Dialogue à venir : réforme significative ou poursuite de la crise ?
Dialogue à venir : réforme significative ou poursuite de la crise ?
Notre pays traverse une période politique particulièrement complexe, où les promesses de stabilité et d’apaisement s’effacent face à une réalité sombre marquée par un blocus politique, économique, social et sécuritaire qui menace les piliers de la gouvernance. Pendant ce temps, l’opposition souffre de fortes divisions, tandis que les tensions au sein de la société s’intensifient. La criminalité organisée se renforce et la crise migratoire s’aggrave, amplifiée par la corruption et le népotisme. Tous ces éléments témoignent d’une crise de gouvernance profonde, exacerbée par des défis internes et externes croissants, plaçant le pays à un tournant décisif pour son avenir.
Dans ce contexte de crises internes, l’isolement régional et international du pays s’accentue, à l’exception de quelques relations dominées par des intérêts politiques et économiques étrangers. Alors que notre pays peine à devenir un acteur régional influent, les pays voisins et les grandes puissances profitent de cette situation pour accroître leur influence. Le Maroc, l’Algérie et le Sénégal renforcent leurs positions diplomatiques, économiques et militaires, tandis que le Mali, le Niger et le Burkina Faso s’unissent autour d’une nouvelle vision régionale, exerçant une pression supplémentaire sur notre pays et compliquant le paysage politique, économique et sécuritaire.
Cette situation affecte la sécurité et la stabilité internes, alors que les groupes armés et les réseaux de contrebande s’intensifient dans les régions frontalières et que les flux de déplacements et d’immigration irrégulière augmentent, alimentant le mécontentement des pays concernés vis-à-vis des actions des autorités. Sur le plan interne, une grande partie de la population vit encore en dessous du seuil de pauvreté, en raison de politiques gouvernementales limitées qui reposent sur l’assistance sociale et des interventions temporaires, sans solutions durables.
L’économie nationale dépend des industries minières et des prêts étrangers, ce qui accentue sa vulnérabilité et favorise la corruption et le manque de transparence. Le chômage dépasse 30 %, et plus de 85 % de la main-d’œuvre est employée dans des emplois précaires, sans sécurité sociale, dans des secteurs fondamentaux en déclin comme la santé, l’éducation et les services publics.
En outre, le pays est confronté à des problèmes sociaux profonds, exacerbés par les effets persistants de l’esclavage sous diverses formes, ainsi que par des questions relatives aux droits de l’homme, au patrimoine humain et à l’autonomisation des groupes vulnérables. Ces problématiques constituent un obstacle à l’intégration nationale et à l’édification d’une société cohésive.
Dans ce cadre, la proposition d’un dialogue national a été perçue comme une opportunité de sortir de la crise, mais elle a manqué de transparence et de sérieux dès le départ. L’invitation lancée lors de l’Iftar au palais présidentiel reflète davantage une initiative personnelle du président qu’une réponse à un besoin national urgent. De plus, confier la coordination du dialogue à une personnalité systématique et établir à l’avance une liste des participants sans consultation préliminaire témoigne d’une volonté de contrôler le processus et ses résultats.
Malgré ces réserves, le dialogue national demeure un outil essentiel pour favoriser l’harmonie nationale, à condition qu’il soit mené de manière sérieuse et inclusive. L’absence de dialogue conduirait à la poursuite de l’incarcération politique, renforçant la vulnérabilité des institutions, consolidant les fractures au sein de la société et laissant place à une montée des tensions sociales et politiques.
Tout dialogue, s’il est mené avec transparence et implique réellement toutes les parties prenantes, peut aboutir à des réformes fondamentales visant à promouvoir l’unité nationale, à consolider le processus démocratique et à améliorer la situation globale du pays.
Cheikh Haida
