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Le coup d’État contre Maaouiya

Coup d'État en Mauritanie : découvrez les coulisses de la chute du président Maaouiya Ould Taya, les tensions militaires, et l’ascension stratégique de Mohamed Ould Abdel Aziz.

À travers une série de tensions politiques et militaires, la Mauritanie a connu l’un des épisodes les plus marquants de son histoire contemporaine : le renversement du président Maaouiya Ould Taya. Ce récit détaillé de Cheikh Melainine Teiss lève le voile sur les stratégies internes, les rivalités au sein de l’armée et le rôle déterminant joué par le colonel Mohamed Ould Abdel Aziz.

Après plusieurs tentatives de coup d’État infructueuses contre le président Maaouiya, cet homme a cherché à sécuriser son régime en réorganisant le déploiement militaire dans la capitale. Ainsi, les Bataillons blindés ont été transférés à la ville d’Aleg, tandis que la région dirigée par Ould Vaida est restée près de la capitale en tant que force de soutien, en concentrant la majeure partie de la force militaire entre les mains de la garde présidentielle, en raison de la confiance absolue placée en sa direction, compte tenu de son rôle dans la lutte contre la tentative de coup d’État des « chevaliers du changement ». Ces mesures ont préparé le terrain, plus tard, pour le coup d’État sans effusion de sang qui a eu lieu par la suite.

À la fin du mandat du président Ould Taya, selon certaines personnes qui étaient en contact avec lui, l’homme était excessivement nerveux et ne tolérait ni conseils ni orientations de quiconque. Le colonel Mohamed Ould Abdel Aziz était à la tête de la garde présidentielle, et sa femme, Tekber Mint Ahmed, travaillait à la présidence au sein de la délégation des protocoles Mint Tolba. Un jour, Takber Mint Ahmed a été expulsée par la délégation avec de nombreuses « médisances », et lorsque Ould Abdel Aziz a tenté de régler le problème avec cette délégation, il a reçu des paroles encore plus dures que celles qu’avait entendues sa femme Tekber. Ould Abdel Aziz s’est alors tourné vers Maaouiya pour se plaindre, mais il a également été confronté au même discours. C’est ici que l’idée du coup d’État a germé dans l’esprit de l’homme.

La pression sur les institutions sécuritaires et de renseignement était forte, car il ne se passait presque pas de période sans que des éléments à l’intérieur de l’armée soient découverts comme étant affiliés aux « chevaliers du changement ». Cela a même conduit à la découverte d’un élément au sein de la garde présidentielle qui avait aidé les putschistes en 2003, restant en poste sans être découvert. Avant le coup d’État, le pays a connu une large campagne d’arrestations touchant divers segments politiques et sociaux, et la situation était tendue avec l’implication de certains pays. Les hommes de « l’État profond » craignaient un coup d’État « extérieur », ce qui pourrait avoir des conséquences désastreuses.

Ould Abdel Aziz planifiait le coup d’État contre Maaouiya pendant sa visite à Nema, un projet dont l’issue n’était pas garantie, car la garnison militaire présente, là-bas, pourrait s’opposer à cette tentative, et la force sous le contrôle d’Ould Vaïda constituerait un obstacle à cette initiative. Cependant, la chance a souri à l’homme et à ses compagnons lorsque Ould Taya est soudainement parti pour l’Arabie Saoudite pour présenter ses condoléances suite au décès du roi Fahd Ben Abdel Aziz. À ce moment-là, certains connaisseurs des coulisses de cette période affirment qu’Ould Abdel Aziz n’avait d’autres choix que de passer à l’action, car Ould Taya avait l’intention de le révoquer, avec certains officiers, et de le transférer dans le nord pour faire face aux groupes extrémistes là-bas.

Cette nuit-là, Ould Abdel Aziz a demandé à ses adjoints de convoquer tous les membres de la garde présidentielle hors service et d’élever le niveau d’alerte au maximum, ce qui était une procédure normale en l’absence du président et par crainte d’une autre tentative. Le matin, le colonel Mohamed Ould Abdel Aziz a rencontré ses adjoints au sein du quartier général de la brigade et leur a révélé, pour la première fois, ce qui le préoccupait depuis un certain temps : il avait décidé de renverser Maouiya et qu’ils n’étaient pas obligés de participer, mais qu’ils ne quitteraient pas le quartier général tant que le coup d’État ne serait pas terminé.

Après le succès du coup d’État contre Maaouiya, la première réunion s’est tenue au siège de l’état-major entre les chefs des régions militaires et le leader du coup d’État, le colonel Mohamed Ould Abdel Aziz. La réunion s’est déroulée en présence du colonel Ely Ould Mohamed Vall, qui portait son uniforme militaire.

La réunion a commencé par un discours du colonel Mohamed Ould Abdel Aziz sur les raisons ayant conduit au coup d’État et sur la situation difficile du pays. Il leur a dit : « Nous avons renversé Maaouiya pour les raisons que je vous ai exposées et, pour ma part, je propose de former un conseil militaire pour mener une phase de transition. Je propose personnellement que le colonel Ely Ould Mohamed Vall préside le conseil et dirige cette phase. » À ce stade, il était nécessaire de choisir le défunt Ely Ould Mohamed Vall pour convaincre le commandant adjoint de l’état-major, le colonel à la retraite Abderrahmane Ould Boubacer, le défunt colonel Sidi Mohamed Ould Cheikh Ould El Alem, et Mohamed Ould Mueguett… Des chefs des régions militaires qui avaient le plus de compréhension avec Ely, et qui étaient les plus anciens dans l’armée.

