Communauté nationale et particularismes communautaires : le cas mauritanien
Communauté nationale et particularismes communautaires : le cas mauritanien
La communauté nationale mauritanienne repose, en vertu de la Constitution, sur un socle clair : l’islam, la République et l’égalité de tous les citoyens. Ce socle doit primer sur toute allégeance secondaire.
Nos particularismes communautaires — ethniques, tribaux, linguistiques ou régionaux — représentent une richesse culturelle qu’il faut préserver et valoriser. Mais ils deviennent un danger lorsqu’ils sont détournés en instruments de clientélisme ou de sectarisme politique.
Malheureusement,depuis le déclenchement du processus démocratique dans les années 1990, l’influence communautaire a trop souvent pris le pas sur les critères de compétence et de probité. La responsabilité en incombe d’abord à ceux qui exercent ou ont exercé le pouvoir, en confiant la gestion des affaires publiques à des personnes choisies davantage pour leur poids communautaire que pour leurs capacités à contribuer à la consolidation de l’Etat national.
. Elle incombe aussi à la classe politique dans son ensemble, qui doit cesser d’instrumentaliser les divisions communautaires à des fins électoralistes et partisanes.
L’urgence est de mobiliser les citoyens autour d’attentes unitaires : justice sociale, services publics de qualité, développement économique équitable.
C’est à cette condition que la République se renforcera, tout en garantissant le droit à la différence culturelle, expression légitime de notre diversité.
La Mauritanie de demain ne pourra se construire que par la compétence, l’équité et la fidélité au projet national, et non par le clientélisme ni par la manipulation communautaire.
Abdel Kader ould Mohamed
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*INTERVIEW : ABDELKADER MOHAMED : « JE NE CROIS PAS À L’AVENIR POLITIQUE DU COMMUNAUTARISME EN MAURITANIE »* 11 JUILLET 2024
Abdelkader Mohamed, juriste de formation, ancien ministre et diplomate, est un passionné de l’analyse de l’actualité politique. Le Challenge lui a posé quelques questions sur les résultats des élections présidentielles 2024 et des forces politiques en présence. Décryptage…
*Quelles analyses faites-vous des résultats des élections présidentielles 2024 ?*
*Abdelkader Mohamed
Je pense que quoi qu’on dise, les résultats de l’élection présidentielle du 29 juin 2024 sont conformes aux prévisions.
Le Président sortant a été comme prévu élu grâce au soutien d’une majorité politique hétéroclite qui continue d’exercer une influence effective sur une bonne partie de l’électorat.
Le candidat Biram Dah Abeid a enregistré une remarquable avancée par rapport à 2019.
Les islamistes de Tawassoul ont prouvé qu’ils disposent d’un vrai parti au sens politique et institutionnel.
Les deux nouveaux candidats Maitre El Id et Pr Soumaré ont pu faire passer des messages intéressants pour leur avenir politique.
De toute manière, on ne le dira jamais assez, notre peuple est désormais habitué aux élections et notre système électoral est, de plus en plus performant. C’est le plus important pour l’avenir de la démocratie mauritanienne.
Il est, aussi, intéressant de constater que tous les candidats ont très vite reconnu les résultats à l’exception de M. Biram lequel a contesté sans pour autant faire un recours, ne serait-ce que pour exprimer sa foi dans la légalité.
Sur ce point l’histoire des multiples compétitions électorales qui se sont déroulées dans notre pays, nous enseigne que les mauvais perdants ont, comme les absents, toujours tort.
*Quel avenir pour l’opposition historique, notamment pour ses deux principaux partis (RFD et APP) qui se sont rangés du côté du pouvoir pour soutenir activement la candidature pour un second mandat du président Ghazouani ?*
*AKM
Tout indique que l’opposition historique (RFD et APP) est en train de se dissoudre dans la nouvelle majorité qui se dessine et, en tout cas, de se disloquer.
Les récalcitrants de cette opposition historique iront, du moins en partie, renforcer la nouvelle opposition qui se trouve être fragmentée et qui demande à être reconstruite sur de nouvelles bases…
*Le basculement de l’opposition démocratique traditionnelle du côté du pouvoir ne va-t-il pas encourager l’extrémisme à teinte communautariste à s’emparer de cet espace politique déserté, quand on sait que la nature a horreur du vide ?*
*AKM
Je ne crois pas à l’avenir politique du communautarisme, en Mauritanie.
Le gouvernement en Mauritanie, comme, d’ailleurs les partis politiques doivent, nécessairement, représenter, dans leurs structures, les différentes composantes du peuple mauritanien.
D’ailleurs, je pense que M. Biram qui est censé, actuellement, incarner » l’alternance » à ce qu’il appelle » le système » l’a bien compris. C’est pourquoi, il a cherché dans son discours de campagne à attirer les adhésions dans toutes les communautés.
*Pensez-vous que le Président de la République va opter pour un gouvernement d’union nationale ou, au moins, à son élargissement aux nouvelles forces politiques qui l’ont soutenu ?*
*AKM Je pense que le terme gouvernement d’union nationale n’est pas approprié pour un système démocratique lequel implique, forcément, l’existence d’une majorité qui gouverne et d’une opposition qui critique ou conteste, légalement, l’action du gouvernement tout en aspirant à gouverner.
Cela dit, une lecture objective des résultats de l’élection présidentielle du 29 juin 2024, conduirait, à mon avis, logiquement, le Président de la République à essayer de ratisser large dans la formation de son prochain gouvernement et à chercher des compétences qui seraient en mesure d’appliquer son ambitieux programme afin de répondre aux attentes de tous les Mauritaniens.
Certes il dispose d’une majorité, mais au vu des résultats de l’élection présidentielle du 29 juin 2024, le mécontentement d’une partie du peuple, surtout en milieu urbain, est bien visible. Par conséquent, je pense que son Excellence le Président de la République Monsieur Mohamed Ould Cheikh El Ghazouani lequel s’est distingué par son attachement au consensus politique et à l’apaisement social, en tiendra compte.
*Propos recueillis par Ahmed Ould Soueidi*