Installer les relations hispanomarocaines dans le long terme

Installer les relations hispanomarocaines dans le long terme

L’ ex-ministre espagnole des Affaires étrangères revient à de meilleurs sentiments

 « Réserve et réalisme », c’est ainsi qu’on peut qualifier la sortie médiatique  d’Arancha González Laya qui a occupé le poste de ministre espagnole des Affaires étrangères entre janvier 2020 et juillet 2021. Dans un entretien avec le journal La Vanguardia, elle a longuement insisté sur l’importance du bon voisinage avec les pays du Sud de la Méditerranée et la nécessité d’établir des relations équilibrées. Elle a, cependant, évité de revenir sur la crise politique entre l’Espagne et le Maroc et sur la manière avec laquelle Madrid l’a gérée.

Realpolitik

Une année après la crise entre  Rabat et Madrid, l’ancienne ministre des Affaires étrangères juge bon de rappeler la nécessité pour l’Espagne et l’Union européenne – et elle a bien souligné l’UE – de maintenir de bonnes relations avec le Maroc, mais aussi avec l’Algérie, la Libye et la Mauritanie. De bonnes relations qui doivent être conçues dans une approche stratégique sur le long terme et non selon des critères de court terme, précise-t-elle.

Pour elle, l’Espagne a besoin d’une relation stable à long terme, tant avec le Maroc qu’avec l’Algérie. Et cette relation équilibrée, ajoute-t-elle, nécessite une plus grande implication de l’Union européenne, puisqu’il s’agit de la frontière sud de l’Europe. Ces relations doivent s’étendre à deux pays importants comme la Libye et la Mauritanie. Elle estime que les intérêts de l’Europe dans la région dépassent la seule question énergétique et celle du contrôle des flux migratoires. Ils englobent également des questions importantes, à l’image de la sécurité nationale.

Les relations de bon voisinage développées dernièrement entre le Maroc et l’Espagne n’ont-elles pas été instaurées au détriment de celles avec l’Algérie charmée par l’Italie et notamment en cette période de crise énergétique ? Arancha González Laya soutient que l’Espagne doit rechercher de bonnes relations avec l’ensemble de ses voisins du sud. Et l’Italie doit faire de même sans chercher à verser dans la répartition de leurs relations respectives. Autrement dit, l’Espagne ne doit pas consolider ses relations uniquement avec le Maroc et négliger  l’Algérie. Pour elle, il devrait y avoir une stratégie partagée dans le cadre de l’Union européenne puisqu’il y a un enjeu de taille, en l’occurrence la sécurité nationale de l’Espagne et de l’Italie face aux menaces en provenance du Sahel.

Le bon voisinage doit régner entre Madrid et tous les pays d’une région qui interpelle également l’UE

L’interviewer avance que le Maroc, l’Algérie, la Libye et la Mauritanie font aussi partie de la bande sahélienne considérée comme une zone instable et en agitation. En effet, explique-t-elle, cette région est marquée par une défaillance des institutions gouvernementales et un taux élevé d’affrontements ethniques, de groupes terroristes et de trafiquants de toutes sortes. Pis, estime-t-elle, la Russie a déjà mis les pieds dans cette zone, via les mercenaires de la société Wagner. Dans ce sens, l’ancienne ministre a déclaré que les pays européens ne peuvent pas quitter le Sahel tout en insistant sur une politique active de l’Espagne envers l’Afrique toute entière et non seulement un ou deux pays.

Droit de réserve

Concernant la dernière crise politique et diplomatique avec le Maroc, l’ancienne ministre a  évité scrupuleusement de juger publiquement les actes du gouvernement auquel elle appartenait il y a maintenant un an. Elle a, en outre, précisé que l’entrée discrète du chef du Front Polisario en Espagne a été due à une décision prise par Madrid à un moment donné, obéissant à certaines logiques qui ont été expliquées. Pas le temps de dire plus. Pour elle, l’histoire ne se répète pas et il n’ya rien de plus à ajouter à ce sujet.

Par contre, et sous l’insistance du journaliste de La Vanguardia, elle a réaffirmé que la décision espagnole a été motivée par des raisons d’ordre humanitaire, exécutée dans la discrétion avant de prendre ses réserves et de souligner que la divulgation des secrets relatifs aux relations internationales sur l’espace public est aujourd’hui une démarche périlleuse. Elle a  indiqué que l’Espagne, par ce geste, a cherché la discrétion plutôt que l’opacité.

S’agissant de l’avenir de la population sahraouie après le pas franchi par l’Espagne, l’interviewer a relevé qu’il n’y a aujourd’hui qu’une seule issue au dossier du Sahara, à savoir la négociation entre les parties concernées sous l’égide des Nations unies  qui ont nommé Staffan de Mistura comme nouvel envoyé du Secrétaire général pour le Sahara.

Evoquant l’enquête en cours à  Saragosse concernant l’entrée de Brahim Gali en Espagne et la question de savoir si l’ancienne ministre a été abandonnée par son gouvernement, Arancha González Laya a répondu que ce qu’elle ressent est très fort, notamment lorsqu’il s’agit de donner des explications à ceux qui sont censés donner ces informations. « Des explications que je continuerai à donner autant de fois que nécessaire », a-t-elle conclu.

Hassan Bentaleb

libe.ma

Articles similaires

Bouton retour en haut de la page