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La brillante carrière universitaire de nos élites

Dans une Mauritanie où la réussite ne passe ni par le mérite, ni par le travail, ni par la vision, les élites ont développé un cursus parallèle, une sorte d’université invisible où l’on enseigne ce qu’aucune institution n’ose encore formaliser : l’art de prospérer dans le néant.

La brillante carrière universitaire de nos élites

Dans une Mauritanie où la réussite ne passe ni par le mérite, ni par le travail, ni par la vision, les élites ont développé un cursus parallèle, une sorte d’université invisible où l’on enseigne ce qu’aucune institution n’ose encore formaliser : l’art de prospérer dans le néant.

Licence en légèreté et incompétence appliquée

La première étape est accessible à toutes et tous : être léger. Très léger. Ne surtout pas penser, ne pas lire, ne pas déranger. Être “sympa”, “disponible”, “présent”, mais jamais exigeant ni structuré.

Exemples :
• Le directeur d’un hôpital public qui ne connaît même pas le nombre de lits disponibles mais fait chaque jour son petit tour en boubou repassé pour la photo.
• Le ministre de l’Éducation qui dort sur des réformes promises depuis dix ans, tout en organisant des « journées de réflexion » où personne ne réfléchit.
• Les diplomates nommés par amitié, qui parlent à peine le français, n’ont jamais lu un rapport, mais savent parfaitement danser lors des réceptions à l’ambassade.

Master en pillage institutionnalisé

Après la légèreté vient la maîtrise du détournement chic, sans violence, sans bruit. C’est le moment où l’élite apprend à transformer toute structure publique en guichet privé, tout projet en business parallèle.

Exemples :
• Le projet de « logements sociaux » dont 90 % du budget est englouti avant la pose de la première brique.
• Les marchés publics attribués à des proches, à des entreprises sans expérience, mais avec la bonne filiation ou la bonne tribu.
• L’éternel « programme d’insertion des jeunes » dont les jeunes n’ont jamais vu la couleur, mais qui a enrichi trois consultants et deux cousins du ministre.

Doctorat en hypocrisie structurelle

À ce stade, l’élite apprend à dire le contraire de ce qu’elle pense, à promettre ce qu’elle ne fera jamais, et à parler de justice en foulant la loi chaque jour.

Exemples :
• Le politicien qui dénonce l’injustice sociale le jour, et demande un quota spécial pour son fils dans un poste diplomatique la nuit.
• Le cadre religieux qui prêche l’éthique en public, mais trafique des terres de waqf en secret.
• Le chef d’un parti qui soutient le dialogue inclusif, mais refuse toute remise en question du pouvoir en place… tant qu’il reçoit son budget de fonctionnement.

Post-doctorat en soumission rentable à l’ordre établi

La dernière étape, c’est l’art de la prosternation rentable. Ce n’est plus simplement de la loyauté : c’est de la soumission stratégique, habillée de nationalisme et parfumée à l’opportunisme.

Exemples :
• Le haut fonctionnaire qui devient subitement “pro-gouvernement” dès qu’il est nommé conseiller technique, après avoir critiqué le système pendant des années.
• L’ancien opposant historique qui, après une mission spéciale ou un passeport diplomatique, devient un artisan de “la stabilité” et du “dialogue”.
• Le “journaliste” ou “influenceur” qui se transforme en communicant du régime dès qu’une enveloppe, une voiture ou un terrain est offert en douce.

Bienvenue à l’Université invisible de l’élite mauritanienne

Dans ce système parallèle, les plus intelligents ne sont pas ceux qui créent, qui pensent, ou qui défendent l’intérêt général. Non. Les plus malins sont ceux qui savent jongler entre loyauté tribale, apparences religieuses, soumission politique et intérêts financiers.

Et quand, parfois, un jeune honnête, compétent et sincère tente de briser ce cycle, on lui dit :

« Toi aussi, tu comprendras… Avec le temps. »Wetov

Sy mamadou

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