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Dialogue inclusif : sans Biram, sans débat ?

Le dialogue national se veut inclusif… mais sans Biram Dah Abeid. Peut-on encore parler de démocratie sans les voix qui dérangent ?

Ah, le « dialogue national inclusif » ! Cette belle trouvaille linguistique, toute en promesse républicaine, en grande table ronde et en thé à la menthe partagé entre frères ennemis du débat public au rythme de la Tidinit. Un moment solennel censé rassembler toute la Mauritanie — la vraie, celle qui parle fort, proteste, conteste, rêve d’égalité, et parfois même vote à contre-courant. Bref, toute la Mauritanie. Ou presque.

Parce qu’il y a toujours un petit astérisque à ces grands élans de concertation. Et cette année, l’astérisque s’appelle Biram Dah Abeid. Oui, lui, l’homme au verbe volcanique, le poing levé contre l’esclavage et l’injustice, la tête bien visible dans les cortèges et les urnes. Et surtout, l’épine dans le pied de toutes les majorités confortables.

Or, surprise : de dialogue inclusif, il est bien question, mais sans Biram. Une inclusion version club VIP, où l’on choisit ses contradicteurs sur catalogue, de préférence en format « constructif » et « approuvé par le palais ». Ce qui pose une question simple : peut-on encore appeler cela un dialogue, quand on a préalablement baillonné une des voix les plus critiques du système ?

Certains y verront une manœuvre de la majorité, façon “silence, on dialogue”. D’autres pointeront le refus de Biram de jouer dans une pièce dont il n’a pas écrit le scénario. Dans tous les cas, le spectacle a un air de comédie, et ce n’est pas Molière qui le dirait, mais Machiavel.

Le gouvernement, qui se veut bâtisseur de ponts et soudeur de fractures, prend là un sacré risque de crédibilité. Car un dialogue sans tous les protagonistes, c’est un peu comme un thé sans la menthe : ça a l’air moins excitant, et ça manque franchement de goût et d’honnêteté. Et surtout, ça ne cale personne.

Alors, à ceux qui pilotent ce grand chantier d’écoute nationale, un petit rappel de bon sens : dialoguer avec ses amis, c’est facile. Avec ses adversaires, c’est démocratique.

Sinon, on peut toujours rebaptiser l’événement : « Rencontre inclusive entre personnes d’accord entre elles ». C’est plus honnête. Moins vendeur, certes. Mais terriblement fidèle à la réalité.

AOB

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