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L’élève de Boumdeid : quand le président choisit son ombre, et non son successeur

La succession du président mauritanien s'annonce houleuse : entre loyautés tribales, État profond et luttes internes, l'ombre l’emporte sur la légitimité.

Alors que la Mauritanie s’approche d’un tournant politique majeur, le président Ghazouani semble privilégier la fidélité personnelle à l’intérêt national, en misant sur un successeur de l’ombre : son fidèle ministre de l’Intérieur. Mais dans un pays traversé par de profondes fractures, cette stratégie pourrait précipiter la crise au lieu de l’éviter.

La situation politique actuelle du pays est sans doute la plus complexe depuis sa création. Pour la première fois, la Mauritanie se trouve au sein d’un environnement régional où les frontières changent, les États se fragmentent et les anciennes alliances sont redéfinies. Au cœur de ce séisme géopolitique, le régime au pouvoir, dirigé par un président dont l’État profond – qui n’apprécie pas les déclinants – sait qu’il sera inévitablement remplacé d’ici 2029, une réalité que les centres de pouvoir n’ont pas connue depuis plus de cinquante ans.

Chaque jour, l’équation du « départ en toute sécurité » se complique, ses fils s’emmêlent et la lutte pour le « poste de successeur » s’intensifie au sein des ailes du régime, chaque partie se battant pour sa survie. En tête de cette course acharnée, le nom de Mohamed Ahmed Ould Mohamed Lemine, ministre de l’Intérieur, se distingue comme le candidat le plus susceptible de succéder à « Cheikh Boumdeid ». Homme de fermeté aux yeux de ses partisans, homme de répression et de violence aux yeux de ses adversaires. Il a organisé le terrain – ou l’a organisé lui-même – de manière à assurer une ascension tranquille vers le sommet.

Le ministre a commencé tôt à éliminer ses opposants ; le ministre de la Défense, Hanena Ould Sidi, a été écarté après avoir rêvé de la succession, subissant des coups successifs qui l’ont privé d’influence au sein de l’armée, ses officiers ont été démis et remplacés par des éléments nouveaux dont les esprits ne sont pas encore programmés pour refuser ou discuter.

Quant à l’ancien président, Mohamed Ould Abdel Aziz, son dossier a été clos par un jugement équivalent à une peine de mort, tandis que le ministre guette son plus grand adversaire : le président Biram Dah Ould Abeid, le seul nom qui inquiète les cercles décisionnels et soulève des interrogations sur chaque scénario de « transition sécurisée ».

Dans cette atmosphère tendue, un courant au sein du camp du pouvoir tente de raviver l’idée d’un « candidat consensuel », rassemblant les restes des partisans de l’Ancien Régime et ceux écartés des centres de décision, sans qu’aucune base solide ou réelle popularité sur laquelle compter ne soit dessiner.

Cependant, tous semblent sous-estimer la ruse de « Cheikh Boumdeid », qui sait que la seule issue sécurisée pour lui est de confier le pouvoir à un homme « de chez lui » : son ami d’enfance, son confident, son bras financier, et son compagnon dans l’ombre… Tout comme son père était le compagnon du père du président. Ould Ghazouani a plusieurs fois évoqué dans des cercles privés que Mohamed Ahmed ne lui a jamais dit non de toute sa vie, il est donc bien l’élève.

Dans ce tableau troublé, un nom émerge : un homme que les gens n’aiment pas, qui ne jouit pas de popularité, qui ne possède pas le charisme d’un leader, mais qui connaît bien les clés du palais, et qui bénéficie du soutien de l’extrême droite des Bedouins, de chefs tribaux assoiffés de pouvoir, ainsi que de certains hommes d’affaires qui le considèrent comme un garant de leurs intérêts, et des cheikhs du pouvoir religieux avec des gouverneurs qui ont choisi le silence, tant que le pouvoir est entre de « bonnes mains ».

Et parce que les factions se battent comme des loups affamés pour le butin du pouvoir, la question n’est plus : « Qui est le plus apte pour le pays ? », mais plutôt : « Qui est le plus fidèle ? Qui est le plus fort ? Qui peut protéger le dos de celui qui partira sous le couvert de la nuit ? »

Dans le tumulte de cette course effrénée, certains proposent – avec timidité ou en manœuvrant – l’idée d’un « candidat consensuel », comme si la crise résidait dans les noms et non dans les méthodes, comme si le pays manquait de calmants politiques supplémentaires.

Le consensus, lorsqu’il est imposé d’en haut, n’est pas une solution… Mais un report de l’explosion.

Et au milieu de cette rigidité, certains, à l’intérieur comme à l’extérieur du régime, même timidement, commencent à réfléchir à voix basse : que se passerait-il si Biram était le seul candidat réaliste, capable de briser le cercle vicieux ? Pas parce qu’il est un sauveur, mais parce qu’il est le seul qui n’est pas manipulé par l’État profond, qui n’est pas contrôlé par un groupe d’hommes d’affaires, et qui n’est pas rassuré par des promesses d’ombres.

Traduit de la page Sidi Mohamed Kmache (Facebook)

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