Note de présentation de la loi d’orientation sur l’Education en Mauritanie

Note de présentation de la loi d’orientation sur l’Education en Mauritanie
En Mauritanie, une unanimité s’est dégagée depuis plusieurs années autour de la dégradation préoccupante de la qualité du système éducatif national et son incapacité à faire face aux défis majeurs interpellant la Nation.
Les différentes réformes mises en œuvre depuis l’indépendance, au lieu de résoudre les problèmes en ont souvent posés, avec parfois des conséquences touchant même l’unité nationale que le système éducatif devait consolider et préserver.
Face à cette crise profonde de l’éducation dans notre pays et à l’importance des enjeux qui l’interpellent, son excellence Monsieur Mohamed Ould Cheikh Ghazouani, Président de la République avait érigé dans son programme électoral « TAAHOUDATI » l’éducation nationale comme première priorité nationale et sa réforme un impératif majeur de son mandat. C’est dans ce cadre que les autorités publiques ont décidé d’organiser des concertations nationales sur la situation de notre Ecole et son devenir.
Le processus de concertation pour la préparation de la réforme a fait l’objet d’une feuille de route doptée par le Gouvernement en février 2020. Dans ce cadre, le MENRSE a organisé, du 21 au 24 octobre 2021, 15 ateliers régionaux de réflexion et de concertation sur les axes de la réforme du système éducatif en Mauritanie.
Ce processus de concertation a été couronné par la tenue des assises nationales qui se sont déroulées
du 16 au 20 novembre 2021 avec la participation de près de 500 personnes représentant les acteurs de terrain, les élites, les leaders d’opinion et autres forces vives du pays.
Tout au long des concertations, les débats ont été francs, libres et responsables, exprimant toutes les
opinions.
Ces concertations ont permis de dégager un consensus national autour du diagnostic du système
éducatif, de l’analyse de ses principaux dysfonctionnements, ainsi que la mise en exergue des
grands défis posés.
Elles ont également permis de proposer les jalons et les orientations nécessaires pour guider les
réformes envisagées afin de faire sortir notre système éducatif de la situation de crise et l’engager
sur la voie de la modernité et de la compétitivité, dans le contexte de la mondialisation de la société
du savoir.
Les résultats consensuels du processus de concertation ont fait l’objet d’un rapport de synthèse
générale intitulé « l’Ecole que nous voulons », portant sur les quatre axes suivants :
• L’Ecole mauritanienne d’aujourd’hui ;
• Quelle Ecole devons-nous à nos futures générations ?
• Comment asseoir l’Ecole que nous devons à nos futures générations ?
• Quels Impératifs de réussite pour la réforme envisagée ?
Ce rapport devrait servir de base à l’élaboration d’une loi d’orientation instituant les principales
mesures et orientations de la réforme envisagée et comblant l’absence d’un cadre juridique global
unifié pour organiser le système éducatif national.
Un projet de loi d’orientation a été préparé à cet effet. Il est formé d’un ensemble de dispositions législatives dont les mesures d’application seront arrêtées et mises en œuvre incessamment pour accomplir ce grand dessein éducatif.
Il s’articule autour de huit titres :

Titre I. Dispositions générales :

Ce titre comprend quatre articles précisant au niveau de l’article 1
l’objet de la présente loi, énonçant au niveau de l’article 2 certaines définitions fondamentales,
décrétant au niveau de l’article 3 que l’éducation est une priorité nationale absolue et est obligatoire
de six à quinze ans, et énonçant au niveau de l’article 4 les valeurs et les finalités sur lesquelles est
fondée l’Ecole mauritanienne.

Titre II : Des Finalités, Principes du système éducatif national et missions de l’école :

Ce titre comprend 13 articles et trois chapitres traitant des principes de base de l’éducation, des missions de
l’Ecole et de la communauté éducative. Les finalités, principes et missions de l’Ecole définissent le
type de mauritanien que nous voulons et orientent de ce fait les curricula, les programmes et la
politique éducative du pays. ils constituent une nouveauté qui manquait dans la législation scolaire
encadrant le système éducatif national.
• Au niveau du chapitre I, 13 principes sont énoncés dont notamment, ceux relatifs à la gratuité du
service public d’éducation, la centration de l’action éducative sur l’apprenant, le respect des
constantes religieuses et civilisationnelles de la nation mauritanienne, la promotion des valeurs de la
démocratie, des droits de l’Homme et de l’Enfant.
• Le chapitre II traite des missions de l’Ecole qui sont structurés en trois fonctions principales :
l’instruction, la socialisation et la qualification.
• Le chapitre III traite de la communauté éducative qui regroupe les élèves et toutes les personnes
qui participent directement ou indirectement à l’éducation et à la formation des élèves, à la vie
scolaire et à la gestion des établissements scolaires. Il fixe les droits, les devoirs et le rôle de chaque
acteur de la communauté tels que : les élèves, les enseignants, les directeurs des établissements, les
inspecteurs, les parents d’élèves et leurs associations.

