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Perspectives économiques de la Mauritanie à mi-année 2025 : entre défis et opportunités

À mi-année 2025, la Mauritanie fait face à des défis économiques tout en découvrant de nouvelles opportunités. Analyse des tendances et des perspectives pour les mois à venir.

Perspectives économiques de la Mauritanie à mi-année 2025
La Mauritanie, riche en ressources naturelles, se trouve à un tournant de son développement économique. À mi-année 2025, l’économie du pays présente un tableau contrasté, marqué par des défis structurels et de réelles opportunités d’investissement.

Une économie entre ralentissement et espoir de transformation

À mi-parcours de l’année 2025, la Mauritanie fait face à des dynamiques économiques contrastées. Si le pays peut se prévaloir de bases solides en matière de ressources naturelles, notamment dans les secteurs minier et énergétique, il n’en demeure pas moins confronté à des défis structurels persistants.

Croissance économique : un ralentissement maîtrisé

Après une performance notable en 2023, où la croissance économique avait atteint 6,5 % (3,4 % par habitant), l’année 2024 a été marquée par un ralentissement modéré avec une croissance estimée à 5,1 % (2,1 % par habitant). Ce tassement s’explique principalement par la baisse de la consommation publique et le fléchissement de la production d’or et de minerai de fer, malgré une résistance appréciable de la consommation privée et la vigueur des exportations.

Sur le front des prix, l’inflation a poursuivi sa tendance baissière pour s’établir à 1,5 % en glissement annuel à la fin 2024, contre 1,6 % l’année précédente. Cette amélioration est attribuée à la diminution des prix des denrées alimentaires et du pétrole, ainsi qu’à la politique monétaire rigoureuse appliquée par la Banque centrale.

Stabilité budgétaire et gestion de la dette

L’année 2024 a été marquée par un assainissement budgétaire salué par les institutions internationales. Le déficit budgétaire a été réduit à seulement 0,1 % du PIB, contre 2,4 % en 2023, grâce à l’augmentation des recettes issues notamment des taxes sur les télécommunications et des retenues à la source dans le secteur extractif, ainsi qu’à un meilleur contrôle des dépenses publiques. Dans le même temps, le ratio dette/PIB est descendu à 44,5 %, soutenu par la stabilité du taux de change, la réduction de la dette extérieure et une croissance robuste du PIB. La Mauritanie reste toutefois exposée à un risque modéré de surendettement, selon l’analyse conjointe de la Banque mondiale et du FMI.

La balance des transactions courantes s’est également resserrée, atteignant -7,6 % du PIB en 2024, sous l’effet combiné d’une hausse des exportations et d’une réduction des importations d’hydrocarbures, de biens d’équipement et de denrées alimentaires. Dans ce contexte, les réserves de change se sont légèrement renforcées, couvrant 6,4 mois d’importations.

Perspectives à moyen terme : le pari du gaz

Les prévisions pour la période 2025-2027 demeurent globalement optimistes, avec une croissance moyenne estimée à 5,1 %, portée par l’entrée en production du mégaprojet gazier Grande Tortue Ahmeyim (GTA). Ce développement pourrait toutefois être freiné par le déclin anticipé de la production d’or et de minerai de fer.

Cependant, la croissance économique à venir ne se traduira pas nécessairement par une amélioration immédiate des conditions de vie. Les performances agricoles modestes et la hausse de l’inflation devraient faire grimper le taux de pauvreté à 31,8 % d’ici 2027, touchant potentiellement 193 000 personnes supplémentaires.

Le déficit budgétaire moyen devrait s’établir à -1,1 % du PIB entre 2025 et 2027, en raison de l’augmentation prévue des dépenses d’investissement, même si les recettes issues du gaz devraient en compenser partiellement l’impact. La dette publique, quant à elle, devrait se stabiliser autour de 43,7 % du PIB à l’horizon 2027.

En matière de prix, l’inflation devrait repartir à la hausse pour atteindre 3,5 % en 2025 et converger vers 4 % les années suivantes. Le déficit courant moyen sur cette période est attendu à 7,8 % du PIB, malgré une amélioration des exportations de gaz et la baisse attendue des coûts d’importation. Les investissements directs étrangers (IDE) dans les industries extractives et les aides extérieures continueront de jouer un rôle clé dans le financement de l’économie.

Risques persistants sur la trajectoire économique

Malgré ces perspectives encourageantes, de nombreux risques subsistent. La détérioration sécuritaire au Sahel pourrait provoquer des mouvements de population et décourager les investisseurs étrangers. Par ailleurs, les effets du changement climatique menacent les infrastructures et la productivité agricole, accentuant la vulnérabilité sociale.

À cela s’ajoutent des incertitudes sur les plans géopolitique et économique mondiaux, notamment le ralentissement de la croissance en Europe et en Chine, deux partenaires commerciaux majeurs, qui pourraient affecter les exportations et l’aide internationale.

Cependant, une exploitation stable du gaz GTA, conjuguée à une gestion publique rigoureuse, une accélération des réformes et un environnement financier international plus souple, pourrait créer un cercle vertueux en favorisant la croissance inclusive.

Un contexte social préoccupant

Les défis économiques de la Mauritanie sont indissociables de ses enjeux sociaux. D’après l’indice de capital humain, un enfant mauritanien né aujourd’hui ne réalisera que 38 % de son potentiel de productivité à l’âge adulte. Le pays affiche en moyenne 4,2 années de scolarité ajustée pour l’apprentissage, tandis que 25 % des enfants souffrent de retard de croissance. Ces indicateurs traduisent une faiblesse persistante des dépenses publiques dans les secteurs clés que sont la santé et l’éducation.

En revanche, la Mauritanie consacre une part importante de son PIB (7,5 %) à l’assistance sociale, un niveau élevé dans la région. Les filets de sécurité existants atteignent 47 % du quintile le plus pauvre de la population, assurant ainsi une des meilleures couvertures sociales en Afrique de l’Ouest.

Conclusion : une phase de transition

L’économie mauritanienne entre dans une phase de transition où les choix politiques et les stratégies d’investissement joueront un rôle déterminant. Si les autorités parviennent à tirer pleinement parti de la manne gazière, à maintenir une stabilité macroéconomique et à investir dans le capital humain, le pays pourrait non seulement renforcer sa résilience face aux chocs externes, mais aussi amorcer un développement plus inclusif et durable.

Ahmed Ould Bettar, journaliste économiste

Membre du réseau des journalistes économistes maghrébin

Sources infos :

Fonds Monétaire International (FMI) – Rapport sur les perspectives économiques régionales – Afrique subsaharienne, avril 2025.

Banque mondiale – Mauritania Economic Update, mai 2025.

Rapide Info Mauritanie – Analyses et suivis économiques nationaux, 2024-2025.

Ministère des Affaires économiques et de la Promotion des Secteurs productifs – Mauritanie – Données macroéconomiques 2023-2024.

Banque centrale de Mauritanie (BCM) – Bulletin trimestriel – Statistiques monétaires et financières, décembre 2024.

Bibliographie complémentaire :

AfDB (Banque Africaine de Développement) – African Economic Outlook 2024 – Mauritania Chapter.

IMF Country Report No. 24/112 – Mauritania: 2024 Article IV Consultation.

FAO & PAM – Évaluation conjointe de la sécurité alimentaire en Mauritanie, mars 2025.

PNUD-MAURITANIE-RAPPORT-ANNUEL-2023

OCDE – Perspectives économiques en Afrique 2024 : Réduire la vulnérabilité aux chocs mondiaux.

Lien utile: Consultations du FMI en Mauritanie : des avancées saluées en matière de réformes économiques et financières

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