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Moscou multiplie ses offres de « services sécuritaires » en Afrique.

Moscou multiplie ses offres de « services sécuritaires » en Afrique.
Cette deuxième tournée africaine du ministre russe des Affaires étrangères, Sergueï Lavrov, en deux mois illustre la volonté de Moscou de pousser ses pions sur le continent. Et de préférence dans les ex-colonies françaises.
Publié dans LesEchos par Yves Bourdillon, le 10 févr. 2023 à 16:54Mis à jour le 10 févr. 2023 à 18:15.
Tout promettre et tenir peut-être. La tournée en Afrique du ministre russe des Affaires étrangères, Sergueï Lavrov, a été marquée par des engagements tous azimuts auprès des nouveaux amis de Moscou.

Jeudi, lors de sa dernière étape, au Soudan, le chef de la diplomatie russe s’est engagé à obtenir une levée des sanctions imposées par le Conseil de sécurité de l’ONU, il y a une vingtaine d’années, en raison du conflit du Darfour.

Le Soudan, grand pays d’Afrique de l’Est, parmi les plus pauvres du monde, est surtout privé d’aides et d’investissements occidentaux aujourd’hui en raison du coup d’Etat d’octobre 2021 , qui a mis fin aux espoirs de transition démocratique après la révolution de l’année précédente.

Zone d’influence de la France

Après celle effectuée en janvier en Erythrée, Angola et Afrique du Sud, cette tournée de Sergueï Lavrov illustre la volonté de Moscou de pousser ses pions partout en Afrique, de préférence dans les anciennes colonies françaises où le « soft power » de Paris semble en perte de vitesse. Le chef de la diplomatie russe a ainsi entamé, mardi dernier, sa visite par le Mali, qui a obtenu l’an dernier le départ des troupes françaises engagées depuis 2012 dans la lutte contre les djihadistes.

Lors d’entretiens que les deux parties ont qualifiés d’historiques, il avait promis l’aide de Moscou au colonel Assimi Goïta , chef d’une junte qui a rompu sa coopération militaire avec des Occidentaux ulcérés par un deuxième coup d’Etat en deux ans. Une assistance sous forme de livraisons d’armes, selon le colonel Goïta, qui a également rappelé les engagements russes d’assurer un approvisionnement régulier en céréales, engrais et hydrocarbures vers son pays.

« Nous allons apporter un soutien actif à ces efforts de nos amis africains, en partant du principe qu’ils ont intérêt à ce qu’on les assiste dans ce travail [la lutte contre les djihadistes, NDLR] », a répondu Sergueï Lavrov. Selon lui, Moscou a un rôle à jouer « en général dans la région sahélo-saharienne, et même les pays riverains du Golfe de Guinée ».

Défense du groupe Wagner

Le ministre russe en a profité pour défendre l’action du groupe Wagner, qui aiderait selon lui les pays où il est déployé à lutter contre les djihadistes. Les Occidentaux accusent de leur côté les mercenaires russes de se livrer à des exactions et piller des mines en échange de la protection rapprochée des dictateurs au pouvoir. Des centaines d’entre eux sont déployés au Mali depuis deux ans, sans résultats notoires face aux djihadistes.

Sergueï Lavrov s’est ensuite rendu au Burkina Faso, qui a exigé fin janvier le départ immédiat des 400 militaires français assistant Ouagadougou contre les terroristes. Ces derniers ont réussi une percée spectaculaire dans ce pays jadis calme, au point que le tiers du territoire n’est plus considéré comme sûr.

Le diplomate russe a ensuite fait des offres de services dans une autre ancienne colonie française : la Mauritanie. Dans des conditions un peu baroques, Nouakchott ayant voté les principales résolutions de l’ONU contre la Russie sur l’Ukraine. Pas de quoi s’en formaliser, a estimé Sergueï Lavrov. Son homologue mauritanien, Mohamed Salem Ould Marzouk, invoquait mercredi les « règles du droit international », tout en disant « comprendre » les préoccupations sécuritaires russes en Europe. Toutefois, on ne voit pas très bien quelle aide substantielle la Russie pourrait apporter à ce vaste pays désertique de 4,5 millions d’habitants, puisqu’il n’a plus connu d’attentat d’ampleur depuis 2011.

En dehors des questions sécuritaires, l’implication de la Russie en Afrique est modeste car son économie est peu complémentaire de celles de la plupart de ses pays, axées elles aussi sur les matières premières. La Russie ne figure ainsi pas parmi les vingt principaux investisseurs sur le continent.
Yves Bourdillon
Source: LesEchos

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