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Coup d’État à la mauritanienne : quand les militaires profitent des funérailles pour faire le ménage

Un billet d’humeur mordant sur le coup d’État de 2005 en Mauritanie, quand les militaires ont profité des funérailles d’un roi pour changer de régime.

Coup d’État à la mauritanienne
Par Un Observateur (pas très) désintéressé
Publié le 3 août 2005 – Temps de lecture : 2 minutes, une éternité en temps de putsch.
Pendant que le président Taya assistait aux funérailles du roi Fahd, les militaires mauritaniens s’invitaient à sa place à la tête du pays. Retour humoristique sur ce putsch pas comme les autres.

Nouakchott, 3 août 2005.
Alors que le président mauritanien Maaouiya Ould Sid’Ahmed Taya faisait ses adieux au roi Fahd à Riyad, certains ont visiblement décidé que c’était aussi le moment idéal pour lui faire leurs adieux… à lui. Et en bonne et due forme : blindés, communiqués militaires, et bien sûr, prise de la radio et de la télé. Un classique du genre. En somme, un coup d’État, version « tapis rouge déroulé en son absence ».

Le scénario était digne d’un mauvais polar à budget modeste : les hommes en kaki, principalement issus de la garde présidentielle (comme quoi, on n’est jamais trahi que par les siens), ont pris le contrôle des points stratégiques de Nouakchott. À commencer par la télévision nationale, parce qu’un coup d’État sans bande-annonce, ce n’est pas sérieux.

Et puis, comme le veut la tradition, le communiqué a été lu, probablement avec une solennité de circonstance : un nouveau Conseil militaire pour la justice et la démocratie (oui, oui, rien que ça) prenait les rênes du pays. Objectif déclaré : en finir avec le « régime totalitaire » de Taya, au pouvoir depuis vingt ans. Deux décennies de stabilité… autoritaire.

Le conseil militaire promet monts, merveilles et élections dans deux ans. Deux ans, pas un jour de plus, juré craché sur la Constitution (celle à venir, bien sûr). D’ici là, on prépare le terrain pour une démocratie propre, bien repassée, avec des institutions transparentes comme de l’eau de roche — ou du thé mauritanien de troisième service.

Le putsch, présenté comme un acte d’amour envers la patrie souffrante, s’annonce donc temporaire. Comme toujours. Car en Mauritanie, l’armée a un calendrier politique un peu capricieux, et le général en chef un sens du timing presque comique : lancer un coup d’État pendant que le chef est à l’enterrement d’un roi. La bienséance, c’est pour les civils.

Pendant ce temps, Ould Taya atterrit à Niamey, visiblement plus hué que reçu, installé dans une villa mise à disposition par les autorités nigériennes. Exilé malgré lui, l’homme fort devenu homme d’ombres observe sans doute son pays à la télévision, cette même télévision désormais aux mains de ceux qui l’avaient juré fidélité.

Ironie du sort : la Mauritanie venait de connaître trois tentatives de putsch en quinze mois. À croire que le coup d’État est devenu un sport national, avec ses saisons, ses équipes, et ses joueurs vedettes.

Morale de l’histoire ?
Ne jamais laisser les clés du pays aux militaires pendant une cérémonie funéraire. Surtout quand on est à plus de 3 000 kilomètres. En Mauritanie, comme ailleurs, la politique reste un terrain miné. Mais ici, c’est l’armée qui tient la carte.

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