 

Titre III : du régime et de l’organisation des études : ce titre traite des deux composantes

formelle (chapitre I) et non formelle (chapitre II) de l’Education.
Le chapitre I traitant de l’éducation formelle est structuré en 8 sections que sont :
• L’enseignement préscolaire,
• L’éducation de base,
• L’enseignement secondaire,
• La formation technique et professionnelle,
• L’enseignement privé,
• L’enseignement supérieur,
• La recherche et l’innovation pédagogiques, et
• L’orientation scolaire et professionnelle.
Les principales mesures de réforme dans ce cadre concernent :
• Au niveau du préscolaire (section I) :
• L’instauration d’un cycle préparatoire à l’enseignement fondamental d’une durée de deux ans dont
la dernière année sera intégrée à l’éducation de base et généralisée progressivement,
• La création d’une fondation nationale ayant pour mission d’assurer le développement du
préscolaire, la politique de généralisation de l’année préparatoire, la promotion des référentiels de
gestion et de pilotage selon des approches basées sur la participation communautaire.
• L’instauration d’un cursus d’éducation de base (section II) obligatoire de 9 ans englobant le
fondamental et le premier cycle secondaire dont la durée sera ramenée à 3 ans. Ces deux cycles sont
organisés dans un continuum cohérent autour d’un socle commun et des enseignements optionnels.
• L’enseignement secondaire (section III), d’une durée de trois ans, sanctionné par le baccalauréat, est
restructuré en deux voies (générale, technique et professionnelle). Chaque voie est divisée en pôles
qui sont organisées en séries avec des options.
• La FTP (section VI) et l’enseignement supérieur (VI) restent organisés par des textes spécifiques.
• Au niveau de l’enseignement privé (section V) :
• Le directeur d’un établissement privé d’éducation et d’enseignement doit obligatoirement posséder la
nationalité mauritanienne,
• La limitation progressive de l’intervention privée aux cycles post primaire,
• Le contrôle strict des licences délivrées aux promoteurs étrangers pour en limiter le bénéfice aux
seules écoles consulaires dans le cadre de relations bilatérales entre Etats.
• La recherche et l’innovation pédagogiques (section VII) et l’orientation scolaire et professionnelle
(section VIII) sont deux domaines nouvellement prix en charge au niveau du cadre juridique de
l’éducation au titre de la présente loi.
Le chapitre II traite de l’éducation non formelle qui comprend :
• L’enseignement originel (section I) dispensé dans les Mahadras et écoles coraniques,
• L’enseignement pour adultes (section II) comprenant l’alphabétisation, l’éducation primaire non
formelle et la formation continue.

Titre IV : Des Conditions et modalités d’accès à l’éducation et l’adaptation de la carte scolaire :

dans ce chapitre la loi traite :
• Des conditions d’accès à l’éducation (section I), notamment les dispositions en vue de la
généralisation de l’éducation de base et les conditions de mise en application de l’obligation
scolaire en renvoyant à des textes règlementaires spécifiques et à des horizons temporels à
déterminer dans le cadre des plans et stratégies sectoriels ;
• La rationalisation de la carte scolaire (section II) à travers des objectifs et des critères permettant
une plus grande efficacité dans le ciblage de la demande, notamment en matière de généralisation
de l’éducation de base de 9 ans.
Titre V : Du Curriculum et politique de langues Curriculum et politique de langues ;

Le titre V comporte 4 chapitres :

