et des Affaires étrangères.
Accompagné des symboles de la présence économique française, à savoir le
directeur général de Business France, le président de la Chambre de commerce
internationale française ainsi qu’une représentante de la Banque publique
d’investissement (BPI) et l’ambassadeur français au Maroc, le responsable français
n’en est pas à sa première visite au Maroc. Il s’y est déjà rendu à plusieurs reprises.
Au programme : des rencontres avec les membres du gouvernement marocain et
avec des chefs d’entreprises français et marocains, ainsi que la cérémonie de
signature entre Business France et la Chambre française de commerce et
d’industrie du Maroc (CFCIM). De quoi illustrer la volonté de Paris de tourner
définitivement la page de la brouille diplomatique.

Vers un partenariat économique renouvelé

À son arrivée à Rabat, le ministre français s’est entretenu avec le ministre marocain
de l’Industrie et du Commerce, Ryad Mezzour. Cette rencontre fut « l’occasion de
renouveler la confiance mutuelle et d’approfondir les discussions sur les moyens de
renforcer la coopération bilatérale, notamment en facilitant les échanges
commerciaux entre le Maroc et la France », souligne Ryad Mezzour sur X (exTwitter). Plusieurs secteurs sont concernés : l’aéronautique, le ferroviaire, les transports ou encore les énergies.
Si les relations franco-marocaines étaient émaillées par des brouilles ces dernières
années, les échanges commerciaux, eux, n’ont pas été impactés par celles-ci. En
effet, les échanges entre Paris et Rabat ont atteint un record de 14 milliards d’euros
en 2023, soit deux fois plus qu’en 2015. Plus de 1 000 filiales françaises opèrent
dans le pays. Il convient aussi de noter que le Maroc est le premier partenaire
commercial de la France en Afrique et que la France est le deuxième partenaire
commercial du Maroc. Il s’agit d’une relation commerciale « équilibrée », selon le
ministre marocain de l’Industrie et du Commerce.
Franck Riester a aussi eu une séance de travail avec Mohcine Jazouli, ministre
délégué chargé de l’Investissement de la Convergence et de l’évaluation des
Politiques publiques. Les Marocains voient, dans cette visite, l’occasion de
renforcer la dynamique d’investissement et les échanges commerciaux entre les
deux pays et ainsi ouvrir la voie à des opportunités mutuellement bénéfiques. Les
deux responsables partagent « la volonté de renforcer le lien économique », indique
Franck Riester sur X, avant d’appeler à maintenir cette relation privilégiée. La
prochaine étape consistera donc à répondre aux défis communs, tels que la
transition économique, la décarbonation, la mobilité et la transition numérique.
Tout cela se fera sur la base d’un agenda commun ambitieux. Ce pas n’est que le
début d’une série de visites prévues de responsables français au Maroc. En effet,
cinq ministres français devraient lui emboîter le pas dans les prochaines semaines.

La CFCIM, cette force de frappe économique au Maroc

C’est dans ce sillage que s’inscrit la signature du renouvellement de la concession
de service public de Business France en faveur de la Chambre française de
commerce et d’industrie du Maroc. Ainsi, pour accélérer la dynamique
économique, la Team France Export sera reconduite pour deux ans (2024-2026) et
ce en vue de renforcer les investissements entre Paris et Rabat. Cette étape
témoigne de la confiance placée dans la CFCIM, qui aura pour mission de
« développer les flux d’affaires entre le Maroc et la France », indique un
communiqué de presse de l’organisme, en soulignant qu’une attention particulière
sera accordée aux PME, « véritable richesse de la relation bilatérale ».
Puisque le renouveau des relations franco-marocaines passe par de « nouvelles
passerelles » entre les secteurs privés français et marocains, Franck Riester a lancé
dans la foulée Afrique France Entrepreneurs, la communauté de Bpifrance et
Business France.
Investissements au Sahara : des preuves d’amour « suffisantes »
pour Rabat ?

Consciente du fait que la question du Sahara est « un enjeu existentiel pour le
Maroc », la diplomatie française avance enfin dans le sens souhaité par Rabat. La
France, premier pays à soutenir le plan marocain de 2007, devrait participer
financièrement aux projets au Sahara. En effet, le média marocain Le Desk s’est
fait écho d’un financement public de projets privés dans les provinces méridionales
par des acteurs tels que Proparco ou encore Bpifrance. Une information confirmée
par le ministre Franck Riester qui a annoncé que Proparco, filiale de l’Agence
française de développement, pourrait contribuer au financement de la ligne à haute
tension entre Dakhla et Casablanca.
Cependant, aucune évolution de la position officielle de la France sur le dossier du
Sahara n’a été annoncée. « La série d’événements a de quoi réjouir les investisseurs
de Dakhla à Calais, qui pourraient y voir la promesse d’une relation marocofrançaise renouvelée », affirme Yassine Majdi, nouveau directeur de publication de
TelQuel, dans un édito publié ce vendredi 5 avril. Et de poursuivre : « Mais ce
serait ignorer la plaie profonde causée par le refroidissement des relations entre
Paris et Rabat ces dernières années ». Au vu de ces éléments, la France a-t-elle
décidé enfin de sortir de l’ambiguïté avec son premier partenaire commercial en
Afrique et de miser ainsi sur cette nouvelle puissance régionale qu’est devenu le
royaume chérifien ? Affaire à suivre…
Source: Point.fr

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