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Mauritanie : Vers une transition politique entre héritage militaire et gouvernance Civile

Mauritanie : Vers une transition politique entre héritage militaire et gouvernance civile.
Depuis quelque temps, des discussions en ligne mettent en lumière les ambitions politiques d’anciens hauts gradés de l’armée mauritanienne. Ces débats sont souvent marqués par des opinions partisanes, certains soutenant l’éventuelle candidature d’un ancien général à la présidence du pays.

Tout d’abord, cette effervescence met en évidence une dynamique politique où l’appareil militaire continue d’occuper une place centrale dans la gouvernance nationale. En effet, depuis 1978, la Mauritanie a régulièrement été dirigée par des personnalités issues des rangs militaires, une tradition qui a durablement façonné le paysage politique du pays.

Par ailleurs, il convient de noter que la participation d’anciens militaires à la politique n’est ni illégale ni inédite en Mauritanie ou ailleurs. Plusieurs exemples à travers le monde montrent que des anciens officiers ont assumé des fonctions politiques avec succès :

Dwight D. Eisenhower (Etats-Unis) : Ancien général ayant commandé les forces alliées en Europe durant la Seconde Guerre mondiale, il fut président des Etats-Unis de 1953 à 1961.

Jerry Rawlings (Ghana) : Ancien capitaine de l’armée de l’air, il a mené une transition politique réussie vers une démocratie multipartite au Ghana.

Abdel Fattah al-Sissi (Egypte) : Ancien général et ministre de la Défense, il est devenu président de l’Égypte après avoir remporté des élections.

Ainsi, la législation mauritanienne n’interdit pas aux anciens militaires de briguer des postes politiques, diplomatiques, juridiques ou techniques. Cette participation peut être perçue comme une continuité de leur engagement pour le pays. Cependant, il est essentiel de souligner que la domination prolongée d’une élite militaire sur la scène politique peut susciter des interrogations sur la séparation entre les sphères militaire et civile ainsi que sur l’équilibre des pouvoirs dans une démocratie.

Néanmoins, les critiques formulées à l’encontre de cette présence militaire récurrente dans la gouvernance doivent être relativisées. L’institution civile n’est pas plus organisée que l’institution militaire, et elle ne se distingue pas non plus par une dimension plus citoyenne. Les déficiences administratives et la faiblesse structurelle des institutions civiles limitent leur capacité à incarner une gouvernance exemplaire et participative.

En conséquence, de nombreuses voix plaident pour une refondation du système politique mauritanien en faveur d’une gouvernance plus inclusive et civile. Dans cette perspective, un renouvellement des pratiques politiques pourrait permettre une meilleure gestion des défis économiques et sociaux auxquels le pays est confronté. À cet égard, la Mauritanie pourrait bénéficier d’une approche diversifiée qui valorise la complémentarité entre les civils et les anciens militaires.

Par ailleurs, l’armée a historiquement joué un rôle crucial dans la stabilité et la sécurité de la Mauritanie. Toutefois, une évolution vers une gouvernance davantage civile pourrait renforcer la démocratie et diversifier les perspectives de développement. En définitive, les ambitions politiques des anciens militaires doivent être évaluées sur la base de leurs compétences, de leur vision pour le pays et de leur engagement à servir les intérêts de tous les Mauritaniens. Une telle évaluation garantirait une transition politique plus harmonieuse et bénéfique pour la nation.

Ahmed Ould Bettar

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