Libre Expression : Une hypocrisie institutionnelle et un mépris des réalités migratoires
Une hypocrisie institutionnelle et un mépris des réalités migratoires
Les déclarations du ministre de l’Intérieur mauritanien, Mohamed Ahmed Ould Mohamed Lemine, sur la politique migratoire du pays sont d’une hypocrisie insoutenable et d’un cynisme révoltant. Elles témoignent d’un profond mépris pour la réalité des migrants et des pratiques répressives du gouvernement.
Ajib : Une prétendue hospitalité démentie par la répression brutale
Le ministre affirme que la Mauritanie restera “un pays ouvert et hospitalier pour tout migrant en situation légale”. Cette déclaration est une insulte à la vérité. Ces derniers mois, le pays a procédé à des rafles massives, des arrestations arbitraires et des expulsions brutales de centaines de migrants subsahariens, y compris des personnes en situation régulière. Les témoignages accablants de migrants abandonnés en plein désert sans assistance médicale ni eau sont là pour prouver que la Mauritanie est tout sauf un “pays hospitalier”.
Parler de “migrants en situation légale” alors que les autorités elles-mêmes rendent impossibles les régularisations administratives est une absurdité. Les migrants ne sont pas expulsés pour une question de légalité, mais bien pour répondre aux injonctions de l’Europe et satisfaire un agenda xénophobe.
Une politique migratoire dictée par l’Europe
Le ministre tente de minimiser les accords conclus avec les Européens en affirmant qu’il ne s’agit que d’un “accord d’intentions non contraignant”. Mais à qui pense-t-il s’adresser ? Les accords de coopération sécuritaire signés avec l’Europe transforment la Mauritanie en sous-traitante des politiques migratoires européennes. Concrètement, le pays reçoit des financements en échange de la traque et de la répression des migrants en transit.
Si, comme l’affirme le ministre, ces accords ne comportent aucune violation de la souveraineté mauritanienne, alors pourquoi les autorités se livrent-elles à une chasse aux migrants au profit de l’Europe ? Pourquoi l’État mauritanien se soumet-il aux exigences européennes en jouant le rôle de garde-frontière du Nord ?
Une manipulation éhontée de l’opinion publique
Le ministre ose prétendre que les expulsions récentes ont été conduites dans le strict respect de la loi et validées par les ambassades des pays concernés. C’est un mensonge flagrant. Plusieurs organisations internationales ont dénoncé les abus et la violence des expulsions. Des migrants se retrouvent abandonnés dans des zones dangereuses, sans ressources, après avoir été dépouillés et maltraités par les forces de l’ordre mauritaniennes.
Quant à l’argument selon lequel le “tumulte” serait le fait de personnes qui auraient sorti la question de son contexte, il traduit un mépris total pour la vérité. Ce tumulte est légitime et nécessaire, car il met en lumière les abus et l’injustice d’un État qui traite les migrants comme des criminels plutôt que comme des êtres humains.
Le ministre évoque les “avantages” de l’accord avec l’Europe, notamment l’appui aux services de sécurité, la création d’opportunités d’emploi et la facilitation des visas pour les Mauritaniens. Encore une fois, il s’agit d’un discours trompeur. Ces promesses ne sont que de la poudre aux yeux. Les aides financières promises par l’Europe ne profitent jamais aux populations, mais aux élites corrompues et à l’appareil sécuritaire chargé de réprimer à la fois les migrants et les Mauritaniens eux-mêmes.
Quant à la “facilitation de l’accès aux visas”, elle est inexistante. L’Europe continue d’imposer aux Mauritaniens des procédures de visa humiliantes et restrictives. En réalité, ces accords ne font qu’entériner une relation inégalitaire où la Mauritanie se soumet aux exigences européennes sans obtenir de véritable contrepartie.
Les propos du ministre ne sont qu’un écran de fumée destiné à justifier une politique migratoire répressive et soumise aux intérêts étrangers. La Mauritanie n’est ni un pays hospitalier, ni un État souverain dans la gestion de la migration. Elle se contente d’exécuter les basses œuvres de l’Europe, au prix de violations massives des droits humains.
Les migrants en Mauritanie ne sont pas des criminels, mais des victimes d’un système qui les instrumentalise pour obtenir des financements. L’histoire jugera sévèrement ces dirigeants qui, au lieu de défendre la dignité humaine, choisissent de pactiser avec les oppresseurs.
Sy Mamadou