Les frères d’armes : Chronique d’une Amitié Déchue.
Les frères d’armes
Il fut un temps où deux jeunes officiers, Mohamed et Aziz, partageaient les bancs de l’Académie militaire de Meknès. L’un, Ghazouani, était calme, réfléchi, fils d’une grande lignée religieuse, humble malgré tout. L’autre, Abdel Aziz, était ambitieux, taciturne, mais doté d’une volonté de fer et d’un appétit insatiable pour le pouvoir.
L’Amitié Forgée dans l’Acier
De Meknès à Nouakchott, les deux hommes devinrent inséparables. Aziz, peu bavard, trouvait en Ghazouani une oreille attentive, un compagnon fiable, presque un frère.
Pendant quarante ans, ils gravirent ensemble les échelons de l’armée, puis de l’État. Aziz, le meneur, imposait sa volonté, tandis que Ghazwani, fidèle, ne cherchait jamais à s’opposer, préférant la loyauté à l’ambition.
Le Passage du Flambeau.
En 2019, Aziz, alors président tout-puissant torse bombé et tête haute, choisit son ami de toujours comme successeur. Il pensait ainsi garder la main sur les affaires du pays, persuadé que Ghazouani, « l’homme docile », ne serait qu’un gardien de ses intérêts. Mais il avait sous-estimé la force tranquille de son ami.
Le Malentendu.
Rapidement, les tensions montèrent. Aziz, incapable de rester dans l’ombre, tenta de s’immiscer dans les affaires de l’État. Ghazwani, désormais chef de l’État, devait choisir entre la fidélité à son ami et son devoir envers la nation. Pour la première fois, il s’opposa à Aziz, refusant de céder à ses exigences. L’amitié se fissura, la confiance vola en éclats.
Le Procès.
Le scandale éclata. Aziz fut accusé de détournements massifs, jugé et condamné à quinze ans de prison. Les partisans de l’ancien président crièrent à l’injustice, accusant Ghazwani de trahison. Mais la vérité était plus complexe : le président en exercice n’avait fait qu’appliquer la loi, malgré la douleur de voir son ancien frère d’armes humilié publiquement.
Frères ennemis .
Dans sa cellule, Aziz ressassait l’amertume de la trahison. Ghazwani, lui, portait le poids du pouvoir et de la solitude, conscient d’avoir sacrifié une amitié pour préserver l’État. Les deux hommes, jadis inséparables, étaient devenus les symboles d’une fracture irréconciliable, victimes d’un destin cruel où l’amitié ne résiste pas toujours à la raison d’État.
Le peuple murmurait : « Comment deux frères d’armes, unis par l’histoire, ont-ils pu devenir frères ennemis ? » Peut-être qu’un jour, le temps, la sagesse ou la grâce présidentielle viendra refermer la blessure. Mais pour l’instant, la Mauritanie retient son souffle, témoin d’une tragédie politique où l’humain se heurte à l’impitoyable logique du pouvoir.
Morale de l’histoire :
Même les amitiés les plus solides peuvent se briser sous le poids du pouvoir et des ambitions. Mais, dans la grande fresque de l’Histoire, il reste toujours une place pour la réconciliation, si le cœur l’emporte sur la rancune.
Abdoulaziz DEME le 24 Mai 2025