Ghazwani dévoile son directoire de campagne : Le ton est donné
Ghazwani dévoile son directoire de campagne : Le ton est donné
Le candidat de la majorité a coopté son directoire de campagne. Et le moins qu’on puisse dire est qu’il a choisi de poursuivre le recyclage et le maintien des anciens du système hérité de son prédécesseur, Mohamed ould Abdel Aziz dont la candidature a été, semble-t-il, zappée par le Conseil Constitutionnel, alors que l’ex-raïs avait réussi à déposer son dossier quelques minutes avant l’heure limite de la clôture de dépôt. Ce rejet ne surprend personne, c’est le contraire qui aurait étonné, pour ne pas dire scandalisé.
Le directoire de campagne du candidat Ghazwani est composée presque exclusivement de membres du gouvernement actuel et d’anciens proches et confidents de l’ex-Président. Cela fait dire à nombre d’observateurs que le successeur de MOAA n’est pas prêt à changer son fusil d’épaule, alors que dans sa déclaration de candidature, il avait laissé entrevoir une volonté de changer les choses : hommes et gouvernance. Son discours d’investiture en Mars 2019 parlant de justice et d’équité avait suscité un grand espoir. Excepté chez les proches du pouvoir – certains étaient même allés jusqu’à demander au président Ould Abdel Aziz de parjurer en briguant un troisième mandat – tout le monde priait Dieu de les débarrasser du tombeur de feu Sidi ould Cheikh Abdallahi.
L’espoir d’éradiquer le pays de la corruption qui le gangrène depuis 1978 augmenta lorsqu’une commission parlementaire fut mise sur pied pour passer au peigne fin la gestion de la décennie 2009-2019. On avait pensé, naïvement peut-être, que le président Ghazwani était venu nettoyer la maison, comme le général Robert Gueï, en Côte d’Ivoire, en 1999. Avec le résultat que l’on sait. Hélas, la moisson est bien maigre, cinq ans après son arrivée à la tête du pays. Les sceptiques n’hésitent même plus à dire que la corruption a gagné en ampleur. Dans cette croisade contre elle, seul l’ex-Président et certains de ses proches ont été traînés devant le tribunal et condamnés, les autres gros bonnets ont réussi leur reconversion, avec parfois plus d’arrogance et de zèle.
Aveu d’impuissance ?
La Mauritanie est le pays de tous les possibles. Pourtant les patriotes sont conscients qu’elle ne peut continuer sur sa trajectoire actuelle : elle a réellement besoin de changement. Seuls les imbéciles peuvent croire qu’il n’y en aura jamais. Mais, curieusement aujourd’hui, ce sont presque les mêmes hommes qui constituaient la cour de l’ex-Président, qui entourent son successeur apparemment obstiné à les recycler. Ses coups de colère – pour ne pas dire de gueule – quand il s’est agi d’exprimer son mécontentement, face aux lenteurs dans l’exécution de certains grands projets de Taahoudaty, et le rattachement de l’Inspection générale de l’État à la présidence ne sont pas arrivés à dissuader de sévir les grands pilleurs de nos ressources nationales. La déclaration du président de la République à Nouadhibou avouant qu’il ne savait pas que la capitale économique manquait d’eau et d’électricité constitue un aveu d’échec – pour ne pas dire d’impuissance – face aux lobbys qui minent ce pays.
La question que les observateurs se posent aujourd’hui est de savoir ce que l’actuel Président envisage de faire au cours de son second mandat pour nous débarrasser enfin de la corruption et des injustices. Ces tares semblent si fortement ancrées que s’y attaquer équivaudrait à scier la branche sur laquelle ses soutiens sont assis. Ghazwani se ferait ainsi de nombreux ennemis qui vivent du pillage de nos ressources, perpétuent les injustices et amplifient les frustrations. Même si des efforts ont été fournis – dans le domaine social surtout – la gabegie reste une tache noire du quinquennat. Et le retour des dinosaures auquel on assiste depuis que la précampagne a commencé tempère fortement l’optimisme. La publication d’une liste de cent quarante personnalités – Premiers ministres, ministres et autres – ayant choisi de le soutenir suscite des interrogations. Qui l’a concoctée ? Á quelle fin ?
Une chose est certaine : leur soutien au Président sortant ne fait l’ombre d’aucun doute. Nombre de ces personnalités à qui la Mauritanie et les mauritaniens ont tout donné auraient dû se passer de cette publicité pour s’ériger en référence. Évidemment, pas celle de l’UPR en 2019. Le rôle revient à leur progéniture qui doit aller battre campagne. Certes le candidat Ghazwani peut, comme on le sait bien, se passer du soutien de plusieurs d’entre eux, puisqu’a priori, rien ne peut l’empêcher de passer haut la main au premier tour, le 29 juin. Il tient tous les atouts. C’est connu : ne sommes-nous pas, comme le dit Mamane, au Gondwana ?
Dalay Lam
le Calame