Le Sommet de Londres ne sera pas différent des autres !

Publié le 19.01.2020 à 21h18 par AFP

Ce lundi 20 janvier, la boucle sera bouclée : avec le Sommet Grande-Bretagne/Afrique, tous les cinq membres du Conseil de sécurité (Etats-Unis, Chine, France, Grande-Bretagne, Russie) auront donc eu chacun sa rencontre de très haut niveau avec le continent africain. Dans cette chronique exclusive pour APAC l’éditorialiste africain, Seidik Abba, estime que « le sommet de Londres est, en vérité, l’aboutissement d’un processus. »

.Anticipant sur son départ de l’Union européenne, la Grande-Bretagne a lancé ces deux dernières années une offensive tous azimuts vers l’Afrique.

Au plan politique et diplomatique, les Britanniques, qui ont jusqu’ici confié leur politique africaine au Haut-Représentant pour la politique étrangère de l’Union européenne, ont veillé à enrichir leur réseau diplomatique et consulaire avec l’ouverture de nouvelles ambassades, notamment, en Mauritanie, au Niger et au Tchad. Trois pays qui n’étaient pas forcément dans leur sphère traditionnelle d’influence. En prenant pied au Sahel (Mauritanie, Niger, Tchad), la Grande-Bretagne post-Brexit souhaite demeurer un acteur incontournable dans le règlement des crises internationales brûlantes. A regarder près, l’offensive diplomatique vient en appui à une présence économique que la perspective du Brexit a conduit à consolider. Outre ses partenaires économiques africains privilégiés que sont le Nigeria et le Kenya, la Grande-Bretagne a signé en septembre 2019 un nouvel accord de partenariat commercial avec l’Afrique du Sud, le Botswana, l’Eswatini, le Lesotho, le Mozambique et la Namibie. Preuve de l’importance des échanges économiques avec l’Afrique, les investissements directs britanniques en Afrique atteignaient 38 milliards de Livre en 2018, selon l’Office national anglais de la statistique.

Le modèle allemand

Comme l’avait fait l’Allemand en lançant son initiative avec l’Afrique sous le nom « Compact with Africa », à la faveur du Sommet du G-20 en 2017, Londres entend miser sur les échanges commerciaux et les partenariats mutuellement profitables. Le Commonwealth Development Corporation, entité chargée des investissements du secteur privés sera la tête de pont de l’offensive anglaise en Afrique Avec un budget propre de près de 7 milliards de Livre. Sur l’ensemble du continent, les secteurs des finances, des nouvelles technologies, de l’agriculture, des énergies renouvelables sont dans le viseur de la Grande-Bretagne post-Brexit.

Dans la logique de la Grande Bretagne post-Union européenne, le paradigme n’est pas d’annoncer aux Africains à Londres de gros montants d’aide au développement, ni de procéder à une annulation de la dette, mais de faire progresser les échanges avec l’Afrique qui s’élèvent actuellement pour les seuls pays du Commonwealth à près de 9,8 milliards de Livre par an. Il est donc clair pour le Somment de lundi la Grande Bretagne a son agenda conçu de longue date avec des objectifs chiffrés et même une stratégie d’évaluation des progrès de sa politique africaine.

Les Africains sans agenda

En revanche, comme lors des autres sommets avec le reste du monde, les Africains viendront à Londres en ordre dispersé sans agenda commun. En effet, il n’y a eu aucune concertation africaine préalable (pré-Sommet interafricain), même pas entre les Etats du Commonwealth. Chaque Etat sera donc présent face aux Britanniques avec ses attentes spécifiques. Il y a finalement peu d’espoirs que le Sommet de Londres puisse faire avancer les grands projets continentaux tels le financement des routes transsahariennes, des liaisons ferroviaires continentales, de la Muraille verte. Ou même l’agenda des foyers de tensions majeurs : Bassin du Lac Tchad, Corne de l’Afrique, Sahel, Libye.

Toutefois, les dirigeants africains repartiront satisfaits d’avoir été reçus avec tous les égards et quelques annonces sur l’augmentation du volume des échanges commerciaux dont on ne sait pas à qui ils profitent surtout.

Parce qu’il s’inscrit dans la même tradition, le Sommet de Londres ne sera pas fondamentalement différent des grands rendez-vous que l’Afrique a déjà eus avec le reste : Chine, France, Russie, Japon, Allemagne, Turquie. Au mieux, ce sera une grand-messe qui n’apportera aucune valeur ajoutée à la mobilisation pour améliorer le bien-être des Africains.

Journal Du Sénégal

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