Conseil des ministres : transparence, autonomisation et développement rural au cœur des priorités gouvernementales
Le gouvernement met l’accent sur la bonne gouvernance, l’élevage et l’autonomisation des femmes lors du dernier Conseil des ministres.
Nouakchott, 16 octobre 2025 — Comme à l’accoutumée, le gouvernement mauritanien a commenté, mercredi soir, les conclusions du Conseil des ministres tenu dans la matinée sous la présidence de Son Excellence M. Mohamed Ould Cheikh El Ghazouani. Trois membres du gouvernement ont pris la parole : la ministre de l’Action sociale, de l’Enfance et de la Famille, Mme Savia Mint N’Tahah, le ministre de la Formation professionnelle, de l’Artisanat et des Métiers, M. Mohamed Maelainine Ould Eyih, porte-parole par intérim du gouvernement et le ministre de l’Élevage, M. Sid’Ahmed Ould Mohamed.
L’exercice, devenu un rituel de communication gouvernementale, s’inscrivait dans une logique de transparence et de pédagogie vis-à-vis du public sur les décisions exécutives.
Élevage : un secteur en mutation entre tradition et modernité
Le ministre de l’Élevage, M. Sid’Ahmed Ould Mohamed, a présenté un état des lieux approfondi d’un secteur qui demeure l’un des piliers de l’économie nationale. L’élevage, activité à la fois économique, sociale et culturelle, contribue de manière significative au PIB, à l’emploi et à la sécurité alimentaire du pays.
Le ministre a souligné la nécessité d’un équilibre entre l’élevage traditionnel – ancré dans la transhumance et les modes de vie pastoraux – et l’élevage intensif, qualifié de « semi-industriel », plus productif et plus apte à répondre aux exigences du marché.
Selon lui, le gouvernement entend transformer ce secteur en un véritable levier de croissance, en poursuivant les efforts engagés depuis 2021. Une stratégie nationale devrait voir le jour, articulée autour de plusieurs piliers :
- le renforcement des ressources humaines,
- la mise en œuvre d’un programme d’urgence pour développer le bassin laitier de Néma,
- et l’octroi de facilités aux investisseurs engagés dans les filières animales et la transformation laitière.
Cette stratégie vise à faire émerger une économie rurale plus résiliente et mieux intégrée dans la chaîne de valeur nationale.
Lors de son intervention, le ministre est également revenu sur sa récente tournée à l’intérieur du pays, centrée sur la prévention des feux de brousse, un fléau récurrent en fin d’hivernage. « Chaque année, ces incendies détruisent des milliers d’hectares de pâturages et entraînent des pertes économiques considérables », a-t-il rappelé, insistant sur la nécessité d’une vigilance communautaire accrue.
Concernant la fièvre de la vallée du Rift, maladie virale endémique dans certaines zones, le ministre a rassuré que « les dispositifs de surveillance sont en place » et que les services vétérinaires disposent des moyens nécessaires pour en contenir la propagation.
Autonomisation féminine : du soutien social à l’investissement productif
Pour sa part, la ministre de l’Action sociale, de l’Enfance et de la Famille, Mme Savia Mint N’Tahah, a dévoilé les grandes lignes du Programme national d’autonomisation des femmes, un projet phare inscrit dans la vision présidentielle « Mon ambition pour la patrie ».
Ce programme entend transformer le soutien social en financements productifs et durables, capables de générer des emplois et de renforcer l’inclusion économique des femmes sur l’ensemble du territoire.
L’objectif est ambitieux : créer plus de 10 000 opportunités de revenus et accroître de 35 % l’accès des femmes aux financements productifs d’ici trois ans.
Pour ce faire, une enveloppe initiale de 200 millions d’ouguiyas (MRO) est prévue, avec une montée en puissance du budget à 1,5 milliard d’ouguiyas en 2026.
La ministre a rappelé que, malgré la mise en œuvre de programmes de soutien aux coopératives féminines entre 2019 et 2024, les retombées économiques sont restées limitées, en raison notamment du faible accès au crédit et du manque de garanties dans les zones rurales.
D’où la nécessité, selon elle, de lier autonomisation économique et rentabilité, tout en instaurant une évaluation numérique des performances et un suivi rigoureux des résultats.
Mme Savia Mint N’Tahah a également évoqué les progrès réalisés dans l’enseignement préscolaire, un autre volet de l’action sociale. Entre 2022 et 2025, 45 000 enfants ont été intégrés au système éducatif, tandis qu’un personnel qualifié a été formé pour encadrer cette dynamique. Elle a toutefois reconnu que près de 200 000 enfants restent encore en dehors du circuit, un défi majeur pour les années à venir.
Bonne gouvernance : la Cour des comptes au cœur du débat
Le porte-parole par intérim du gouvernement, M. Mohamed Maalainine Ould Eyih, est revenu sur la publication récente du rapport de la Cour des Comptes, saluant une démarche qui s’inscrit dans le renforcement de la transparence et de la reddition des comptes.
Il a souligné que la lutte contre la corruption constitue un axe central du programme présidentiel, et que la création d’institutions dédiées à la gouvernance financière et administrative traduit une volonté politique claire.
Le rapport, remis au Président de la République puis rendu public par la Cour, marque une étape supplémentaire dans la normalisation du contrôle citoyen sur la gestion publique.
Le porte-parole a précisé que les pouvoirs exécutif et judiciaire sont distincts, et que chacun agira dans le respect de ses prérogatives :
- les fautes graves relèvent de la justice,
- les erreurs de gestion seront traitées par les ministères concernés.
Sur instruction du Chef de l’État, les départements cités devront présenter des plans d’action correctifs et des mesures concrètes pour situer les responsabilités et éviter la répétition des dysfonctionnements.
Analyse : entre ambition socio-économique et exigence de gouvernance
La conférence de presse de mercredi soir illustre la double dynamique qui structure aujourd’hui l’action gouvernementale : accélérer les réformes économiques et sociales tout en consolidant la transparence institutionnelle.
La Mauritanie semble s’engager dans une approche plus systémique du développement, où les initiatives locales — qu’il s’agisse de l’élevage, de l’entrepreneuriat féminin ou de la gestion des deniers publics — s’articulent désormais autour d’une vision nationale plus cohérente.
L’équilibre reste cependant fragile : les ambitions affichées nécessitent des moyens, une coordination intersectorielle rigoureuse et un suivi continu des impacts. La réussite dépendra autant de la mobilisation administrative que de la participation citoyenne.
Rapide info