Le Chapitre 1 : Des curricula qui prévoit, notamment la Création d’une structure auprès du
ministre chargé de l’éducation nationale sous la dénomination de comité ou de conseil national ou
de commission permanente des curricula (CNC ou CPC). Cette structure sera chargée d’émettre des
avis et des propositions sur toute question relative aux programmes, méthodes, horaires et moyens
d’enseignement. Elle est appelée à assurer et piloter la mise en place d’un Cadre de Référence
national (CRN) des programmes d’enseignement.
Le Chapitre 2 intitulé « Des langues » instaure une nouvelle politique linguistique nationale
instituant l’enseignement du poular, du soninké et du wolof en tant que langues nationales,
renforçant l’enseignement de l’arabe en tant que langue nationale et officielle, et précisant les
modalités d’introduction et d’enseignement des langues étrangères. Cette nouvelle politique
parachève notre indépendance culturelle et fait sortir le système éducatif national de la bipolarité
néfaste, inadmissible entre le français et l’arabe dans un contexte de relégation au second plan de
nos autres langues nationales. En effet, plus de 60 ans après notre accession à la souveraineté
nationale, nos enfants ont le droit d’être enseignés dans leurs langues nationales et la nation a le
devoir de le leur offrir.
Toutes nos langues nationales s’équivalent au regard de notre devise nationale : honneur, fraternité
et justice. Elles ne peuvent et ne doivent, en aucun cas, avoir le même statut qu’une langue
étrangère, quel que soit, par ailleurs, les liens historiques que l’on peut avoir avec celle-ci ; liens qui
lui confèrent inéluctablement une place de choix dans notre pays, comme première langue
d’ouverture.
Ce choix légitime est réconforté par les résultats jugés concluants de l’expérience de l’enseignement
de nos langues nationales, qui a été engagée, quatre décennies plus tôt dans le cadre de la réforme
de 1979 ; mais qui a été abandonnée sans justification valable, pérennisant ainsi une situation
inacceptable, préjudiciable pour notre système éducatif et à son rôle dans l’affermissement de notre
identité nationale.
Les dispositions de ce chapitre 2 sont structurées dans les 3 sections suivantes :
• Section 1 : De l’enseignement des langues nationales : cette section stipule que :
« L’enseignement est dispensé en langue arabe à tous les niveaux d’éducation, aussi bien dans les
établissements publics que dans les établissements privés d’éducation et d’enseignement.

L’enseignement des autres langues nationales (poular, soninké, wolof) est introduit,
promu et développé dans le système éducatif en fonction de la demande exprimée pour
chacune de ces langues le cas échéant.
Tout enfant arabophone doit apprendre au moins l’une des trois autres langues
nationales (le Poular, le Soninké et le wolof). Le choix de cette langue est guidé par le
contexte sociodémographique régional.
L’arabe est enseigné à tous les enfants non arabophones comme langue de
communication et comme véhicule d’apprentissage d’autres disciplines. Les modalités
d’application de cet article seront fixées par voie réglementaire, dans le cadre d’une
politique linguistique nationale. »
• Section 2 : De l’enseignement des langues étrangères : cette section stipule que : « Le français
est enseigné dès la deuxième année du fondamental en tant que langue de communication et dans la
perspective d’être une langue d’enseignement pour certaines matières scientifiques dans les cycles
post primaires.
• L’anglais est dispensé à partir de la première année de l’éducation post primaire.
Un enseignement optionnel d’autres langues étrangères pourrait être introduit à partir
de la deuxième année de l’éducation post primaire. Le choix de ces langues est
fonction du contexte sous régional et international et des impératifs de développement
économique du pays.
Les modalités d’application de cet article sont fixées par voie réglementaire. »
• Section 3 : De l’ingénierie de l’enseignement des langues : cette section prévoit la promotion
d’une ingénierie linguistique pour l’enseignement des quatre langues nationales et des langues
étrangères enseignés dans notre système, et ce en tenant compte des spécificités de chaque langues
et des publics cibles.
Le Chapitre 3 : Les SMT et la digitalisation
L’autorité chargée de l’éducation doit élaborer et faire adopter :
• Une politique de l’enseignement des SMT assortie d’un cadre stratégique à même de guider l’action
de promotion des SMT à court, moyen et long terme au niveau du système éducatif, en prenant en
considération les trois grands choix suivants :
• Dans une perspective de moyen et long terme, une politique de digitalisation de l’enseignement
permettant l’intégration pérenne de l’enseignement à distance.
Chapitre 4 : De l’évaluation : ce chapitre traite :
• De l’évaluation périodique et régulière de toutes les composantes du système éducatif et des quatre
niveaux suivants :
• De l’évaluation des acquis des élèves ;
• De l’évaluation des performances des personnels éducatifs ;
• De l’évaluation du rendement des établissements scolaires ;
• De l’évaluation du rendement de l’enseignement scolaire.

Titre VI : Du métier de l’enseignant et des ressources humaines de l’éducation comporte 2

chapitres qui traient :
Chapitre 1 : Des personnels de l’éducation
Chapitre 2 : Formation initiale et continue des enseignants

• Titre VII : De la Gouvernance et gestion du système de l’éducation

qui aborde les 6 chapitres suivants :

