L’UPR tourne la page de l’ancien président Aziz
La mainmise du président Mohamed Ould Ghazouani sur la Mauritanie a été consacrée lors d’un congrès de l’Union pour la République (UPR), ce dimanche à Nouakchott, en l’absence de son fondateur, l’ex-chef de l’État Mohamed Ould Abdelaziz.
Le congrès du parti majoritaire Union pour la République (UPR) a consacré, dimanche 29 décembre, l’échec de la tentative de l’ancien président de la République, Mohamed Ould Abdelaziz, pour revenir dans le jeu politique mauritanien, cinq mois après avoir cédé le fauteuil présidentiel à son ami, l’ancien chef d’état-major Mohamed Ould Ghazouani.
C’est à main levée que les quelque 2 250 congressistes ont élu un nouveau Conseil national, en l’absence de tout candidat favorable à Aziz. Ainsi, le nouveau président de l’UPR est Sidi Mohamed Ould Taleb Amar, patron de la Société des eaux, ancien ministre de l’hydraulique et ambassadeur en Russie et aux États-Unis.
Salka Mint Yamar, Mohamed Yahya Ould Horma et Djindah Bal sont respectivement premier, deuxième et troisième vice-président.e.s.
Aziz écarté
Revenu en Mauritanie mi-novembre, après plus de trois mois de voyages à l’étranger, l’ancien chef de l’État semblait avoir pour objectif de prendre la tête de l’UPR afin de peser sur la politique de son successeur. Il n’a pu imposer ni la date de son congrès, qu’il souhaitait en février 2020, ni ses hommes, comme il avait l’habitude de le faire depuis dix ans.
Dans une conférence, mi-décembre, lors de laquelle il a exprimé sa colère, Aziz a jugé « inconstitutionnel » que son successeur devienne « la référence » du parti, mais n’a rien pu faire pour s’y opposer, les siens l’ayant abandonné.
En quelques semaines, Mohamed Ould Abdel Aziz a donc perdu tous les outils qui lui auraient permis de demeurer politiquement incontournable. Fin novembre, le Bataillon de la sécurité présidentielle (BASEP), qui lui avait permis de réussir deux coups d’État – en 2005 et 2007 – et de s’emparer du pouvoir, a été décapité et profondément remanié par le président Ghazouani, afin d’éliminer tout risque de débordement.
Par ailleurs, Aziz ne peut compter sur aucun appui au sein de l’armée, contrôlée par le nouvel adjoint à l’état-major du président Ghazouani, le général Hanena Ould Sidi, ministre de la Défense.
« L’alternance est enfin sur les rails »
La perte du contrôle de l’UPR par Aziz tient moins à un nomadisme politique très pratiqué en Mauritanie qu’au fait qu’il ne peut y avoir deux chefs dans le monde arabo-berbère et que l’ancien président ne fait plus peur.
Deux autres éléments ont joué contre lui. Une notable partie de l’opinion publique le voue aux gémonies, comme en témoignent les attaques virulentes dont il fait l’objet sur les réseaux sociaux. Les internautes réclament sa mise en accusation et la demande des partis de l’opposition radicale d’établir un bilan de ses dix ans de pouvoir.
Par contraste avec les crispations innombrables de l’ère Aziz, les nombreux contacts du président Ghazouani avec l’ensemble des partis ont détendu l’atmosphère politique et ont été approuvés par l’opposition. La grande majorité des Mauritaniens veulent définitivement tourner la page. « Nous avons perdu des mois précieux avec ces affaires, commente Hacen Lebatt, membre de l’équipe de campagne du président Ghazouani.
Le chef de l’État a désormais les pleins pouvoirs pour appliquer son programme en faveur d’un pays qui en a le plus grand besoin. L’alternance est enfin sur les rails ».
Par Alain Faujas
Jeune Afrique