Dak’art 2022, de belles œuvres sur des cimaises désorganisées
Dak’art 2022, de belles œuvres sur des cimaises désorganisées
Les rideaux sont tombés sur la 14ème édition de la Biennale de l’art contemporain africain Dak’art le 21 juin 2022. Entant que premier grand rendez – vous culturel continental après l’accalmie observée sur le front de la grande pandémie du covid 19, il a eu pour force d’avoir réuni des milliers de personnes, artistes, professionnels et fans autour de l’art. L’événement a été une « belle échappée » après des années de confinement et d’étouffement. C’est peut être l’une des raisons qui a fait affluer le public qui tenait à souffler un tout petit peu.
Comme bilan, plusieurs aspects se dégagent de cette rencontre.
L’aspect organisationnel
Cette année par rapport aux autres éditions, l’organisation a été fortement décriée. Aucune logistique n’a été mise en place pour faciliter les visites des lieux des expositions. Pas de dossier de presse pour les journalistes culturels, presque pas de rencontre presse. Pire, L’absence cette année du traditionnel et fortement apprécié du quotidien de la Biennale a dérouté les critiques d’art qui ont perdu leur tribune d’analyses approfondies des œuvres pour éclairer le public. La cérémonie de remise des prix a été fortement banalisée. Les artistes primés ont regretté de n’avoir pas eu le temps de prendre la photo de souvenir pour immortaliser l’instant de gloire. Ils ont reçu leurs distinctions sans grand protocole ni cérémonial, le plus simplement du monde. On n’a pas senti la ferveur qui entourait jadis l’annonce du lauréat du premier prix L éopold Sédar Senghor. L’éthiopien Tegene Senbeto qui s’est adjugé le trophée n’a pas attiré beaucoup de regards. Aucun commentaire sur son œuvre n’a été fait pour éclairer la lanterne des participants. Au village du festival, on a croisé des visiteurs qui cherchaient en vain l’œuvre gagnante. D’aucuns, s’interrogeaient sur le pourquoi du choix celle-ci par rapport à d’autres qui tapent mieux sur leurs yeux ? Personne pour répondre à leur questionnement. Pire, des installations distinguées par des prix ont été vandalisées, certains éléments volés. En bref, l’organisation a té catastrophique à tous les niveaux.
L’aspect curatorial
Contrairement aux grandes insuffisances d’ordre organisationnel, les expositions de cette 14ème édition ont été de très haut niveau.
L’exposition Principale ( LA IN ) sus à l’ancien palais de justice traduit toute les expressions artistiques. Un panorama riche en couleurs de tous les canaux du langage contemporain des arts visuels invite le monde à « forger » entre autres :
– un nouvel avenir avec plus d’attention faite à l’endroit de la destruction de la nature par une civilisation du fer et du béton
– Un retour à la nature pour sauver l’humanité
– la consciente utilisation des denrées de première nécessité
– La résilience par la maîtrise technologique
– le métissage culturel comme facteur de dépassement des conflits….
Le off a étalé ses belles atours partout dans la ville. De très belles œuvres ont sauvé la face de cette biennale. Sans elles, l’événement serait vite classé dans les annales de l’oublie.
Le pavillon Sénégal au Musée de la civilisation noire, managé par le géant critique Massamba MBaye a affiché de très belles toiles et des installations magnifiques. Le travail d’Issa Sow, artiste sénégalais vivant aux USA a entre autres fait fortes impressions. C’est ici que le thème de la rencontre a été le mieux ressenti. A partir de la matière, les artistes ont « forgé » des univers, ont lié du bois au bois pour en faire des fagots. Des œuvres qui ont nécessité différentes techniques, des étapes, des transformations et de la synthèse comme à la forge.
La galerie nationale a donné carte blanche au magnifique pinceau de l’énorme Soly Cissé qui a, une fois encore étalé son immense talent. Une sublime exposition très haute en couleur. Soly qui est déjà mondialement connu, approche avec cet excellent travail, la cime où planent les grands maîtres universels de l’art contemporain.
Le monument de la renaissance africaine a sous la houlette de kalidou Kassé surnommé le pinceau du sahel, accueilli une exposition collective d’artistes sénégalais et internationaux. C’était aussi le lieu du marché de l’art de la biennale. Là aussi les œuvres étaient superbes comme partout ailleurs dans les nombreuses galeries et autres espaces d’exposition de Dakar. L’œuvre monumentale de Kemboury Bessane a été fortement appréciée.
L’attraction de cette 14ème édition a été sans nul doute « les restes suprêmes » de Dorcy Rugamba. Une magnifique représentation théâtrale qui retrace le cheminement des œuvres d’art pillées en Afrique et pose la question de leur restitution. Un thème d’actualité au moment où les pays africains militent pour le retour du patrimoine culturel du continent injustement arraché pendant la période coloniale.
Yéro Amel Ndiaye
Thiaski