Chapitre 1 : Des principes et règles de gouvernance du système d’éducation
Chapitre 2 : Charte déontologique des métiers de l’éducation
Chapitre 3 : Programme de renforcement des capacités institutionnelles de l’administration centrale
et régionales
Chapitre 4 : Révision des organigrammes et statuts administratifs
Chapitre 5 : Guides référentiels fixant les missions et les compétences des cadres éducatifs,
administratifs et techniques
Chapitre 6 : Revalorisation de la profession enseignante
Titre VIII : Dispositions transitoires et finales subdivisé en 2 chapitres :
Chapitre 1 : Dispositions transitoires
Section 1 : Du comité national de suivi de la réforme de l’éducation
Section 2 : Des mesures transitoires urgentes : cette section stipule que : « Les mesures transitoires
urgentes relatives à l’enseignement préscolaire, à l’enseignement fondamental, à l’enseignement à
caractère professionnel, à l’enseignement des langues nationales et le nouveau régime de la
réforme, pour la période allant de 2022 à 2023, sont énoncées dans l’annexe de la présente loi
d’orientation. »
Chapitre 2 : Dispositions finales

Annexe de la loi d’orientation

En attendant que les conditions d’apprentissage en langues maternelles autres que l’arabe
soient réunies pour tous, les mesures suivantes sont arrêtées :
• Pour l’enseignement préscolaire :
• Les activités ludiques et d’éveil sont développés en langues nationales : l’arabe, le
Poular, le Soninké et le Wolof.
• L’apprentissage des connaissances et aptitudes de compréhension et d’expression, est
effectué en langue arabe, avec l’appui, si besoin est, sur les autres langues
nationales ;
• L’apprentissage de l’alphabet arabe et l’acquisition de compétences de mémorisation
pour un enseignement précoce du saint coran.
• Pour l’enseignement fondamental :
• Les enfants seront mieux préparés à ce cycle d’enseignement par un préscolaire qui
capitalise les acquis de la mahadra (Dudal en Pulaar – Khragnibé en Soninké et
Daraen Ouolof) qui sera d’une année obligatoire au départ et évoluera pour être
complet à 3 ans ;
• L’apprentissage des disciplines scientifiques est dispensé en arabe ;
• L’enseignement du français sera renforcé comme langue de communication et dans la
perspective d’être un moyen d’apprentissage de certaines disciplines scientifiques
dans les cycles post primaires. Des cours de terminologie et des stratégies de
transfert des acquis faciliteront ce passage.
• Pour l’enseignement à caractère professionnel :
• Sera introduit l’enseignement des langues nationales (le Poular, le Soninké et le wolof)
dans les établissements à vocation professionnelle (écoles de formation des
fonctionnaires de l’Etat, établissements FTP, etc.) pour faciliter la communication
avec les populations dans l’accomplissement de leurs missions et l’exercice de
leurs métiers.
• Pour l’enseignement des langues nationales :
• Création d’une structure autonome chargée de la promotion des langues nationales ayant
pour mission :
• de piloter l’expérimentation de l’enseignement des langues nationales et de préparer sa
généralisation,
• concevoir et piloter les stratégies d’apprentissage linguistique au sein du SEN. Cette
structure doit être créé avant le 15/02/2022 ;
• Textes législatifs et règlementaires organisant cette structure avant le 30/03/2022 ;
• Mise en place des équipes des programmes et supports didactiques et capitalisation des
expériences pilotes précédentes et dans les pays voisins avant le 30/06/2022 ;
• Formation des enseignants et des équipes d’encadrement du 1/07/2022 au 30/06/2023 ;
• Ouverture des premières classes expérimentales en langues nationales à la rentrée
d’octobre 2023 ;
• Démarrage de l’expérimentation de l’enseignement des langues nationales au non
locuteurs de celles-ci en octobre 2023 ;
• La généralisation de l’enseignement des langues nationales interviendrait le plus
rapidement possible, aussitôt l’expérimentation aura été jugée probante suite à une
évaluation scientifique adéquate ;
• Au terme de la période expérimentale et en guise d’unification complète du système, les
missions de la structure de promotion de l’enseignement des langues nationales
relevant classiquement de l’IPN, de l’IGEN, ou des écoles de formation y seraient
réintégrées.
• Pour le nouveau régime de la réforme
• Au préscolaire, l’expérimentation de la dernière année préparatoire au fondamental sera
lancée dès octobre 2023 et sa généralisation interviendra en octobre 2028.
• Au fondamental, les élèves passant en 3AF seront pris en charge dans le cadre du
nouveau régime de la réforme dès octobre 2022. A ce niveau, il y’aura extinction en
trois ans, du régime transitoire qui n’est appliqué qu’aux élèves entrant en 4AF en
octobre 2023.
• Au collège, la cohorte issue du régime transitoire du fondamental sera extincte à l’issue
de la durée de ce cycle fixée désormais à 3 années.
• Au lycée, la nouvelle restructuration/diversification des filières pourrait être appliquée
dès la rentrée 2022 ou au plus tard à la rentrée 2023.

Source: OLAN  Mauritanie

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