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Chômage des jeunes diplômés en Mauritanie : une génération sacrifiée ?

En Mauritanie, le chômage des jeunes diplômés atteint des sommets. Témoignages poignants et analyse des causes d’une crise silencieuse.

Chômage

Nouakchott – Rapide Info. En Mauritanie, le diplôme ne garantit plus l’accès à un emploi. Chaque année, des milliers de jeunes sortent des universités et centres de formation, porteurs d’espoir mais souvent voués à l’attente. Face à une économie peu diversifiée et un secteur public saturé, le chômage des jeunes diplômés atteint des niveaux alarmants. Témoignages et analyse.

Une jeunesse hautement qualifiée mais désemparée
Le chômage touche particulièrement les 18-35 ans. Selon les chiffres officiels, près de 30 % des jeunes actifs sont sans emploi, un taux qui grimpe au-delà de 50 % dans certaines régions selon des ONG locales. Ce phénomène touche durement les diplômés de l’enseignement supérieur.

Fatimetou, 26 ans, titulaire d’un master en économie, raconte son parcours semé d’embûches :

« J’ai postulé à des dizaines d’offres. Soit on ne répond pas, soit on me demande cinq ans d’expérience pour un premier poste. Aujourd’hui, je donne des cours particuliers pour survivre. »

Même son de cloche chez Moussa, ingénieur en télécommunications, diplômé en 2022 :

« J’ai fait un stage non rémunéré dans une entreprise privée. À la fin, aucune proposition. Le secteur est saturé, et les concours publics sont rares. »

Des formations déconnectées du marché du travail ?
L’inadéquation entre les formations et les besoins du marché est régulièrement pointée du doigt. De nombreux cursus théoriques n’offrent pas de débouchés concrets. Le secteur informel devient alors le refuge d’une jeunesse désillusionnée.

Dr. Ahmed Salem, sociologue à l’Université de Nouakchott, analyse :

« Le chômage des diplômés traduit un dysfonctionnement structurel. Il faut revoir les programmes, développer les filières techniques et encourager l’entrepreneuriat local. »

Initiatives timides, attentes immenses
Le gouvernement a lancé ces dernières années plusieurs programmes d’insertion, comme le programme « Chebabouna », ou encore des partenariats avec des incubateurs d’entreprises. Mais l’impact reste limité, faute de financements suffisants et de suivi.

Aïssata, jeune entrepreneure, estime que les démarches restent lourdes :

« Monter une entreprise ici, c’est un parcours du combattant. On ne nous fait pas confiance, et les aides sont souvent réservées à ceux qui ont des relations. »

Une bombe sociale en devenir ?
La précarité persistante des jeunes diplômés constitue un terreau fertile pour le découragement, voire l’exil. Certains rêvent de partir à l’étranger, d’autres sombrent dans l’oisiveté. Plusieurs experts craignent une montée du désengagement civique et des tensions sociales.

Amadou Bocar Ba, analyste économique :

« Le capital humain est là. Il faut un vrai plan national d’emploi jeune, avec une implication des entreprises, un assouplissement administratif et une réforme de l’enseignement supérieur. Sinon, la frustration va grandir. »

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