POINT DE MIRE. « Quand Ould Ghazouani « parle chinois » en Conseil des Ministres »

POINT DE MIRE. « Quand Ould Ghazouani « parle chinois » en Conseil des Ministres »
Le président de la République, Mohamed Ould Cheikh El-Ghazouani avait le 30 octobre accordé
un entretien à cinq médias nationaux Alakhbar, Cridem, Essahra, le Rénovateur et Sahara
Médias. On peut dire pour être honnête, que la Direction de la Communication de la Présidence
de la République avait en quelque sorte fait accorder un entretien avec Ould Ghazouani à toute
la presse mauritanienne. Parce que, ces cinq organes représentent évidemment ce qu’il y’a de
plus crédible et professionnel sur le champ médiatique national, même si le Calame a répondu
absent.
Et, d’après notre confrère de CRIDEM, c’est, à cœur ouvert que le Président de la République
avait répondu à toutes les questions posées, questions qui ont fait le tour des préoccupations de
la vie nationale.
Pour planter le décor, (comme dit mon confrère Juan Gomez de RFI), je vous propose de lire les
propos du président, en réponse à une question de nos confrères de CRIDEM. Ces propos
donnent une idée très claire des conditions dans lesquelles Ould Ghazouani est arrivé au
pouvoir et ce qu’il considère comme réponse donnée à la situation héritée en 2019.
QUESTION : (CRIDEM) : Monsieur le Président, vous abordez la dernière année de votre mandat.
Dans quelle situation économique et financière aviez-vous trouvé le pays lorsque vous arrivez au
pouvoir en 2019 ?
REPONSE : (Mohamed Ould Cheikh El Ghazouani) : J’ai trouvé le pays dans une situation difficile
et les énormes effets négatifs de la crise COVID survenus sept mois après notre accession au
pouvoir, conjugués aux dramatiques conséquences de la guerre en Ukraine, ont rendu la situation
encore plus difficile. A la fin de 2020, le taux de croissance était de -0,9%.
Devant cette situation, nous nous sommes engagés dans une démarche visant, dans le court et le
moyen terme, à :
– Remettre l’économie sur le sentier de la croissance,
– Préserver les équilibres budgétaires et monétaires,
– Réduire le niveau d’endettement,
– Renforcer la confiance des partenaires et des investisseurs en notre pays.
Grace à la persistance dans l’effort et à la qualité de la conception et de la mise en œuvre de
notre politique économique nous avons pu :
– Renouer avec la croissance (6,4% en 2022). – Préserver les équilibres budgétaires et extérieurs.
– Réduire le taux de notre endettement extérieur de 27 points, le ramenant de 70% en 2019 à
43% en 2022, grâce aux importants efforts que nous avons entrepris dans ce sens, dès notre
accession au pouvoir.
– Renforcer la confiance des partenaires et des investisseurs (les investissements directs étrangers
(IDE) ont triplé sur les trois dernières années passant de 500 millions USD en 2019 à 1,5 milliard
USD en 2022).
Des chiffres et des lettres qui n’apportent rien au panier de la veuve Aissata.
Dans la réponse du président que nous venons de lire, tout est dit. Tout est dit pour mieux
comprendre les difficultés auxquelles Ghazouani, (général à la retraite), avait à faire face pour

