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Nous sommes indépendants, mais piégés par le colonisateur.

Thème :  colonisateur
Un jour, un membre de notre gouvernement a demandé au Président de la République, qui venait de donner des orientations à ses ministres, de se traduire en français, car un cadre pulaar n’est pas censé comprendre l’arabe, qui n’est pas sa langue maternelle, même s’il s’agit de la langue de l’État.
D’accord, que se passerait-il si demain le pulaar, le soninké et le wolof devenaient des langues officielles, conformément à l’agenda des irrédentistes foutanqués et de leurs complices du mouvent harratine IRA et du MND ?
Toutes les communications lors des réunions du gouvernement devront être traduites dans toutes les langues de l’État, et aucune langue ne devrait plus être imposée en raison du caractère officiel de toutes les autres.
Sans aucun doute, cela provoquera un énorme chaos, sauf à exclure les langues du pays et à importer une langue-arbitre, en l’occurrence le français, qui est la langue officielle au Sénégal et dans tous les pays de l’Afrique de l’Ouest.
Ce serait une incohérence déconcertante.
Ne serait-il pas vrai que les cadres négro-mauritaniens refusent la langue arabe en raison de leur fierté ethnique ?
Oui, mais le français n’est pas la langue maternelle des Négro-Africains, et aucun hameau mauritanien n’est francophone.
Tant pis. La Mauritanie ne se compose pas uniquement d’Arabes. Il est donc fondamental que chaque ethnie bénéficie de garanties constitutionnelles pour préserver son identité ethnique.
Est-ce la même chose dans les autres pays ?
Non, mais dans notre cas, c’est une union forcée, plus précisément un machiavélisme colonial, du poison lent, évident à partir de deux cas, pour simplifier : le cas algérien et le nôtre.
En Algérie, le colonisateur avait délibérément semé les graines de la division parmi la population pour mieux la contrôler. Sa stratégie a réussi à susciter chez les Kabyles un sentiment de différence, accompagné d’un complexe de supériorité basé sur l’autochtonie, en plus d’une scolarisation à la française bien encadrée.
Après de nombreuses difficultés de cohabitation entre Arabes et Berbères, l’indépendance de la Kabylie est désormais une revendication largement soutenue par les ethnicistes kabyles.
En Mauritanie, la colonisation a réussi à réaliser son but stratégique en suscitant un sentiment de fausse infériorité, en particulier sur le plan linguistique, chez les Noirs, qui devaient, sans relâche, refuser la domination des Arabes, contre laquelle la langue française est tout indiquée comme rempart.
En raison de multiples tensions intercommunautaires, des membres de la diaspora poulo-toucouleur revendiquent aujourd’hui l’indépendance du sud.
Et en attendant, tous les nationalistes pulaars demandent une identité culturelle constitutionnelle, prélude au schisme national si tout se déroule selon leurs plans : un toit, deux identités étatiques, une arabo-mauritanienne et l’autre négro-africaine, avec prédominance poulo-toucouleur.
En ce qui concerne le colonisateur, qu’avait-il fait pour promouvoir les langues africaines lorsqu’il était le seul maître ?
Pourquoi n’avait-il pas créé son Institut berbère à l’époque coloniale ?
Pourquoi n’avait-il pas sublimé la diversité culturelle et ethnique pendant sa domination ?
En France, est-ce que le breton, le martiniquais, le corse et le basque sont des langues officielles ?
Qu’importe, l’Afrique ne se trouve pas en France. Et il est impossible pour les ministres qui ne sont pas des Français de souche de revendiquer une langue neutre. Même l’usage de l’anglais est proscrit dans les institutions. La loi Toubon relative à l’emploi de la langue française est claire sur ce point :
‘’ Langue de la République en vertu de la Constitution, la langue française est un élément fondamental de la personnalité et du patrimoine de la France. Elle est la langue de l’enseignement, du travail, des échanges et des services publics’’.
On dirait que nos indépendances ressemblent à des bombes à retardement dont la mise à feu est d’essence identitaire.
C’est bien grave, mais pas désespéré.
Les États sont tenus de prendre à bras-le-corps la cohésion de leurs nations en éliminant les fanatismes ethniques ultranationalistes qui avaient failli causer la destruction définitive du Rwanda.

Ely Ould Sneiba
Le 05 novembre 2025

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