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« Tueuse silencieuse à évolution lente », la sécheresse décryptée

« Tueuse silencieuse à évolution lente », la sécheresse décryptée.
Les sécheresses à travers le monde s’intensifient et sont devenues un « tueur silencieux à évolution lente » auquel aucun pays n’échappe, selon le plus haut responsable des Nations Unies travaillant sur les questions de désertification, de sécheresse et de restauration des terres.

Ibrahim Thiaw, Secrétaire exécutif de la Convention des Nations Unies sur la lutte contre la désertification (CNULCD), s’exprimait à l’occasion de l’ouverture de la COP16, une conférence mondiale qui se tient à Riyad, en Arabie saoudite, qui devrait aboutir à l’adoption d’un nouveau régime mondial de lutte contre la sécheresse, favorisant le passage d’une réponse réactive à une préparation proactive.

Voici ce qu’il faut savoir sur les sécheresses.
La régularité et l’intensité des sécheresses augmentent
Les sécheresses sont un phénomène naturel, mais elles ont été intensifiées au cours des dernières décennies par le changement climatique et les pratiques agricoles non durables.

Leur fréquence et leur intensité ont augmenté de près de 30 % depuis 2000, menaçant l’agriculture, la sécurité de l’eau et les moyens de subsistance de 1,8 milliard de personnes, les nations les plus pauvres étant les plus touchées.

Elles peuvent également entraîner des conflits pour des ressources qui s’amenuisent, notamment l’eau, et le déplacement massif de populations qui migrent vers des terres plus productives.

Aucun pays n’est à l’abri
Plus de 30 pays ont déclaré des situations d’urgence liées à la sécheresse au cours des trois dernières années, de l’Inde et de la Chine aux pays à revenu élevé tels que les États-Unis, le Canada et l’Espagne, en passant par l’Uruguay, l’Afrique australe et même l’Indonésie.

Les sécheresses ont entravé le transport des céréales sur le Rhin en Europe, perturbé le commerce international via le canal de Panama en Amérique centrale et entraîné des coupures d’électricité au Brésil, pays qui dépend de l’eau pour plus de 60 % de son approvisionnement en électricité.

Les pompiers ont même été appelés dans un parc urbain de la ville de New York, aux États-Unis, en novembre 2024, pour lutter contre un feu de broussailles après des semaines d’absence de précipitations.

« Les sécheresses s’étendent désormais à de nouveaux territoires. Aucun pays n’est à l’abri », a déclaré Ibrahim Thiaw, du CNULCD, ajoutant que « d’ici 2050, trois personnes sur quatre dans le monde, soit jusqu’à sept milliards et demi de personnes, ressentiront l’impact de la sécheresse ».
Des effets domino
Les sécheresses sont rarement confinées à un lieu et à un moment précis et ne sont pas simplement dues à un manque de précipitations. Elles sont souvent le résultat d’un ensemble complexe d’événements entraînés ou amplifiés par le changement climatique, ainsi que, parfois, par une mauvaise gestion des terres.

Par exemple, un flanc de colline déboisé se dégrade immédiatement. La terre perd sa résistance aux conditions météorologiques extrêmes et devient plus sensible à la sécheresse et aux inondations.

Une fois qu’elles ont frappé, les sécheresses peuvent déclencher une série d’effets dominos cataclysmiques, en amplifiant les vagues de chaleur et même les inondations, multipliant les risques pour la vie et les moyens de subsistance des populations, avec des coûts humains, sociaux et économiques à long terme.

Lorsque les communautés, les économies et les écosystèmes subissent les effets néfastes de la sécheresse, leur vulnérabilité s’accroit face à la sécheresse suivante, alimentant ainsi un cercle vicieux de dégradation des terres et de sous-développement.

La sécheresse est un problème de développement et de sécurité
Environ 70 % de l’eau douce disponible dans le monde se trouve entre les mains de personnes vivant de la terre, la plupart d’entre elles étant des agriculteurs de subsistance dans des pays à faible revenu disposant de moyens de subsistance limités. Environ 2,5 milliards d’entre eux sont des jeunes.

Sans eau, il n’y a pas de nourriture ni d’emplois liés à la terre, ce qui peut entraîner des migrations forcées, de l’instabilité et des conflits.

« La sécheresse n’est pas seulement une question d’environnement », a déclaré Andrea Meza, la Secrétaire exécutive adjointe de la Convention des Nations Unies sur la lutte contre la désertification.

« La sécheresse est une question de développement et de sécurité humaine à laquelle nous devons nous attaquer d’urgence dans tous les secteurs et à tous les niveaux de gouvernance ».
Planifier pour une plus grande résilience
Les sécheresses deviennent également plus sévères et plus rapides en raison du changement climatique induit par l’homme et de la mauvaise gestion des terres. De plus, la réponse mondiale à ce problème reste généralement réactive.

Il faut davantage de planification et d’adaptation pour renforcer la résilience aux conditions extrêmes créées par la diminution des réserves d’eau, et cela se fait souvent au niveau local.

Au Zimbabwe, une organisation locale dirigée par des jeunes vise à régénérer les terres en plantant un milliard d’arbres dans tout le pays d’Afrique australe, tandis que de plus en plus d’agriculteurs de l’île d’Haïti, dans les Caraïbes, se lancent dans l’apiculture afin de s’assurer que les arbres dont dépendent les abeilles ne soient pas abattus en premier lieu.

Au Mali, une jeune femme entrepreneure crée des moyens de subsistance et renforce la résistance à la sécheresse en promouvant les produits de l’arbre moringa.

Les experts affirment que des initiatives proactives comme celles-ci peuvent prévenir d’immenses souffrances humaines et sont bien moins coûteuses que des interventions axées sur la réaction et la récupération.
Quelles sont les prochaines étapes ?
Lors de la COP16, les pays se réunissent pour convenir de la manière de lutter collectivement contre l’aggravation des sécheresses et de promouvoir une gestion durable des terres.

Deux travaux de recherche importants ont été lancés le jour de l’ouverture.

L’Atlas mondial de la sécheresse décrit la nature systémique des risques de sécheresses en illustrant leur interconnexion entre des secteurs tels que l’énergie, l’agriculture, le transport fluvial et le commerce international, et la manière dont ils peuvent déclencher des effets en cascade, alimentant les inégalités et les conflits et menaçant la santé publique.

L’Observatoire de la résilience à la sécheresse est une plateforme de données pilotée par l’intelligence artificielle (IA) pour la résilience à la sécheresse créée par l’Alliance internationale pour la résilience à la sécheresse (IDRA), une coalition hébergée par le CNULCD de plus de 70 pays et organisations engagés dans l’action contre la sécheresse.

Combien est-ce que cela va coûter ?
Selon une estimation des Nations Unies, des investissements d’un montant total de 2.600 milliards de dollars seront nécessaires d’ici à 2030 pour restaurer les terres du monde entier affectées par la sécheresse et une mauvaise gestion.

Une promesse initiale de 2,15 milliards de dollars a été annoncée lors de la COP16, pour financer le Partenariat mondial de Riyad pour la résilience à la sécheresse.

« Il servira de facilitateur mondial pour la résilience à la sécheresse, en encourageant le passage d’une réponse réactive aux secours à une préparation proactive », a déclaré le Dr Osama Faqeeha, Vice-ministre de l’Environnement de l’Arabie saoudite, ajoutant que « nous cherchons également à amplifier les ressources mondiales pour sauver des vies et des moyens de subsistance dans le monde entier ».

ONU Info

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