Accueil |Actualités Politiques en Mauritanie | Rapide InfoÉditoriaux

Mohamed Ould Cheikh El Ghazouani : portrait d’un président entre stabilité et critiques

Portrait nuancé de Mohamed Ould Cheikh El Ghazouani : entre justice sociale, stabilité sécuritaire et critiques sur la lenteur des réformes et les libertés publiques. Analyse par Ahmed Ould Bettar, directeur de Rapide Info.

Mohamed Ould Cheikh El Ghazouani : entre promesses sociales, stabilité politique et critiques persistantes

Par Ahmed Ould Bettar, Directeur de Rapide Info

Depuis son arrivée au pouvoir en 2019, Mohamed Ould Cheikh El Ghazouani s’impose comme un président à la fois discret et pragmatique. Contrairement à son prédécesseur Mohamed Ould Abdel Aziz, dont l’autoritarisme et l’omniprésence marquaient chaque instant de la vie politique, Ghazouani a choisi le registre du consensus et de l’apaisement. C’est là, sans doute, sa principale force. Mais cette posture, saluée par certains, est aussi jugée insuffisante par d’autres, qui lui reprochent un manque de vigueur dans les réformes et une lenteur dans la concrétisation des promesses sociales.

Un président soucieux de justice sociale

En observateur et journaliste, je vois en Ghazouani un homme profondément préoccupé par la lutte contre la pauvreté et les inégalités. Dès son premier mandat, il a mis en avant des politiques sociales : gratuité de l’enseignement primaire, extension de la couverture médicale, programmes d’aides pour les plus vulnérables. Ces initiatives traduisent une volonté réelle de sortir la Mauritanie du cercle vicieux de la misère et d’offrir une dignité nouvelle aux couches les plus défavorisées.

De plus, sur le plan institutionnel, son discours de lutte contre la corruption, réitéré avec force lors de sa réélection en 2024, donne un signal clair : celui d’un président qui aspire à bâtir un État de droit, plus transparent et plus juste.

La stabilité comme priorité

Dans une région sahélienne en proie aux convulsions sécuritaires, Ghazouani a réussi à préserver la Mauritanie de l’instabilité. Ancien chef d’état-major, il connaît intimement les enjeux militaires et sécuritaires. Sa stratégie de vigilance et de coopération régionale a permis au pays d’éviter les vagues de violences qui ont frappé ses voisins. Cette stabilité, bien que fragile, est un acquis précieux. Elle constitue le socle sur lequel repose toute ambition de développement.

Une diplomatie en quête de stature

Il est indéniable que sous Ghazouani, la Mauritanie cherche à s’affirmer davantage sur la scène internationale. Sa présidence tournante de l’Union africaine a été l’occasion de montrer un leadership modéré, mais non dénué d’ambition. Toutefois, cette visibilité n’est pas exempte de critiques : certaines de ses interventions, notamment à Washington, ont été jugées timorées, voire mal préparées. Là où certains voient une approche sobre et mesurée, d’autres dénoncent un déficit de charisme et de stratégie.

Les critiques : lenteur des réformes et déficit démocratique

Malgré ses efforts, Ghazouani n’échappe pas aux reproches. L’opposition et une partie de la société civile soulignent la lenteur des réformes structurelles et la persistance des inégalités. Si les intentions sont là, les résultats peinent parfois à se matérialiser dans la vie quotidienne des Mauritaniens.

La démocratie reste, elle aussi, une promesse inachevée. Les contestations post-électorales de 2024, marquées par des violences et des coupures d’internet, ont entaché son image d’homme du consensus. Nombreux sont ceux qui dénoncent un recul des libertés publiques et une gestion autoritaire de la contestation. Ces épisodes rappellent que le chemin vers une démocratie véritablement inclusive reste long et semé d’embûches.

Un président entre deux images

En définitive, Mohamed Ould Cheikh El Ghazouani oscille entre deux visages. Celui d’un président modéré, soucieux de justice sociale et garant de la stabilité nationale, que ses partisans -dont je suis- voient comme un bâtisseur patient et réfléchi. Mais aussi celui d’un chef d’État critiqué pour la lenteur de ses réformes, la timidité de sa diplomatie et les restrictions ponctuelles aux libertés publiques, que ses opposants dénoncent avec vigueur.

Ce double regard n’est pas contradictoire : il reflète la complexité d’un homme qui dirige un pays traversé par des défis immenses, entre héritage du passé, pressions régionales et attentes sociales colossales. Ghazouani est un président en équilibre, en quête d’une voie mauritanienne vers la modernité, encore fragile mais nécessaire.

Laisser un commentaire

Articles similaires