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Chronique – Deux rencontres avec Mohamed Ould Cheikh El Ghazouani

Chronique - Deux rencontres avec Mohamed Ould Cheikh El GhazouaniChronique – Deux rencontres avec Mohamed Ould Cheikh El Ghazouani
Il est des visages que l’on croise une fois et que l’on oublie. D’autres, au contraire, restent gravés par la simplicité d’un moment partagé. Mohamed Ould Cheikh El Ghazouani appartient à cette seconde catégorie.

Nous nous sommes rencontrés deux fois. La première, il y a trente ans. Une journée entière, rien que lui et moi, sans protocole ni spectateurs. J’en garde le souvenir d’un homme calme, posé, d’une discrétion qui, déjà, semblait naturelle. Peu de paroles, mais un regard attentif, une écoute presque silencieuse qui laissait l’impression d’une force tranquille. C’était un temps où rien ne laissait présager qu’il deviendrait un jour président de la République. Et pourtant, rétrospectivement, cette réserve, cette patience contenaient peut-être déjà les germes d’un destin singulier.

La seconde rencontre eut lieu bien plus tard, en décembre 2022, à Boulenouar. Le contexte était tout autre : il était chef d’État, et moi, journaliste chargé de couvrir sa visite officielle. Cette fois, il n’y eut ni longue conversation, ni intimité partagée. Juste un regard furtif, dans un décor marqué par le protocole. Entre nous, le temps avait dressé une distance. Mais derrière cette façade institutionnelle, je crus retrouver, l’espace d’un instant, l’homme que j’avais connu : discret, mesuré, attentif à ne jamais forcer le trait.

De ces deux rencontres, séparées par trois décennies, se dessine un portrait en clair-obscur. Un homme qui, de sa jeunesse militaire à sa présidence, n’a jamais changé de nature. Fidèle à ce tempérament où le silence vaut souvent davantage que les discours, il avance sans bruit, gouverne sans éclats, écoute plus qu’il ne parle.

Ses partisans voient en lui un président rassembleur, patient, soucieux de préserver l’équilibre dans un pays aux fractures profondes. Ses détracteurs lui reprochent une lenteur coupable, une prudence excessive, un refus de bousculer l’ordre établi. Mais au-delà des analyses, je garde de lui cette impression persistante : celle d’un homme qui n’a jamais cessé d’être lui-même, de l’officier de jadis au chef d’État d’aujourd’hui.

Et peut-être est-ce là son secret : ne pas se transformer sous le poids du pouvoir, mais rester fidèle à cette discrétion, à cette constance, qui font de Mohamed Ould Cheikh El Ghazouani un président atypique dans une région où les tempêtes politiques sont la norme.

Ahmed Ould Bettar

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