Ségou, Tombouctou, Nioro, Sikasso, Diéma, Mopti : Plus de 50% des terroirs maliens sous couvre-feu
Plus de 50 % du Mali sous couvre-feu : une réponse sécuritaire face à la montée des attaques, au prix d’un lourd impact sur la vie économique et sociale.
Ségou, Tombouctou, Nioro, Sikasso, Diéma, Mopti : Plus de 50% des terroirs maliens sous couvre-feu
En une semaine, la pression du JNIM poussent les autorités maliennes à revenir à la case-départ en mettant plusieurs régions concernées aux restrictions de circulation. Plus de 664 216 km2 dont une population 11 073 189 habitants sont en difficulté. Depuis début juin, les autorités administratives de plusieurs régions du Mali ont instauré des couvre-feux nocturnes, sur fond d’attaques armées récurrentes contre les forces de défense et de sécurité. Du nord au sud, en passant par le centre et l’ouest, ces restrictions concernent désormais plus de la moitié des régions du pays.
À Tombouctou, déjà sous couvre-feu depuis 2023, les horaires ont été révisés à la suite d’une attaque contre le camp militaire Fort Cheick Sidi Békaye et l’aéroport, survenue le 2 juin. La circulation y est désormais interdite de 21 heures à 6 heures du matin. Une décision similaire a été prise dans la région de Ségou, où un couvre-feu renouvelable de 30 jours est en vigueur depuis le 5 juin.
Le retour à l’ère des couvre-feux intenables
À l’ouest, dans la région de Nioro, les localités de Diéma, Sandaré et Nioro-même sont aussi soumises à une interdiction de circuler entre 20 heures et 6 heures. Sikasso, au sud du pays, n’est pas en reste : le gouverneur a décrété un couvre-feu généralisé dans toute la région à compter du 6 juin, de 22 h à 6 h 30, sans limite de durée.
Ces mesures font suite à une série d’attaques survenues entre le 30 mai et le 5 juin, ayant visé à la fois les militaires et les populations civiles dans les régions de Mopti, Koulikoro et Tombouctou. À Dioura, dans le centre, sept civils ont été tués dans une embuscade, tandis qu’une position de l’armée a été attaquée le même jour près de Boulkessi.
À Ségou, où vivent plus de 3,5 millions de personnes, la mesure est « presque » contestée. Certaines localités sont déjà sous blocus, rendant les déplacements difficiles et les approvisionnements incertains. Le couvre-feu vient alourdir un climat déjà tendu. Cela ralentit toute activité économique et complique l’accès aux soins.
Les activités économiques désormais au ralenti
Il serait plus pertinent d’impliquer davantage les communautés locales, plutôt que de recourir à des restrictions qui, selon ses mots, « pèsent sur ceux qu’on cherche à protéger ». Cette critique est partagée par plusieurs observateurs, qui rappellent que le commerce de nuit, les transports ou les urgences médicales sont autant de services vitaux désormais perturbés.
Les autorités, elles, défendent ces décisions comme des réponses adaptées à une menace réelle. À Ségou, le gouvernorat insiste sur la vocation préventive du couvre-feu et sur les dispositifs de contrôle qui l’accompagnent : patrouilles mixtes, points de surveillance et coordination entre services de sécurité. Des mesures similaires sont en cours de mise en œuvre dans d’autres zones jugées à risque.
Des frontières poreuses et une insécurité qui ronge
La région de Kayes, aux portes du Sénégal et de la Mauritanie, devient également un point de vigilance. À Nioro, à Diéma et dans les environs, des mouvements suspects ont été signalés. La proximité des frontières soulève des préoccupations, d’autant que ces zones étaient jusque-là relativement épargnées. L’extension des couvre-feux traduit une évolution de la cartographie de l’insécurité au Mali. Alors que les violences étaient concentrées au nord et au centre, d’autres zones, comme Dioïla ou Sikasso, font désormais face à des menaces similaires. Dans plusieurs cas, les axes routiers ont été coupés, isolant des villages entiers.
Les autorités maliennes adoptent une approche de plus en plus territorialisée dans leur réponse : chaque gouvernorat prend des mesures en fonction de l’évolution locale de la situation, souvent en lien étroit avec les forces armées. Mais la multiplication des arrêtés régionaux illustre aussi les limites d’un appareil sécuritaire contraint de réagir dans l’urgence.
Dans un pays où la présence de l’État demeure inégale, notamment en zone rurale, ces décisions posent la question de leur efficacité dans la durée. À défaut de réformes plus structurelles ou d’un retour progressif de l’administration dans les zones délaissées, les restrictions de circulation, bien que nécessaires pour limiter certains risques, pourraient aussi accroître la défiance des populations. Le recours élargi au couvre-feu au Mali reflète la pression croissante que fait peser l’insécurité sur les régions autrefois épargnées.
Source: abidjantv