Jusqu’à quel point les tests rapides sont-ils efficaces?
Les autotests rapides ont prouvé leur efficacité lorsqu’il s’agit de déterminer si la charge virale d’une personne est très élevée, qu’elle ait ou non des symptômes.
Une boîte de tests rapides.
Les citoyens qui ont pu ont reçu une boîte de tests rapides semblable à celle-ci.
PHOTO : RADIO-CANADA / SIMON TURCOTTE
Les Québécois qui ont réussi à obtenir des autotests rapides en pharmacie ont reçu la consigne de les utiliser seulement s’ils ont des symptômes.
Les gens utilisant les tests doivent être symptomatiques pour que ça soit utile, a répété le ministre de la Santé Christian Dubé, lors d’un point de presse pour annoncer un resserrement des mesures sanitaires.
Les pharmaciens qui ont distribué les tests rapides lundi ont indiqué à l’appui que le taux d’efficacité des autotests rapides est parfois de moins de 50 % chez les personnes asymptomatiques et qu’ils peuvent produire des faux négatifs.
Cette affirmation est en partie vraie, mais elle n’est pas suffisamment nuancée, croit David Juncker, professeur et directeur du Département de génie biomédical à l’Université McGill et titulaire de la Chaire de recherche du Canada en bio-ingénierie.
Il existe bien sûr des risques de faux négatifs avec les autotests rapides [si on fait le test et qu’on n’a pas de symptômes], mais ces faux négatifs sont généralement chez les personnes qui ont une faible charge virale et qui ont donc un faible risque de transmission, explique-t-il.
Par contre, ajoute-t-il, le risque de faux négatifs pour une charge virale élevée est extrêmement faible.
Or, les autotests rapides sont très efficaces pour déterminer si une personne – asymptomatique ou non – a une charge virale élevée et, donc, si elle est contagieuse au moment où elle effectue le test.
Selon M. Juncker, les tests rapides administrés en clinique de dépistage produisent environ 3 faux négatifs sur 1000 tests. Bien sûr, lorsque les gens passent un test rapide à la maison, les risques d’erreur de prélèvement sont plus élevés, ce qui peut augmenter les risques de faux négatifs. Mais c’est de l’ordre de quelques points de pourcentage, souligne-t-il. Au fur à mesure que les gens les utilisent, ils s’améliorent.
Les autotests faits à la maison peuvent détecter des personnes infectées qui n’auraient jamais pensé l’être parce qu’elles sont asymptomatiques, ajoute pour sa part Roxane Borgès Da Silva, professeure à l’École de santé publique de l’Université de Montréal.
Ceux qui n’ont pas de symptômes peuvent continuer de transmettre le virus, explique-t-elle. Et la période de contagiosité est souvent dans les 48 heures avant le développement des symptômes. D’ailleurs, un article dans Nature(Nouvelle fenêtre) indique que 74 % des infections causées par le variant Delta ont eu lieu pendant la phase présymptomatique.
Les autotests rapides sont efficaces, même en l’absence de symptômes.
Un article publié dans The Lancet(Nouvelle fenêtre) concorde avec ce que disent ces deux experts : les autotests rapides sont efficaces, même en l’absence de symptômes.
Une grande partie de la transmission est attribuée à des personnes qui ne présentent pas de symptômes, il est donc essentiel d’utiliser des stratégies comme les tests rapides fréquents pour combler les lacunes où les tests moléculaires ne sont pas pratiques à déployer, écrivent les auteurs de cet article.
Focaliser sur le nombre de cas manqués par les tests rapides par rapport aux tests moléculaires [tests PCR] n’est pas productif ou utile. Les autotests rapides peuvent être plus facilement utilisés et fonctionnent mieux lorsque les personnes sont les plus contagieuses, un point-clé qui est négligé lorsqu’on les compare avec les tests moléculaires, peut-on lire dans The Lancet.
Les autotests ne sont pas parfaits, mais si on détecte 50 % plus de personnes contagieuses, n’est-ce pas une bonne chose? demande M. Juncker.
C’est très décevant [ce que dit le gouvernement au sujet des autotests], et cela me semble contre-productif dans ces situations. De nombreux experts conseillent de les utiliser juste avant un rassemblement, pour tester si quelqu’un est contagieux, dit M. Juncker.
Ce professeur de génie biomédical continue de croire que le gouvernement doit recommander aux gens de se faire tester avant les réunions de famille, même s’ils n’ont pas de symptômes, car c’est là où il y a des risques élevés de transmission asymptomatique.
Je comprends qu’on manque de tests rapides et qu’il ne faut pas les utiliser à qui mieux mieux, poursuit Mme Borgès Da Silva, mais elle aussi croit que les autotests devraient être utilisés par les Québécois, surtout si les rassemblements de 10 personnes sont toujours autorisés.
David Juncker précise par ailleurs que ces autotests rapides doivent être pris peu de temps avant de se rassembler et que le résultat n’est bon seulement que pour quelques heures. Un test fait la veille de Noël peut être négatif, puis devenir positif le lendemain, au fur et à mesure que la charge virale d’une personne augmente.
Il ajoute qu’une personne qui présente des symptômes s’apparentant à la COVID-19 et qui reçoit un résultat négatif lors d’un autotest devrait tout de même éviter de participer à un rassemblement. Il suggère que cette personne refasse le test 24 heures plus tard pour s’assurer que le test n’a pas été pris trop tôt et que le résultat est bel et bien négatif.
Enfin, il rappelle que le fait d’avoir un résultat négatif ne veut pas dire qu’il faut oublier toutes les autres mesures sanitaires.
Source: radio-canada