Le devoir de vérité, l’impératif de courage.
Si une crise interethnique persiste sans fin, cela veut dire que le diagnostic est controuvé et bien sûr, la thérapeutique est incertaine et erronée.
Il faut dire les choses avec clarté : ce qui affecte l’unité nationale mauritanienne, ce n’est jamais le manque de justice, l’accès au travail ou à la richesse nationale pour les Négro-Mauritaniens. Loin de là.
En conséquence, un retour vers le conflit initial postindépendance permet de saisir avec précision la véritable pomme de discorde.
À ce moment-là, le leadership négro-africain avait diffusé trois idées principales qui expliquent le fondement des événements qui vont se succéder jusqu’à nos jours.
– Les Poulo-Toucouleurs ne reconnaissent pas leur statut minoritaire : il est donc inutile de chercher à leur accorder les droits prévus par le droit international aux minorités ethnoculturelles.
– Ils ont exprimé leur refus de la destruction culturelle, en d’autres mots le rejet de la langue arabe à l’école de la République.
Le mot d’ordre des nationalistes pulaars demeure : ‘Nous ne nous laisserons jamais imposer la langue arabe’. Pourtant, ils ne réclamaient en aucun cas l’enseignement et l’officialisation du pulaar.
– Ils demandaient que l’État mauritanien soit basé sur la race, en reconnaissant l’égalité des droits entre les communautés arabo-mauritanienne et négro-mauritanienne, conformément à la loi fondamentale.
À cette époque aussi, aucun groupe politique négro-africain ne pouvait dénoncer une quelconque forme de discrimination envers les Foutanké, car elle n’existait absolument pas.
Pourquoi donc y a-t-il eu une crise ouverte permanente qui entrave la marche nationale ?
Croire que c’est à cause de l’exclusion des Pulaars, du refus de reconnaître leur culture, de l’esclavage ou encore de l’inexistence du bilinguisme franco-arabe, c’est manquer de courage de reconnaître le vrai problème.
La question, la seule et la vraie, est la suivante : les nationalistes poulo-toucouleurs, qu’ils soient de l’UFP, de Vivre-Ensemble, des FLAM, du FCP ou du mouvement IRA, se battent sans arrêt contre l’exclusivité arabe de l’État mauritanien. Par conséquent, est-ce que la direction nationale va reconnaître la vérité et trouver une solution à cette crise ?
Pour réaliser cela, les irrédentistes foutanké réclament de revenir au débat initial sur la République et d’inscrire dans la Constitution que l’État mauritanien est multinational, ce qui établit l’égalité institutionnelle ethnique.
Questions :
Va-t-on inventer une nouvelle République de type ethnique ?
Notre classe politique, mise à part les panafricanistes, aura-t-elle le courage d’affronter ce défi avec courage et objectivité ?
Peu importe. Si les Maures étaient contraints de partager l’identité de la Mauritanie avec les Pulaars, les Soninkés et les Wolofs, qu’est-ce qui les a poussés à refuser initialement la proposition du roi Hassan II, présentée par le président ghanéen Nkrumah à son ami Mokhtar, pour une simple confédération avec le Royaume du Maroc ?
N’oublions pas, dans ce cadre, que les Marocains ne vont jamais contraindre les Maures à abandonner la langue arabe et ne vont jamais les délester de leur héritage arabe ancestral.
Alors, est-ce plus avantageux d’avoir une identité et une souveraineté partagées entre quatre ethnies au lieu de deux pays membres de la Ligue des États Arabes ?
NB : Pour les irrédentistes foutanké, le Fouta est indivisible. Une autre crise est donc en perspective pour le Sénégal et la Mauritanie.
Ely Ould Sneiba
Le 21 juillet 2025