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L’héritage judiciaire du génocide rwandais : une affaire toujours bloquée

Dans la soirée du 6 avril 1994, un avion transportant le président rwandais Juvénal Habyarimana est abattu à l’approche de l’aéroport de Kigali. Bien que les assassins de Habyarimana n’aient pas pu être identifiés, sa mort a brisé la paix fragile entre le Front patriotique rwandais (FPR), défenseur de la cause tutsi, et le gouvernement hutu du pays.

Dans les 100 jours qui ont suivi l’attaque, un génocide, des crimes contre l’humanité et des crimes de guerre ont été commis à une échelle inimaginable ; près d’un million de civils tutsis ainsi que des Hutus modérés ont été massacrés.

Suite à l’indignation de la communauté internationale, le Conseil de sécurité de l’ONU a créé le Tribunal pénal international pour le Rwanda (TPIR) pour « poursuivre les responsables du génocide et d’autres violations graves du droit international humanitaire ». Le TPIR a inculpé 93 personnes – dont trois sont toujours en fuite – et condamné les auteurs responsables du génocide. C’était la première fois dans l’histoire qu’un tribunal international rendait de telles décisions.
Comme pour son tribunal frère pour l’ex-Yougoslavie (TPIY), l’accent mis par le TPIR sur la juridiction supranationale visait à contribuer au processus de réconciliation dans le but ultime d’aider les Rwandais à vivre à nouveau côte à côte en paix et de dissuader la perpétration d’atrocités similaires dans le pays. avenir.

D’autres tribunaux internationaux ont été créés dans d’autres parties du monde à la suite du génocide au Cambodge, de la rébellion indépendantiste au Kosovo, de la guerre civile en Sierra Leone et de l’assassinat d’un ancien Premier ministre au Liban. Ces développements ont finalement conduit à la création de la première Cour pénale internationale (CPI) permanente dotée d’un mandat complet en termes de géographie et de période.

Ce qui était considéré comme une « cause de l’humanité entière » par Kofi Annan, alors secrétaire général des Nations Unies, a dû paraître excessif aux pays qui ont choisi de ne pas soumettre leurs territoires au mandat de la CPI – dont trois ( Le États-Unis, Chine et Russie) sont les membres permanents les plus éminents du Conseil de sécurité de l’ONU, la même organisation qui a lancé le mouvement vers des poursuites internationales.
Parallèlement, certains pays européens ont codifié le principe de compétence universelle dans leur droit interne, permettant ainsi à leurs procureurs de poursuivre les auteurs de génocide, de crimes contre l’humanité et de crimes de guerre, même si ces crimes sous-jacents ont été commis à l’étranger et même si les auteurs et les victimes étaient étrangers.

En 2001, par exemple, la Belgique a enquêté sur des crimes majeurs commis au Guatemala et au Tchad. Ces procédures n’ont pas suscité beaucoup de résistance politique de la part de la communauté internationale, dans la mesure où les événements qui ont donné lieu aux enquêtes au Guatemala se sont produits il y a plusieurs décennies. Quant au cas du Tchad, l’ancien dictateur accusé Hissène Habré avait été jusque-là abandonné par ses alliés occidentaux.
Cependant, la situation a radicalement changé lorsque les autorités judiciaires belges ont ouvert une enquête contre le Premier ministre israélien Ariel Sharon pour les massacres perpétrés lors de l’invasion israélienne du Liban. Deux ans plus tard, une plainte pénale a été déposée contre le commandant américain Tommy Franks pour crimes de guerre présumés commis en Irak.

En juin 2003, le secrétaire américain à la Défense Donald Rumsfeld a menacé la Belgique de perdre son statut de siège de l’OTAN si elle n’abrogeait pas sa législation sur la compétence universelle. Je me suis levé.

En 2013, un tribunal espagnol a émis des mandats d’arrêt contre l’ancien président chinois Jiang Zemin, citant sa responsabilité dans des allégations de violations des droits de l’homme au Tibet. La Chine a clairement fait savoir qu’il y aurait des conséquences douloureuses sur les relations commerciales avec l’Espagne si le législateur de Madrid ne mettait pas fin au recours excessif à la compétence universelle. Je me suis levé.

Lorsque la CPI a annoncé en 2020 une enquête sur d’éventuels crimes de guerre et crimes contre l’humanité commis lors de l’invasion occidentale de l’Afghanistan après les attentats du 11 septembre, le gouvernement américain est allé jusqu’à imposer des sanctions politiques et économiques à la procureure de la CPI, Fatou Bensouda, et à son épouse. équipe. Depuis lors, et plus de 20 ans après les crimes présumés, l’affaire est toujours bloquée dans la phase initiale « d’enquête ».

Avec

agences

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