Maroc : une fracture silencieuse entre élites sur fond de malaise social
Malaise social et crise d’élites : le Maroc fait face à une fracture silencieuse entre générations et pouvoirs, sur fond d’inégalités et de quête de renouveau.
Fracture silencieuse
Alors que les rues et les réseaux bruissent d’un mécontentement croissant, le Maroc révèle une crise moins visible mais profonde : celle d’élites qui ne parlent plus le même langage. Entre une jeunesse connectée, une économie concentrée et des institutions figées, le pays se trouve à la croisée des chemins.
RABAT – Le Maroc traverse un moment de tension silencieuse. Derrière les manifestations sociales et les débats en ligne, c’est une fracture au sein même des élites qui s’installe. Les différentes sphères de pouvoir – politique, économique, culturelle et numérique – ne se reconnaissent plus et peinent à dialoguer.
En vingt ans, le royaume a formé une génération record de diplômés – près de 250 000 par an -mais plus d’un quart d’entre eux restent sans emploi. Une jeunesse instruite, connectée (près de 90 % active sur les réseaux sociaux) et lucide, frustrée non par l’échec mais par l’impossibilité d’accéder à un système verrouillé.
L’économie, en apparence solide – PIB de 140 milliards de dollars et croissance de 3,2 % selon la Banque mondiale – cache une concentration inquiétante de la richesse. Les 10 % les plus riches captent 53 % du revenu national, tandis que les classes moyennes voient leur pouvoir d’achat s’éroder sous l’effet d’une inflation annuelle proche de 5 %.
Les élites politiques traditionnelles, vieillissantes et déconnectées, peinent à convaincre : seulement 36 % de participation aux élections de 2021. À côté d’elles, émergent de nouvelles figures -jeunes entrepreneurs, artistes, chercheurs, influenceurs – qui portent une autre vision du pays, plus ouverte, plus participative, mais souvent écartée des cercles de décision.
Pour de nombreux observateurs, le Maroc se trouve à un tournant. Restaurer la confiance passe par une ouverture du jeu politique et économique, une meilleure représentation des jeunes et des femmes, et une reconnaissance de la créativité citoyenne.
Rédaction Rapide info