Tribune de Boydiel Ould Houmeid :

Tribune de Boydiel Ould Houmeid :
SE le Ministre Boydiel Ould Houmeid a publié un éditorial sur l’histoire de la famille de Cheikhna Cheikh Talib Bouya en Mauritanie et en Afrique de l’Ouest, louant son rôle de pionnier dans la diffusion de la science et du mysticisme.
Ould Houmeid a défendu la généreuse famille, soulignant qu’elle était la cible d’attaques injustifiées et appelant au respect de son patrimoine historique et de sa place dans la société.
Voici le texte de l’article :

Je ne voulais pas intervenir sur cette question qui a défrayé la chronique et
pris d’assaut les réseaux sociaux. Je me sentais gêné de m’exprimer
là-dessus, en raison des liens de parenté qui me lient personnellement à la
famille de Cheikhna Cheikh Talib Bouya. Maintenant que le problème est
devenu une affaire d’Etat, je me vois dans l’obligation d’apporter ma
contribution.
Tout d’abord, je tiens à souligner que ce problème ne doit, en aucun cas,
être perçu ou traité dans une optique tribale ou régionale. Ceux qui ont
soulevé le sujet ne l’ont pas fait au nom d’une famille ou d’une tribu, mais à
titre purement personnel. De l’autre côté, Talib Bouya Ould Cheikh Ayah
Ould Cheikh Talib Bouya, en portant plainte au niveau de la justice, a lui
aussi agi en son nom propre. C’est donc sous cet angle que j’aborderai la
question. Mais auparavant, je voudrais donner un éclairage sur la famille
de Cheikhna Talib Bouya Ould Cheikhna Cheikh Saad Bouh, en
commençant par son ordre successoral :
– Cheikh Talib Bouya : 1931 – 1964 ;
– Cheikh Sidaty : 1964 – 1987 ;
– Cheikh Mohamed Melainine : 1987 – 1991 ;
– Cheikh Saad Bouh (Cheikhna Tfeil) : 1991 – 1997 ;
– Cheikh Bounena : 1997 – 2016 ;
– Cheikh Ayah : 2016 – 2022.
Comme il était le dernier fils vivant de Cheikh Talib Bouya au moment du
décès de son grand frère Cheikh Bounena, Cheikh Ayah a assumé la
succession sans contestation. Mais à son décès, des divergences qui
couvaient déjà en sourdine sont apparues au grand jour. Tous les bons
offices et les nombreuses bonnes volontés déployés pour les résoudre ont
échoué, y compris les efforts fournis par l’Etat, notamment le Président de
la République, par l’entremise d’une commission présidée par son
Conseiller pour les affaires islamiques et comprenant des notables et
personnalités proches de la famille, dont moi-même je faisais partie. Les
multiples réunions et entretiens menés avec les différentes familles de la lignée de Cheikhna Cheikh Saad Bouh n’ont abouti à aucun règlement. Se
fondant sur le fait que le dernier khalife en titre est leur père, les membres
de la famille de Cheikh Ayah ont considéré qu’en l’absence d’une décision
unanime contraire, la succession leur revient de droit. Les autres
prétendants à la khilafa ont chacun ses arguments que nous n’évoquerons
pas ici, car le sujet actuel concerne la famille Cheikh Ayah en particulier.
On peut dire que l’histoire de la famille Cheikh Saad Bouh se confond avec
celle du pays. Déjà, sous la colonisation, la, famille avait établi des liens
avec les autorités coloniales, comme en témoigne une lettre du président
Lebrun adressée à Cheikh Saad Bouh pour demander son aide, afin que
les ressortissants français puissent traverser le Soudan français à
destination de l’Arabie saoudite. Le colonisateur l’avait également sollicité
pour une intervention auprès du roi du Cayor Lat Dior Ngoné, avec qui il
entretenait des liens spirituels, en vue de faciliter la construction du chemin
de fer Saint-Louis – Dakar auquel Lat Dior s’opposait farouchement, en
disant que son emblématique cheval Malaw ne verrait jamais les rails.
Selon les récits populaires, le cheval se donna la mort lorsqu’on voulut le
forcer à voir le chemin de fer, d’où la chanson oulof « Niani bagn-ne». Au
lendemain des indépendances, les mêmes relations se sont poursuivies