résister à un « blocus » imposé à son régime naissant par des conditions extrêmement difficiles
accumulées par un concours de circonstances indépendant de s volonté.
Evidemment, que le président Ould Ghazouani a aidé certains d’entre nous à comprendre mieux
encore les difficultés auxquelles il s’était retrouvé confronté après le départ de son
prédécesseur, Ould Abdel Aziz, qui avait laissé en héritage un pays dont la santé économique
et financière nécessitait une entrée en « réanimation » d’urgence.
Même si Ould Ghazouani a été surpris par l’ampleur des dégâts commis par son prédécesseur
sur le plan économique et financer, ce que les citoyens de ce pays attendaient de Ould
Ghazouani, c’est de passer le pays du rouge au vert.
Comment et par quel moyen ? C’est le dernier souci de ceux qui ont voté à 52 % pour Ould
Ghazouani. Ces citoyens qui ne sont pas dans le secret des « démêlées » des responsables au
sommet de l’Etat, ne cherchent pas à savoir comment et par quel moyen Ould Ghazouani va
résoudre cette équation. Ce que les citoyens cherchent à savoir, c’est, est ce que Ould
Ghazouani va tenir ses promesses  jusqu’au bout?
Dans la réalité, ce que Ould Ghazouani a promis de faire pour respecter ses engagements passe
par des obligations incontournables, dont évidemment la remise de l’économie sur le chemin
de la croissance, la préservation des équilibres budgétaires et monétaires et la réduction du
niveau de l’endettement du pays.
Par rapport à la compréhension de la vendeuse de couscous de « Oueinatt Z’Bil », les
explications en termes macroéconomiques données par le président de la République, c’est
comme demander à un enfant du fondamental de Lixeiba II, de résoudre une équation en
rapport avec la fusion nucléaire.
Ce que donc attend, cette vendeuse de Oueinatt Z’Bil, comme d’ailleurs l’attend aussi la
vendeuse de légumes de Dougontouro ou de Bélinaabé, c’est que Ould Ghazouani explique et
clairement comment il va faire pour traiter le mal endémique dont souffre les populations les
plus vulnérables de ce pays ? La question, elle est là !
Ould Ghazouani. A la fois le meilleur et le plus mauvais ?
Ce qui est paradoxale, c’est que, malgré tous les soubresauts de sa gestion des quatre dernières
années, (gestion parfois sabotée par certains), et, malgré tous les détournements et les pillages
constatés depuis son arrivée au pouvoir, plus de 67 % des mauritaniens (toutes tendances
confondues, donc 15 % de plus que ceux qui ont voté pour lui en 2019), restent convaincus
que Ould Cheikh El Ghazouani est bien l’homme de la situation et celui qu’il faut pour diriger ce
pays.
L’homme qu’il faut pour, d’une part sortir le pays de cette situation sociale et humanitaire très
dégradée et, d’autre part, pour assurer à ce pays la paix et la sérénité dans une zone de fortes
turbulences caractérisées par un terrorisme qui embrase toute la région.
Mais par ailleurs, la question que se posent 33% des citoyens de ce pays, c’est, qu’est ce que
Ould Ghazouani qui, -selon eux-, n’a rien fait durant ses quatre premières années de pouvoir
pourra-t-il faire en six ans, si, six ans il y’aura.

Donc, pour essayer de comprendre pourquoi pour certains Ghazouani est incontestablement
bien le président qu’il faut pour la Mauritanie dans cette conjoncture à variantes économiques
et sécuritaires multiples, et, pourquoi, pour d’autres c’est le président « catastrophe » de ces
soixante dernières années il faut voyager dans le temps.
Tout ce qui se dit de Ould Ghazouani, il le sait. Il le sait parce qu’il reste après tout un
mauritanien et comme tous les autres qui a son portable. Un portable qui n’est certainement
pas mon Nokia de bas gamme, mais un téléphone qui lui permet sans doute de s’évader de
temps en temps sur les réseaux sociaux pour écouter ce qu’ont dit et de lui et de la gestion de
son régime.
Mais là n’est pas le problème. Parce que Ghazouani se connait lui très bien et ce qu’on peut dire
de lui, parfois très méchant, parfois faux et le plus souvent d’une insolence abjecte (quand ça
vient des Etats-Unis ou du Canada), ne le dévie pas et ne le déviera pas de sa trajectoire. Il s’est
engagé devant le peuple, et, il considère que c‘est un contrat moral auquel il ne peut pas se
dérober.
Ould Ghazouani, s’est porté candidat, il a été élu dans des conditions qui ne militaient pas toutes
en faveur de son accession au pouvoir. Cela, il le sait aussi. Mais élu sur la base d’un programme
électoral qu’il a intitulé « Mes engagements ». Ould Ghazouani a donc signé un pacte avec les
citoyens de ce pays. C’est un pacte qui, en même temps qu’il prévoyait la mise en place de
mécanismes à caractères sociaux humanitaires dont « TAAZOUR » est le premier garant, il s’était
également engagé pour se démarquer de son prédécesseur, à lutter contre le gaspillage, le
détournement des deniers publics et le pillage des ressources du pays.
Quand la Cour des Comptes, rend compte à ciel ouvert.
En octobre 2023, la Cour des Comptes avait publié un rapport de 250 pages sur les contrôles
effectués pour les années 2019, 2020 et 2021. Ce rapport fait état de graves « failles et de
dysfonctionnements en relation avec la gestion des deniers publics »
.
Le ministère des affaires sociales, de l’enfance et de la famille, le ministère de l’environnement
et du développement durable, le fonds spécial pour la solidarité sociale et la lutte contre la
pandémie du corona virus, le bureau des douanes en charge des conteneurs du port autonome
de Nouakchott, l’agence nationale du registre de la population et des titres sécurisés, le
commissariat à la sécurité alimentaire, la société nationale d’électricité (SOMELEC) la société
nationale pour l’aménagement agricole et des travaux (SNAT) et la société nationale des forages
et des puits du projet Dhar ont été cités dans ce rapport.
Même si par exemple, on attribue l’existence de toutes les nombreuses violations des lois et
règlements régissant la disposition des deniers publics de 2019 au régime de Ould Abdel Aziz, un
régime qui baignait dans le sabotage économique et la dilapidation des biens publics, on peut se
demander pourquoi ce phénomène a persisté en 2020 et 2021. A cette époque, en 2020 et
2021, Ould Abdel Aziz n’était plus président mais un homme en conflit avec la loi.
Est-ce qu’on peut aller jusqu’à dire que le mal n’était donc pas Ould Abdel Aziz, mais ceux qu’il a
laissé derrière lui ? Oui évidement qu’on peut le dire

