« Pantouflage », lobbying : quelles règles encadrent les occupations des anciens eurodéputés ?

« Pantouflage », lobbying : quelles règles encadrent les occupations des anciens eurodéputés ?
Depuis 2023, les eurodéputés ont interdiction d’exercer une activité de lobbying dans les six mois qui suivent la fin de leur mandat.

Après quelques semaines de vacances, les députés européens sont de retour à Bruxelles, où ils examinent leurs dossiers et participent à des réunions de rentrée.

D’autres, qui ont perdu leur siège lors des élections de juin, commencent peut-être un nouveau travail dans la bulle européenne.

Mais quelles sont les règles qui s’appliquent à eux ?

À la suite du « Qatargate », un scandale politique révélé en 2022 impliquant des députés européens et des lobbyistes qui auraient reçu des fonds des gouvernements du Qatar, du Maroc et de la Mauritanie pour promouvoir leurs intérêts, le Parlement européen a durci ses règles en matière de transparence et d’intégrité.
Il est désormais interdit aux anciens eurodéputés de mener des activités de lobbying au Parlement européen pendant les six mois qui suivent la fin de leur mandat. Pour ceux qui ont perdu leur siège en juin, cette période de réflexion est toujours en cours.

Pour Transparency International, une période de réflexion de six mois n’est pas assez longue et équivaut à de la poudre aux yeux.

« C’était juste pour ajouter quelque chose parce que nous savons tous que dans les six premiers mois d’un mandat, il ne se passe pratiquement rien. Les commissions doivent encore être créées. Il y a peu d’activité législative », déclare à Euronews Shari Hind, chargée de mission sur l’intégrité politique de l’UE à Transparency International.

Elle estime que ce délai devrait être équivalent à la période pendant laquelle les eurodéputés reçoivent leur indemnité transitoire,* payée par l’argent des contribuables.

« L’indemnité transitoire dure entre cinq et 24 mois, en fonction de la durée du mandat. Nous pensons donc que la période de réflexion devrait être équivalente à la durée de l’indemnité de transition », détaille Shari Hind.

Une fois cette période écoulée, les anciens députés européens doivent inscrire leurs activités de lobbying dans le registre de transparence de l’UE, comme tous les autres lobbyistes. Cette base de données obligatoire répertorie les organisations qui cherchent à influencer les processus législatifs et décisionnels des institutions européennes.

En outre, les anciens eurodéputés sont autorisés à accéder aux locaux du Parlement européen en leur qualité d’ancien député, mais ils ne sont pas autorisés à utiliser cet accès pour faire du lobbying auprès du Parlement.

Pantouflage

En 2017, plus de 50 % des anciens commissaires et 30 % des anciens eurodéputés ayant quitté la politique travaillaient pour des organisations inscrites au registre des lobbies de l’UE, selon un rapport publié par Transparency International.

Le rapport intitulé « Access all areas : when EU politicians become lobbyists » (Accès à tous les domaines : quand les politiciens de l’UE deviennent des lobbyistes) a montré que les entreprises employaient d’anciens fonctionnaires pour avoir accès à l’élaboration des politiques.

Cette pratique, connue sous le nom de pantouflage, consiste à embaucher dans le secteur privé des personnes ayant travaillé dans le secteur public.
Au-delà de leur expertise, ces anciens fonctionnaires intéressent le secteur privé en raison de leur carnet d’adresses. « Il s’agit des contacts qu’ils peuvent avoir et de l’effet de levier qu’ils peuvent avoir », explique Shari Hind.

En 2017, 50 % des lobbyistes enregistrés de Google avaient travaillé pour l’UE dans le passé.

Par ailleurs, le pantouflage est-il vraiment démocratique si, alors qu’ils sont encore en fonction, les eurodéputés entretiennent déjà des contacts officieux avec d’autres entités ?

« La question se pose de savoir s’ils travaillent pour représenter, par exemple dans le cas des eurodéputés, les citoyens qui les ont élus ou déjà leur nouvel employeur », précise Mme Hind. « Une fois dans leur nouvel emploi, ils utiliseront les contacts qu’ils ont noués dans le public », ajoute-t-elle.

Selon Mme Hind, il est difficile de quantifier et de réglementer cette pratique en raison de la zone grise qui entoure la définition du lobbying : « Parfois, il y a des activités qui ne seraient pas nécessairement définies comme du lobbying, mais qui influencent tout de même le processus décisionnel de l’UE ».

Elle appelle également à des sanctions plus dissuasives en cas de manquement.

Quelles sont les règles pour les autres fonctionnaires de l’UE ?

Pour la législature 2024-2029, le Parlement européen comptera 720 sièges, soit 15 eurodéputés de plus que lors de la législature précédente. 54 % des eurodéputés sont des nouveaux venus, soit une légère baisse par rapport aux 61 % de 2019. Cela signifie qu’environ 350 eurodéputés ont perdu leur siège en juin.

Le Portugal a la part de renouvellement d’eurodéputés la plus élevée (95 %), avec 20 nouveaux eurodéputés sur 21. L’Estonie a le taux de renouvellement le plus faible (14 %), avec un nouvel eurodéputé sur sept.

La période de réflexion varie pour les autres fonctionnaires.

Les anciens membres de la Commission européenne n’ont pas le droit de faire du lobbying auprès de la Commission pendant deux ans après la fin de leurs fonctions sur des questions liées à leur ancien portefeuille.

Pendant cette période, ils doivent informer l’institution s’ils envisagent de commencer une nouvelle activité professionnelle.

Le délai légal est de trois ans pour les anciens présidents de la Commission européenne, de 18 mois pour les anciens présidents du Conseil européen et d’un an pour les fonctions d’encadrement supérieur.

Les autres fonctionnaires doivent obtenir l’accord de leurs supérieurs avant de se reconvertir dans le lobbying.

Source: Euronews

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