Mohamed Abbou à propos des arrestations : Kaïs Saïed veut juste mettre ses opposants en prison !
Mohamed Abbou à propos des arrestations : Kaïs Saïed veut juste mettre ses opposants en prison !
Le politicien et ancien ministre, Mohamed Abbou est revenu, mardi 28 février 2023, sur les dernières arrestations.
Au micro de Malek Khaldi dans l’émission La Matinale sur Shems FM, M. Abbou, qui est également avocat de Ghazi Chaouachi, Ridha Belhaj et Chaima Issa, a affirmé que « Kaïs Saïed a émis des ordres pour mettre en prison ses opposants, sans bases légales ».
Et de marteler : « Notre pays est en train d’aller vers le conflit, vers la violence entre Tunisiens et vers le chaos. Kaïs Saïed n’a pas de preuve qu’il est plus patriote que nous. C’est notre pays et on l’aime. C’est un système illégitime et oppressif et le chef de l’État est en train de gouverner avec la force des armes.
Si les Tunisiens ne se dressent pas pour défendre les détenus, qu’ils aient un peu de décence et qu’ils ne croient plus tous les mensonges ! Les opposants resteront en prison pour une période, mais il y a un prix à payer. L’image du pays est en train d’en pâtir au niveau international : tout le monde sait aujourd’hui qu’on n’a pas de justice, que Kaïs Saïed a traité les avocats de terroristes, le président du Conseil de la magistrature et le président du Conseil judiciaire sont déférés devant le pôle judiciaire antiterrorisme. Ce qui veut dire que les magistrats et les avocats sont des terroristes.
Fermez ce pays et qu’on l’appelle le pays de la folie ! »
L’avocat a estimé que les dernières arrestations « ne sont pas des affaires judiciaires, mais une affaire politique » et que dorénavant « les avocats ne devraient plus plaider dans ce genre d’affaires ».
Pour lui, « c’est juste une comédie pour mettre les opposants en prison et ce que fait Kaïs Saïed n’a aucun lien avec la lutte contre la corruption ». Il a cité dans ce cadre et à titre d’exemple, l’affaire Instalingo qui a été utilisée, selon lui, pour régler des comptes avec certaines personnes dont des sécuritaires.
Et d’ajouter en ce qui concerne les récentes arrestations : « Ce dossier n’est pas un dossier de lutte contre la corruption : il s’agit d’une liquidation d’adversaires politiques ».
Pour lui Kaïs Saïed est « hors de la constitution, oppressif, qui a fait main basse sur la justice, qui n’a pas ouvert les dossiers de corruption et qui veut donner des leçons, sous le couvert de protéger la sûreté de l’État et en essayant de convaincre des crédules qu’il est en train de réformer le pays alors qu’il est en train de la tirer vers le fond ». Il s’est, d’ailleurs, interrogé sur le lien entre des politiciens et la spéculation et les pénuries, affirmant que le pouvoir en place aurait pu au moins, lors de la fabrication du dossier, impliquer des grossistes pour être cohérent.
Mohamed Abbou a, en outre assuré, qu’il y a peu de magistrats prêts à être révoqués pour que des personnes innocentes restent en dehors de la prison. Pour lui, les magistrats sont effrayés et la situation aujourd’hui est pire que sous Ben Ali.
Et d’expliquer que sous Ben Ali, les dossiers sensibles étaient envoyés aux magistrats qui lui ont prêté allégeance. Après la révolution, certains partis politiques corrompus ont pu avoir le soutien de quelques magistrats, mais le système judiciaire était globalement efficient. « Aujourd’hui, je ne dirai pas que le pouvoir en place domine tous les magistrats, mais chaque juge auquel un dossier sera confié est convaincu d’une chose : soit il met les personnes soupçonnées dans l’affaire en prison, soit il est révoqué », a-t-il noté.
Et de marteler : « Oui, ce qui se passe en Tunisie est grave ! ».
Interrogé par l’animateur sur les accusations d’assassinats émises par le chef de l’État à l’encontre de plusieurs personnalités, le politicien a soutenu : « Kaïs Saïed est un paranoïaque qui parle tout le temps de son assassinat et cela depuis le début de son mandat. Il a pas mal de fois annulé des voyager pour cette raison. On ne peut continuer de subir ses délires ! Il parle dans le vide, s’il y avait des rapports militaires ou policiers, où sont les arrestations dans ces affaires. »
L’avocat a évoqué la faiblesse des témoignages qui ont conduit à certaines arrestations et qui sont plutôt des ragots de cafés dénués de toutes informations pertinentes, selon ses dires. Il a aussi souligné le fait que le juge d’instruction n’a pas formulé de questions claires sur des accusations claires mais s’est contenté de généralités. Et de rappeler que celui qui applique des directives, rendra tôt ou tard des comptes.
Il a indiqué, dans ce cadre qu’au lieu des fuites sur les réseaux sociaux, le pouvoir en place devrait confier au substitut du procureur ou au ministère de l’Intérieur après l’accord du juge d’instruction de révéler aux Tunisiens ce qu’ils ont trouvé réellement, sans se cacher derrière le secret de l’instruction, étant donné qu’il s’agit d’affaires touchant l’opinion publique vu qu’elles concernent des opposants du régime.
M. Abbou a spécifié que le crime de complot est clairement définit par l’article 68 du Code pénal et concerne l’assassinat du président de la République, son agression physique ou le changement des institutions de l’État, le tout en usant de la violence. Or, toutes les personnes arrêtées n’ont pas fait usage de violence, ils militent pacifiquement.
Et d’ajouter que beaucoup de Tunisiens ont commencé à avoir peur et certains se rapprochent du régime et insultent les opposants du chef de l’État pour se protéger.
« C’est notre pays. J’y resterai quelles que soient les conditions ! Le fait d’appeler les institutions de l’État à ne pas obéir aux ordres de Saïed est une méthode pacifique pour l’obliger à quitter le pouvoir », a-t-il précisé en réponse à l’animateur.
Et de soutenir : « Nous ne sommes pas dans le cadre d’un pouvoir légitime, c’est quelqu’un qui a s’est retourné contre la Constitution. Personne ne peut dire qu’il est légitime. Il a trahi la confiance à cause de notre faiblesse et celles des institutions de l’État. La violence entre les Tunisiens est inadmissible, la seule solution est que les institutions de l’État refusent d’appliquer des directives de parties illégitimes. Il faut un retour à la légitimité, de nouvelles élections et que ceux qui ont commis des crimes rendent des comptes ».
Questionné sur l’élection présidentielle, Mohamed Abbou a martelé : « Oubliez les élections ! Kaïs Saïed sait qu’il est impliqué dans des crimes (notamment de putsch selon l’article 73) et donc il ne va pas quitter le pouvoir. ».
I.N