À propos de l’interview du chef de l’État par le Figaro, un grand quotidien français
À propos de l’interview du chef de l’État par le Figaro, un grand quotidien français
Je vais sûrement en étonner plus d’un sur l’avis que j’exprime sans détour au sujet de l’interview du président Mohamed Cheikh Ghazouani dont j’ai largement pris connaissance aujourd’hui. Je n’hésiterai pas un instant à affirmer que je partage et soutiens l’intégralité de ses réponses aux questions du journaliste Yves Thréard. Je ne soulève aucune réserve. Aucontraire, les réponses fournies font montre d’une réelle connaissance des questions géopolitiques de la sous-région.
Les réponses du chef de l’Etat m’apparaissent en parfaite adéquation avec ma position d’observateur des questions géostratégiques, en particulier dans la sous-région. De plus, sa condamnation des coups d’État survenus au Niger comme auparavant au Mali et au Burkina sont en conformité avec notre constitution qui criminalise désormais les coups d’État. Le président, Ghazouani consolide à merveille l’exception mauritanienne dans ce Sahel si précaire avec un regain de tension ces dernières semaines qui risquent de faire regretter aux panafricanistes sahéliens le départ de la force Barkhane et la Minusma. Le chef de l’État le mentionne d’ailleurs en des termes relativement explicites.
Personne n’est dupe sur l’incapacité des juntes à pouvoir sécuriser de vastes territoires où des terroristes s’en donnent déjà à cœur joie pour occuper pendant plusieurs journées de grandes villes comme Tombouctou ou Gao sans réaction du pouvoir central de Bamako. Ce qui prouve l’extrême porosité des frontières des trois pays sahéliens. Le président Ghazouani a formellement raison de s’inquiéter de la précarité de la situation sécuritaire actuelle du Sahel. Je suis en outre séduit par son jeu d’équilibre parfait pour gérer la neutralité mauritanienne dite positive dans le désastreux et interminable conflit du Sahara Occidental.
Sa formule bien à propos selon laquelle « les Africains attendent trop de la France » décrit bien la crise vécue entre la France et les trois pays du Sahel dirigés par des militaires assoiffés de pouvoir en ayant relégué aux calendes grecques tout retour à l’ordre constitutionnel. Les États sahéliens ont une curieuse approche « sentimentaliste » des relations internationales. Or, ces dernières se caractérisent plutôt par une realpolitik et des rapports gagnant/gagnant. On fait tout reposer sur la France en oubliant que les conventions internationales tout comme les contrats d’ordre privé se fondent naturellement sur le principe de réciprocité. Autrement dit, les Etats sahéliens doivent aussi balayer devant leur porte avant de critiquer leur ex partenaire.
Enfin, il faut avoir la galante attitude de reconnaître le « sans-faute » de notre chef d’État sur le plan diplomatique au cours de ces 50 mois d’exercice présidentiel sans l’ombre d’un couac avec aucun de nos États voisins. Une performance honorable qui mérite un satisfecit général.
Bechir Fall
Source: Facebook