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Et si Ghazouani avait raison ?

Et si Ghazouani avait raison ?  Le 9 juillet 2025, à la Maison Blanche, lors d’un déjeuner organisé par le président Donald Trump avec cinq chefs d’État africains, le président mauritanien Mohamed Ould Ghazouani a prononcé une phrase qui a rapidement enflammé les réseaux sociaux et l’opinion publique mauritanienne : « La Mauritanie est un petit pays, démographiquement, et aussi en termes d’influence. Mais nous n’avons aucun complexe à ce sujet. »

Cette déclaration, jugée choquante ou dévalorisante par certains citoyens, a suscité une vague de critiques, certains y voyant un manque de patriotisme, voire une forme de soumission à l’ordre international. Et si cette phrase, au contraire, traduisait une lucidité politique salutaire ? Et si Ghazouani, par ces mots, avait simplement dit une vérité que nous refusons trop souvent d’entendre ?

Il faut commencer par rappeler le sens exact des mots du président. Il n’a pas dit que la Mauritanie est insignifiante ou condamnée à rester en marge. Il a parlé de « petit pays » au regard de la démographie et de l’influence, sans aucun complexe.

Oui, la Mauritanie compte à peine cinq millions d’habitants. Elle ne pèse pas lourd dans les instances internationales, et ses capacités économiques et diplomatiques sont limitées. C’est un constat objectif, pas une insulte.

Reconnaître sa position réelle dans le concert des nations, ce n’est pas s’agenouiller. C’est partir d’un diagnostic honnête pour mieux définir ses priorités. L’histoire regorge de pays dits « petits » qui, par la qualité de leur gouvernance, leur diplomatie ou leur investissement dans l’humain, ont su devenir des modèles ou des puissances régionales : le Rwanda, le Quatar, la Corée du Sud, Singapour, etc.

Ce qu’a fait Ghazouani à Washington, c’est assumer un réalisme stratégique. Face à des partenaires qui attendent des interlocuteurs crédibles, mieux vaut afficher sa réalité que jouer un rôle. L’humilité n’est pas un défaut diplomatique. C’est parfois la meilleure arme.

Il ne faut pas confondre « petit » et « sans potentiel ». La Mauritanie, par sa position géographique stratégique entre Maghreb et Afrique subsaharienne, son ouverture sur l’Atlantique, et ses vastes ressources naturelles (minerai de fer, gaz, halieutique, peut-être terres rares), possède de véritables leviers de puissance.

Et c’est peut-être là l’un des messages les plus forts que cette polémique révèle : être un grand pays ne se décrète pas. Cela se construit.

Avec du travail, de l’unité, de la vision et surtout un profond changement dans les mentalités. Tant que l’on confondra la fierté nationale avec le refus de l’autocritique, tant qu’on criera « nous sommes un grand pays » sans poser les fondations de cette grandeur, nous tournerons en rond.

Et si Ghazouani avait eu raison ? Oui, la Mauritanie est aujourd’hui un petit pays, au sens statistique et diplomatique. Mais elle peut devenir un grand pays. Pas par un slogan, pas par une posture, mais par des choix. Et surtout par une révolution dans les mentalités : oser se regarder en face, oser se dire la vérité, et oser changer.

C’est là, et là seulement, que commence la grandeur.

Ciré Hamidou Kane Sociologue

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