Accès à l’eau potable en Mauritanie : progrès notables mais défis persistants en milieu rural
Malgré des projets soutenus par la BAD, l’AFD et des ONG comme ADRA et UNICEF, près de 40 % des ruraux mauritaniens n’ont toujours pas accès à une eau potable fiable. Un enjeu crucial dans un pays en proie à l’aridité et au changement climatique.
Accès à l’eau potable en Mauritanie : Contexte général et enjeux actuels
La Mauritanie est l’un des pays les plus arides au monde. Moins de 12 % des prélèvements d’eau servent l’alimentation humaine, tandis que l’agriculture absorbe plus de 75 % des ressources disponibles (الصحراء). Cela rend l’accès à l’eau potable en zone rurale particulièrement difficile, un défi aggravé par le changement climatique et la salinisation des ressources hydriques (unicef.org, WATHI).
Données quantitatives
Taux d’accès à l’eau potable
- En 2015, le taux de desserte en eau potable était de 43 % au niveau national, avec seulement 9 % en zones rurales disposant d’un système d’assainissement amélioré (WATHI).
- En 2019, le rapport mondial sur la mise en valeur des ressources en eau indiquait que 45 % des ruraux avaient accès à des services élémentaires d’eau potable, contre 86 % des urbains (الصحراء).
- Des projets plus récents révèlent que environ 40–42 % de la population rurale n’a toujours pas accès à une eau potable fiable, malgré des efforts de développement (adra.be, adra.be).
État des infrastructures
- Plus de 1 750 localités sur les 3 270 de plus de 150 habitants ne disposent pas de points d’eau aux normes. Ce chiffre pourrait atteindre 2 460 localités d’ici 2030 si aucune infrastructure n’est créée (WATHI).
- Une étude de 2012 a constaté que 54 % des pompes manuelles étaient hors-service, soulignant un problème de durabilité des infrastructures (en.wikipedia.org).
Progrès récents : projets et impacts
Initiatives par la Banque Africaine de Développement (BAD) /PNISER
Le Projet national intégré pour le secteur de l’eau en milieu rural (PNISER), financé par la BAD, a permis depuis 2013 :
- 17 nouveaux forages, 34 réseaux d’adduction et plusieurs châteaux d’eau dans les régions de Brakna, Gorgol et Tagant,
- Bénéfice pour plus de 120 000 personnes, avec un accès « en abondance » à l’eau potable,
- 140 villages labelisés « FDAL » (Fin de la défécation à l’air libre),
- Coopératives de femmes maraîchères, accès à l’eau et sensibilisation à l’hygiène (afdb.org, wvi.org).
Projets Alliance Sahel / AFD / Banque mondiale
- Entre 12 et 44 millions d’euros/dollars ont été investis dans les Hodhs, Gorgol, Assaba et Guidimakha pour la construction/réhabilitation de réseaux, latrines scolaires et sanitaires, et appui institutionnel local (alliance-sahel.org).
- L’objectif : atteindre l’accès universel d’ici 2030.
Interventions d’ONG (ADRA, World Vision, UNICEF)
- ADRA Belgium, via des projets à Guidimakha (Garfa Peul et Alana), touche environ 42 % de la population rurale sans accès à l’eau potable. Ces projets incluent forage, château d’eau, bornes fontaines, et sensibilisation locale (adra.be).
- World Vision Mauritanie a mis en place le programme WASH (eau, hygiène, assainissement) dans plusieurs villages isolés, réduisant considérablement les trajets journaliers pour obtenir de l’eau potable et améliorant la santé grâce à la sensibilisation et aux latrines (wvi.org).
- UNICEF, de son côté, mentionne que 141 points d’eau solaires installés depuis 2018 ont profité à plus de 74 000 personnes. Dans le village de Gvava Peulh (Assaba), une technologie solaire de désalinisation a été mise en service en 2023, connectée à un autre forage en 2024 pour améliorer le débit (unicef.org).
Synthèse : progrès ou stagnation ? Ce qui progresse
- Développement d’infrastructures structurantes : forages solaires, châteaux d’eau, réseaux dans plusieurs régions rurales.
- Avantages socio-économiques : réduction du temps de collecte, amélioration de la sécurité sanitaire, autonomisation des femmes via le maraîchage.
- Efforts coordonnés entre État et partenaires internationaux, avec une stratégie nationale visée à l’horizon 2030 pour un accès universel à l’eau potable (WATHI, alliance-sahel.org, afdb.org).
Ce qui freine encore la progression
- Environ 40 % des ruraux n’ont toujours pas accès à une eau potable sûre, malgré les programmes.
- Taux de desserte rural encore faible, stagnation autour de 43–45 %.
- Infrastructures mal entretenues ou non durables : plus de la moitié des pompes hors-service.
- Écart significatif entre zones urbaines (86 %) et rurales (45 % ou moins) persistant (WATHI).
Conclusion et perspectives
L’accès à l’eau potable en milieu rural en Mauritanie affiche des progrès tangibles, notamment grâce aux projets des bailleurs internationaux (BAD, AFD, Alliance Sahel), à l’appui d’ONG et à un engagement national articulé autour de la stratégie 2030. Cependant, la stagnation des taux de couverture, les dysfonctionnements d’infrastructures, et la disparité persistante entre urbain et rural révèlent que les progrès restent fragiles et inégaux.
Pour que la Mauritanie transforme ces avancées en succès durable, il faudra :
- Renforcer la maintenance communautaire des installations (comités villageois),
- Accroître les investissements ciblés en zones rurales isolées,
- Poursuivre la coordination entre acteurs (État, ONG, bailleurs),
- Mettre l’accent sur la pérennisation institutionnelle et technique.
En somme : des progrès sont réels, mais fragiles, et l’avenir dépendra de la capacité à consolider les efforts engagés.
Sources principales :
- UNICEF Mauritanie, ADRA, World Vision;
- Banque Africaine de Développement / PNISER;
- Agence Française de Développement & Alliance Sahel;
- Stratégie nationale 2030 du Ministère de l’Hydraulique.