entre la famille et les nouveaux chefs d’Etat africains. C’est ainsi qu’au
Sénégal Cheikhna Cheikh Sidaty, fis aîné de Cheikh Talib Bouya, a
continué après le décès de son père les mêmes contacts avec les
présidents Senghor et Abdou Diouf, tout comme ses successeurs l’ont fait
par la suite avec les présidents Abdoulaye Wade et Macky Sall.
Il faut noter que cette famille entretient des relations religieuses avec une
grande partie de l’Afrique de l’ouest, relations tissées par le grand père
Cheikhna Cheikh Saad Bouh depuis son premier voyage en Afrique en
1872, et elle dispose de représentants dans plusieurs pays dont j’ai la liste,
notamment dans presque toutes les régions du Sénégal, au Mali, en
République de Guinée, en Guinée Bissau, en Côte d’Ivoire, etc. On trouve
une expression éloquente de ces rapports dans le fait que le deuxième
khalife des Mourides, cheikh Mohamed Fadilou M’Backé (1888 – 1968)porte le nom de Mohamed Vadel , nom que lui a donné Cheikh Ahmedou
Bamba, en témoignage du respect et de la relation spirituelle entre lui et
Cheikh Saad Bouh Ould Mohamed Vadel. Il en est de même du geste
mémorable de Seyidi Abdoul Aziz Sy, Khalife général des Tidjanes SY, lors
d’une décoration collective par le ministre français d’Outre-mer, quand il a
cédé sa place devant toute l’assistance à Cheikh Talib Bouya pour ne pas
passer, avait-il dit, devant un descendant du prophète.
La solidité de ces relations avec l’Afrique de l’Ouest est concrétisée par la
visite annuelle qu’effectue des milliers de fidèles à Nimjatt à chaque fin de
Ramadan. Instauré par Cheikhna Cheikh Talib Bouya, ce pèlerinage
s’effectue régulièrement depuis en 1949, et a eu lieu même en 1989,
malgré les tensions dans nos relations avec le Sénégal, pays d’où viennent
en majorité les visiteurs de la tombe de Cheikhna Cheikh Saad Bouh.
Si je m’appesantis sur ces différents aspects, c’est parce que je connais la
famille plus que beaucoup de gens, en raisons des liens consanguins qui
nous lient. En effet, les premiers fils de Cheikh Talib Bouya (Cheikh Sidaty,
Cheikh Mohamed Melainine et Cheikh Saad Bouh dit Cheikh Tfeil), qui ont
été Khalifes tous les trois, ont pour mère Yacine mint Guewtiel qui est mon
arrière-grand-mère ; de même, les enfants de Bounena Ould Cheikh Saad
Bouh (Sidi Bouya, Tghana et El Hadrami) ont pour mère Diyana mint
Guewtiel, petite sœur de Yacine, donc une tante à moi ; en outre, Sidaty
Ould Mohamed El Agheb dont la mère est Nafissetou mint Cheikh Saad
Bouh a eu des enfants de Tamara mint Wediaa qui est aussi ma
grand-mère. Si vous y ajoutez que les trois familles en question ont des
liens matrimoniaux avec le reste des filiations de Cheikh Saad Bouh, vous
comprendrez combien je suis proche de cette famille dans son ensemble.
C’est dire que je connais bien cette famille et je sais qu’elle a toujours été
prospère, comparée au reste du pays. S’agissant de l’origine de la fortune
de la famille de Cheikh Ayah Ould Cheikh Talib Bouya, je partage la
position exprimée par Cheikh Taleb Bouya Ould Cheikh Ayah. Une règle de
droit dit que « la liberté de l’individu s’arrête là où commence celle de autre ». La fortune est une affaire privée et rien n’oblige son détenteur à la
justifier ou à divulguer son origine à d’autres individus comme lui, ni au
public. Seul l’Etat est habilité à demander et à connaitre l’origine d’une
fortune, d’abord pour des besoins de fiscalité, ensuite pour des raisons de
sécurité et d’éthique.
En conclusion, le rôle de contrôle sur les fortunes ne peut être que du
ressort de l’Etat. Demander l’origine des ressources de la famille de
Cheikhna Cheikh Saad Bouh c’est comme si au Sénégal, à titre d’exemple,
on demandait l’origine de la fortune des familles religieuses telles que les
Mourides à Touba, les Malick Sy à Tivaouane ou les Niassènes de Keur
Baye Niass.

Boydiel Ould Houmeid (Facebook)

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