Ne laissons pas la Mauritanie devenir un simple couloir migratoire
Ne laissons pas la Mauritanie devenir un simple couloir migratoire : entre fermeté, humanité et vision, un plaidoyer pour une politique responsable.
À Rosso comme sur les côtes atlantiques, la pression migratoire met la Mauritanie face à un choix décisif : subir ou agir. Alors que les critiques s’accumulent, ceci est un plaidoyer pour une politique ferme mais équilibrée, qui protège les frontières sans renoncer à l’humanité.
Par Ahmed Ould Bettar
Couloir migratoire– Chaque soir, à Rosso, les embarcations franchissent le fleuve Sénégal dans un ballet devenu presque banal. Mais depuis quelques semaines, ce « bac de malheurs », comme l’appellent certains, est au centre d’un tumulte médiatique. Des centaines de migrants en situation irrégulière y ont été expulsés de Mauritanie, déclenchant un tollé sur les réseaux sociaux et des critiques de certaines ONG.
Pourtant, il faut avoir le courage de le dire : la Mauritanie n’a pas à rougir de vouloir reprendre le contrôle de ses frontières. Elle ne peut pas devenir le sas par lequel transitent, au gré des trafiquants, des milliers de personnes prêtes à risquer leur vie pour atteindre l’Europe. Laisser faire serait une démission de l’État, un abandon de responsabilité.
La fermeté est un devoir, pas une option
La Mauritanie est aujourd’hui l’un des principaux points de départ vers les Canaries. Et que voit-on sur cette route ? Des naufrages meurtriers, des familles décimées, des jeunes engloutis par l’océan. Ceux qui dénoncent les expulsions devraient aussi dénoncer les passeurs qui exploitent la misère humaine et transforment nos côtes en cimetière.
Contrôler, démanteler les réseaux, expulser ceux qui refusent la régularisation, ce n’est pas de la brutalité gratuite : c’est un acte de protection, pour notre pays mais aussi pour les migrants eux-mêmes. Une politique migratoire sans contrôle n’est pas humaniste : elle est complice de la tragédie.
Les critiques sont utiles, mais elles ne doivent pas nous paralyser
Oui, le Rapporteur spécial de l’ONU a mis le doigt sur des pratiques perfectibles : arrestations arbitraires, expulsions collectives, manque de garanties juridiques. Tant mieux ! C’est grâce à ce type de rapport que notre pays peut progresser.
Mais il a aussi salué les efforts de la Mauritanie : lois contre la traite, coopération avec l’OIM et le HCR, volonté de mieux protéger les plus vulnérables. Ces avancées doivent être poursuivies, pas caricaturées. Nous devons former davantage nos forces de l’ordre, garantir un examen individuel des situations, protéger les femmes et les enfants. Mais ne pas agir serait pire.
Pour une voie mauritanienne de la migration
Notre pays ne doit pas être le gendarme de l’Europe, il ne l’est pas d’ailleurs mais il est maître de son destin. Il nous faut inventer une politique migratoire équilibrée :
Fermeté, pour empêcher les filières de prospérer et protéger nos frontières.
Humanité, pour garantir le respect de la dignité des personnes et éviter les abus.
Vision, pour investir dans des voies légales de migration, dans le développement des régions frontalières et dans des alternatives à l’exil forcé.
En finir avec l’hypocrisie
Ceux qui nous reprochent nos expulsions ne nous proposent pas de solution. Faut-il laisser s’installer des camps de fortune, des ghettos de désespoir, au risque de déstabiliser nos villes et nos campagnes ? Faut-il accepter que des jeunes continuent de mourir dans l’océan, sans rien faire ?
La vérité, c’est que la Mauritanie a le droit – et le devoir – de dire non à l’anarchie migratoire. Et elle doit le faire avec courage, tout en écoutant les critiques constructives pour rendre sa politique plus juste.
Assumer pour protéger
La politique migratoire mauritanienne n’est pas parfaite, mais elle est nécessaire. Elle ne vise pas à rejeter l’étranger, mais à protéger les vies, à préserver la cohésion nationale et à empêcher les trafiquants de dicter la loi.
Il est temps d’assumer cette ligne avec fierté et de continuer à l’améliorer. Parce qu’une Mauritanie qui contrôle ses frontières est une Mauritanie qui protège ses citoyens… et qui donne une chance de survie à ceux qui, un jour, pourraient tenter la route de l’Atlantique.