Ce qu’on a pensé des appels à la démission du Chef de l’Etat

Ce qu’on a pensé des appels à la démission du Chef de l’Etat

Ould Ghazouani
Ould Ghazouani

A l’issue d’un débat, à bâtons rompus, avec quelques amis, voici, très rapidement, ce qu’on a pensé des appels à la démission de Ould Ghazouani :

Ghazouani a été élu, qu’on le veuille ou pas. Il a 5 ans pour mettre en œuvre son programme. Or, là, il n’est même pas à mi-mandat.

Il se trouve qu’il fait partie d’un régime, depuis 15 ans, au second plan ou au premier plan et que tous ceux qu’il connaît et sur qui, il compte, sont à 90% issus de ces régimes qui ont ruiné ce pays, depuis 30 ans. Humainement, il lui est difficile de sortir de ce cadre.

Il se trouve que par tempérament, c’est quelqu’un de très calme et donc très lent à réagir.

Il se trouve qu’il y a un ras-le-bol généralisé et une colère qui couve contre l’inefficacité de ses gouvernements et, plus spécifiquement, ces dernières temps, contre la situation sécuritaire qui se dégrade dangereusement.

Il se trouve que les attentes des populations sont très fortes et très pressantes et ne peuvent s’accommoder de tant de lenteur.

Il se trouve que la majorité des mesures prises par ses différents gouvernements ne sont pas suffisantes et ne répondent pas aux aspirations des citoyens.

Dans ces conditions, qu’est ce qu’on peut faire ?

En appeler à sa démission ?

En appeler à sa démission est révélateur d’une perte d’espoir des populations devant la lenteur, l’inefficacité et l’inaction du gouvernement. C’est clair que les citoyens déchantent et perdent espoir.

Le mot d’ordre « démission » vient aussi du fait qu’il n’y a pas de vie politique dans notre pays. C’est une situation inédite et surréaliste. Il n’y a pas d’opposition qui joue le jeu. Cette opposition aurait pu mettre en question l’inefficacité du gouvernement, au niveau du parlement, des médias et de l’opinion.

Comme l’opposition a déserté le combat politique et que, tout simplement, elle n’existe plus, son absence ouvre la voie à toutes ces demandes de démission du chef de l’Etat. En réalité, les blogueurs, les citoyens, la rue jouent le rôle de l’opposition. Et, contrairement aux politiques, la rue n’est pas nécessairement mesurée.

On peut considérer que Ould Ghazouani est lent, qu’il ne produit pas de résultats, qu’il n’a pas fait de rupture, ni avec roumouz el vessad ni avec les pratiques corruptives, que son gouvernement est inefficace, sans vision stratégique et sans projet de société, qu’il n’a pas engagé les grandes réformes attendues, que les élites qui l’entourent sont, en partie, incompétentes, novices ou corrompues…mais, de là à tirer des conclusions qu’il a échoué et qu’il doit démissionner, avant la fin de sa deuxième année de mandat, c’est un peu impatient, précipité et ce n’est pas légitime.

On peut toujours appeler à la démission du chef de l’Etat, mais il faut faire attention à ne pas créer des précédents qui voudraient qu’après deux ou trois ans, on se met à changer de régime. C’est complètement déstabilisateur et un éternel recommencement.

Ceux qui considèrent que Ould Ghazouani est un chef d’Etat faible, doivent comprendre qu’en demandant sa démission, ils contribuent à l’affaiblir davantage.

Et pourquoi ces demandes de démission n’ont jamais été formulées pendant le règne de Ould Abd El Aziz, un petit dictateur, qui a saigné à blanc le pays et qui a piétiné ses valeurs et méprisé ses Hommes ? Est-ce qu’en demandant la démission d’un président, perçu, à tort ou à raison, comme faible, ne traduit pas, quelque part, une prédilection culturelle pour le despotisme et un appel au retour de la dictature ?

La démission n’est pas la solution. La solution, c’est une rupture radicale avec les symboles d’el vessad, l’engagement de mesures courageuses et un dialogue avec l’ensemble des forces politiques et sociales, pour échanger les points de vue, proposer des solutions et, peut-être, travailler ensemble. Le temps est compté, Monsieur le Président de la République.

Mohamed El Mounir

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