Ce qu’il faut comprendre, c’est que dans ce pays, il y’a des responsables (certains secrétaires
généraux, des directeurs de départements, des chefs de projets, des directeurs d’établissements
publics ou établissements assimilés) tous adaptables à tous régimes, increvables, inchangeables,
inconvertibles en bons gestionnaires honnêtes, parfois même indéplaçables de leurs fonctions,
qui n’en font qu’à leurs têtes. Ils n’ont peur de rien et ne mesurent pas les conséquences de
leurs agissements sur la crédibilité du pouvoir en place.
Ce sont des responsables qui se donnent souvent une apparence de « misérables », donc au-
dessus de tout soupçons, mais qui, dans la réalité baignent dans des centaines de millions
d’ouguiyas détournés à l’insu des Secrétaires Généraux, et des ministres. Des ministres qui,
malheureusement parfois, ne peuvent même pas penser à les sanctionner, parce simplement,
ces responsables sont protégés par un « En haut » ou des « En haut » proches des « En haut »
très haut placés.
Et, parce qu’aussi, la culture de l’impunité dans ce pays a toujours un terrain fertile pour
proliférer. Cette impunité est à l’image du typha cette plante invasive du fleuve Sénégal qui
prolifère maintenant à la Socogim PS, loin de son milieu naturel.

Ould Ghazouani, un président dont la bonne réputation est souillée par son entourage ?
Le rapport de la Cour des Comptes des années 2022 et 2023 ne sont pas encore tombés. Et ce
sont justement ces deux années qui ont révélé le plus de scandales d’un genre nouveau dans la
gestion des biens publics. Alors, pour terminer je vais emprunter l’expression « Ou de l’une ou de
l’autre » au Professeur Lô Gourmo, avocat émérite,
« Ou de l’une ou de l’autre ».
Ou de l’une, Ould Abdel Aziz, comme Ould Ghazouani sont incapables de « neutraliser » les
« voleurs » des couloirs des ministères nommés par des conseils des ministres sous différents
régimes, ou de l’autre, alors, les ministres actuellement au pouvoir traduisent en grec, (la
deuxième langue flexionnelle la difficile au monde) ce que Ould Ghazouani donne l’impression
de dire en chinois lors des conseils des ministres.
Si donc, Ould Ghazouani, pour respecter ses engagements se trouve, -comme l’a dit Samory
Ould Beye-, dans un camp et l’administration des départements ministériels de son régime dans
un autre, il faut peut-être faire appel à Ould Haidalla pour mettre fin au laisser aller dans la
gestion des biens publics.
Sous le régime de Ould Haidalla le mot détournement avait été rayé complètement du
vocabulaire des responsables.

Mohamed Chighali
Journaliste indépendant.

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