Les chefs ont unanimement approuvé cette proposition en raison du respect et de l’estime dont jouissait le défunt Ely au sein de l’institution militaire. Après la réunion, le défunt Ely s’est rendu au palais présidentiel, où il a rencontré la famille d’Ould Taya et les a rassurés, en disant à l’épouse de Maaouiya que tout ce dont elle avait besoin au palais était à sa disposition, tournant ainsi la page de cette période de l’histoire mauritanienne.

Avec la formation du conseil militaire et le colonel Ely Ould Mohamed Vall prenant le devant de la scène tant au niveau local qu’international, il y avait une certaine polarisation discrète parmi les leaders du conseil militaire. Le colonel Mohamed Ould Abdel Aziz se rendait quotidiennement au palais présidentiel, et certaines parties cherchaient à l’exclure de la scène.

Il y a une histoire qu’une personne en lien direct avec les événements de l’époque m’a racontée : un haut responsable de la sécurité envoyait des dépêches au colonel Ely Ould Mohamed Vall concernant les mouvements de Mohamed Ould Abdel Aziz, proposant un plan pour l’arrêter. Mais malheureusement pour ce responsable, ces rapports parvenaient au colonel Mohamed Ould Abdel Aziz, ce qui l’a conduit par la suite à punir ce responsable après avoir pris le pouvoir, en l’excluant des promotions que ses pairs ont obtenues jusqu’à sa retraite.

Mohamed Ould Abdel Aziz a reconnu le danger avec la popularité croissante du président Ely Ould Mohamed Vall et le soutien international sans précédent dont il bénéficiait, ce qui signifiait que ses plans futurs, pour accéder au pouvoir étaient en péril.

Au milieu de la période de transition, des discussions ont commencé sur la proposition de « bulletin blanc », ce qui signifie maintenir la présidence d’Ely Ould Mohamed Vall par le biais d’un vote populaire. Soudain, sans avertissement préalable, Ould Abdel Aziz a déplacé son bureau du palais présidentiel au siège du Basep, déclarant un état d’alerte maximale parmi les membres de la garde présidentielle, et tous les éléments de la garde ont été remplacés dans la cour du palais et aux entrées menant à celui-ci.

Avec l’avancement de la proposition du « projet de bulletin blanc » et l’augmentation de ses partisans, le colonel Mohamed Ould Abdel Aziz a contacté le président du conseil militaire, Ely Ould Mohamed Vall , et lui a demandé de mettre fin à ce débat immédiatement, en annonçant de manière claire que la transition prendrait fin à la date prévue, selon le parcours initialement annoncé. Le colonel Ely Ould Mohamed Vall était bien conscient des rapports de force au sein du conseil militaire, et il cherchait également à éviter un affrontement direct avec son cousin Mohamed Ould Abdel Aziz, ce qui a accéléré la résolution de la question du bulletin blanc. Ce conflit a fuité vers un spectre de l’élite politique cherchant à déclarer sa loyauté envers le plus fort, transformant ainsi le bureau du colonel Mohamed Ould Abdel Aziz en un lieu de rencontre pour les politiciens cherchant à le soutenir lors des prochaines échéances et à lui témoigner leur allégeance.

À l’approche des élections, le regretté Sidi Ould Cheikh Abdallahi a rendu visite à Ely dans son bureau dans le cadre de rencontres qu’il tenait avec diverses factions de la scène politique et sociale, et lui a demandé de l’aider à se présenter pour le poste de sénateur au sein du Sénat. Cependant, Ely Ould Mohamed Vall a proposé à Sidi de se présenter à la présidence et lui a demandé d’aller voir Aziz pour obtenir son soutien.

Par la suite, Ely Ould Mohamed Vall a contacté Aziz et lui a fait part de ce qui s’était passé entre lui et Sidi Ould Cheikh Abdallahi, en disant qu’il le considérait comme la personne adéquate pour occuper le poste et qu’il lui avait suggéré d’aller le voir pour en convenir. Aziz a accepté cela et a rencontré Sidi Ould Cheikh Abdallahi le lendemain dans les locaux de la brigade de la garde présidentielle. Ce qui a été principalement convenu lors de cette rencontre était que le conseil militaire soutiendrait la candidature de Sidi Ould Cheikh Abdallahi à la présidence, en contrepartie de quoi Sidi exercerait ses prérogatives en tant que président dans les domaines politiques et économiques, tandis qu’Aziz et ses camarades prendraient en charge les affaires sécuritaires et militaires, en préparation d’une restructuration et d’un armement de l’armée pour faire face aux menaces des groupes terroristes.

Après cet accord, le président Ely Ould Mohamed Vall a réalisé que le tapis avait été retiré sous ses pieds, littéralement (arrêter soudainement d’aider et de soutenir quelqu’un) ce qui l’a poussé à soutenir le candidat concurrent…

À suivre…

Cheikh Melainine Teiss (Facebook)

Traduit par Ahmed Ould Bettar
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